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Lifestyle - La Mode

Mais qui est donc « Hellène » ?

Il a fait courir le buzz sur les réseaux sociaux, et l’impatience de savoir qui était cette « Hellène » n’a cessé de grandir ces dernières semaines. « Qui est Hellène ? » Les instagrameurs ont enfin leur réponse. Hussein Bazaza vient de dévoiler sa collection printemps-été 2019. Hellène en est l’étrange héroïne.

Hussein Bazaza, « Hellène », collection printemps-été 2019. Photos D.R.

Diplômé d’Esmod Beyrouth en 2011, Hussein Bazaza fait partie de ces jeunes créateurs qui contribuent à faire du Liban autant une adresse incontournable qu’un passionnant laboratoire de la planète mode. Le jeune homme, qui, enfant, ne rêvait que cinéma, images et couleurs, n’avait jamais vraiment envisagé de faire carrière dans le vêtement. Quand il dessinait des costumes, ce n’était que pour rendre un peu plus tangibles les ombres qui peuplaient ses rêveries. Lui ne voulait que raconter des histoires, fasciner, magnétiser, émouvoir avec des contes loufoques et fantastiques, créer des univers, des personnages, des situations improbables et soigner ses chutes en forme de contes philosophiques. Son autre option était d’étudier l’architecture d’intérieur, la décoration, la scénographie. Mais sa mère, éblouie par son talent de styliste, le pousse à s’inscrire à Esmod dont il sort couronné de lauriers. Il est aussitôt enrôlé comme stagiaire chez Rabih Kayrouz, à Paris, puis engagé chez Élie Saab en tant que styliste junior. Deux parrains prestigieux, deux styles opposés qui définissent pourtant chacun à sa manière une facette particulière de l’identité libanaise et orientale. De cette double expérience, Bazaza ressort avec sa propre synthèse. En 2012, il crée sa première collection en propre et il est adopté par l’incubateur Starch, fondé par Rabih Kayrouz et Tala Hajjar, pour la lancer. À 23 ans, il crée sa marque éponyme et commence à cumuler les prix : meilleur styliste émergent du Moyen-Orient pour le prestigieux Elle Style Award, meilleur styliste émergent pour les Middle East Fashion Awards 2015, premier lauréat de la catégorie mode de Style.com/Arabia-DDFC, prix accompagné du lancement de sa première collection capsule printemps 2016 sur le site Farfetch.com


Bobine ou bobine ?
Malgré cet alignement d’astres en sa faveur, Bazaza n’aime pas porter l’étiquette de « styliste » qu’il juge étroite et restrictive. Il se considère comme un artiste au sens large et, réalisateur contrarié, ne renonce pas à ses rêves cinématographiques. Le jeune créateur utilise la machine à coudre comme une caméra. Bobine pour bobine, le fil qui s’en dévide est un film, et inversement. La femme qui se profile dans son imaginaire – et qu’il s’apprête à habiller – est mystérieuse forcément, voire obscure, mais toujours infiniment séduisante car il n’oublie pas le précieux conseil d’Élie Saab à l’apprenti qu’il fut : « Fais en sorte qu’elles se sentent belles. » Dès lors, chacune de ses collections porte un prénom féminin et raconte la vie d’une héroïne sortie de son cerveau tout habillée, avec ses accessoires, mais aussi les éléments intangibles de son univers, indices historiques, culturels et contextuels de son histoire.


Insaisissable Hellène
Ainsi est donc née Hellène, deux « l », deux ailes, ange ou démon, évaporée aussitôt créée, insaisissable, et pour cause. L’annonce de son arrivée sous forme d’intrigue a mis en haleine les internautes, attirant l’attention sur une collection brillamment aboutie. En story teller qui croit à ses propres fictions, Hussein Bazaza raconte qu’Hellène a naguère possédé un hôtel fréquenté par de sublimes créatures que la jeune femme observait avec une admiration teintée d’envie. Tant et si bien qu’elle a fini par prendre à chacune de ses clientes le meilleur de son anatomie, espérant ainsi créer à partir de ces éléments la beauté idéale. Son prénom, à cet égard, n’est pas étranger à la recherche consacrée aux canons esthétiques dans l’Antiquité grecque. A-t-elle réussi ? Le créateur constate plutôt un résultat dystopique. Ce nez, ces yeux, ces jambes, cette taille tous parfaits en eux-mêmes ne produisent, une fois assemblés, qu’un être quas monstrueux qui va détruire son héroïne. L’histoire d’Hellène invite chaque femme à embrasser sa propre beauté, son harmonie intrinsèque formée de détails tant gracieux que disgracieux. La recherche de la perfection l’ayant conduite à la perversion, Hellène est à présent prisonnière d’un paradis défendu, coincée dans l’incertitude entre le vrai et le faux.

Reflétant les effets et les ambiances d’un jardin enchanteur mais faussement rassurant, la palette de la collection Hussein Bazaza printemps-été 2019 décline des verts eau, des rouges ardents, des bleus vifs et des jaunes criards. Les textures incorporent plumes, paillettes, satin, mousseline, denim et broderies narratives empruntées à l’univers de la bande dessinée.

Les collages de dentelle, signature de l’enseigne, prennent de nouvelles dimensions, de même que les détails narratifs, la géométrie des coupes et la prédilection du créateur pour les grands aplats de couleurs. Une collection d’une singularité extrêmement séduisante, le support narratif un peu trop complexe n’ajoutant rien à la beauté de l’ensemble.


Pour mémoire
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