L’entrée du centre Zahra à Grande-Synthe, dans la banlieue de Dunkerque. AFP/Philippe HUGUEN
Hier matin, les autorités françaises ont mené dans le nord de la France, à côté de Dunkerque, une opération visant les locaux d’une association chiite française, le Centre Zahra. Cette association est soupçonnée de légitimer le jihad et de faire l’apologie du mouvement islamiste palestinien Hamas et du Hezbollah libanais, selon une source diplomatique française citée par l’AFP. Parallèlement, la France a gelé les avoirs de ressortissants iraniens et d’une entité étatique iranienne, impliqués selon les autorités dans le projet d’attentat déjoué à Villepinte (banlieue nord-est de Paris) le 30 juin dernier, qui visait un rassemblement d’un groupe iranien dissident. Ces deux décisions françaises, presque simultanées, font partie de la « même préoccupation de ne tolérer » aucune forme d’acte, d’intention ou d’incitation au terrorisme, mais ne sont « pas liées », selon la même source. Le timing et l’identité des entités visées montrent toutefois qu’il existe un lien global qui est l’attitude de la France vis-à-vis de l’Iran. « C’est Israël qui est derrière ça. C’est ce que je voudrais vous lancer comme message », a lâché le fondateur du Centre Zahra, Yahia Gossami. « Pourquoi ? Eh bien parce que nous, on soutient le Hezbollah. On est chiites, on est contre Daech. Nous faisons la guerre au terrorisme. Nous appelons terrorisme le terrorisme. La Résistance, le Hezbollah, n’est qu’une résistance qui défend un territoire qui était occupé par Israël et il se peut qu’il y ait un clash demain. C’est possible qu’il y ait une guerre très proche », a-t-il poursuivi. Le Hamas et la branche militaire du Hezbollah figurent tous deux sur la liste des organisations terroristes du Conseil européen.
L’opération au Centre Zahra et aux domiciles de certains de ses responsables a mobilisé 200 policiers. Elle « s’inscrit dans le cadre de la prévention du terrorisme, les activités de l’association Centre Zahra France étant particulièrement suivies en raison du soutien marqué par ses dirigeants à plusieurs organisations terroristes et en faveur de mouvements prônant des idées contraires aux valeurs de la République », a annoncé dans un communiqué la préfecture du département du Nord. « Les fonds et ressources économiques qui appartiennent à Centre Zahra sont possédés, détenus ou contrôlés par les associations Centre Zahra France, déclarée le 25 avril 2005 à la sous-préfecture de Dunkerque (...) font l’objet d’une mesure de gel des avoirs pour une durée de six mois », annonce un arrêté des ministères de l’Intérieur et de l’Économie.
(Lire aussi : La confiance entre Paris et Téhéran mise à mal)
Financement iranien
Au-delà de la même « intolérance » face au terrorisme qui a motivé les deux décisions françaises, c’est l’identité géopolitique de ce « terrorisme » qui est ici visée, à savoir l’Iran et ses obligés. « L’action française pourrait être vue comme un avertissement contre une répétition d’opérations du renseignement iranien sur le territoire français, comme cela a été le cas au cours des dernières décennies. Cela ne sera pas toléré et aura des conséquences », analyse Ali Fathollah-Nejad, chercheur associé au Brookings Doha Center, interrogé par L’Orient-Le Jour sur les décisions du gouvernement français de s’attaquer aux intérêts iraniens en France. Il rappelle que « la France a toujours été un refuge pour les dissidents iraniens, qu’ils soient démocrates ou antidémocratiques », en référence à des groupes considérés comme terroristes par Téhéran.
Le Centre Zahra, dont « le but est de faire connaître le message de l’islam à travers le regard du Prophète et de sa famille » tel qu’écrit sur son site internet, héberge dans ses locaux plusieurs associations dont la Fédération chiite de France et le Parti antisioniste (PAS), présidé par M. Gossami. Le PAS n’a pas tardé à se faire connaître lorsque l’humoriste Dieudonné et l’idéologue Alain Soral avaient mené une des listes électorales de ce parti pour les élections européennes de 2009, recueillant moins de 2 % des voix en Île-de-France. Outre son faible résultat ou ses candidats notoires, l’élément qui avait marqué les esprits et qui retrace le lien iranien avec le Centre Zahra est la source de financement du PAS lors de ces élections, qui n’est autre que Téhéran, comme l’avait confirmé M. Soral. Une des techniques devenue patente de l’Iran pour pénétrer une société est de s’appuyer sur son élément chiite et ses ramifications.
Ces éléments illustrent toutefois que cette opération s’inscrit dans une volonté française de punir l’Iran et est donc liée à l’affaire du gel des avoirs iraniens. Une punition plutôt limitée, vu qu’en fin de compte la pénétration iranienne en France à travers la communauté chiite n’est pas aussi dangereuse que celle au Liban ou en Irak. « Cela semble être une affaire franco-française », a nuancé François Nicoullaud, ancien ambassadeur de France à Téhéran, interrogé par L’OLJ.
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commentaires (11)
C’est dingue ! On se demande pourquoi une si jolie organisation , qui ne prêche que la tolérance et la bonté , est embêtée par les autorités d’un pays ! C’est peut être à cause des saoudiens, des israéliens ou du réchauffement climatique, ...bon ils s’apprêtaient à faire un attentat contre des opposants iraniens ? On comprend toujours pas les autorités de ce pays qui s’en prennent à ces individus qui ne font que soutienir la « culture » iranienne ! Le monde est fou et intolérant.... lol
L’azuréen
20 h 34, le 03 octobre 2018