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Liban - Communautés

L’agriculture bio, un travail de moine aussi...

Deux religieux français sont les gardiens du petit monastère grec-catholique Saint-Jean-du-Désert à Aïn Trez. Entre les prières et les offices, ils travaillent la terre et revendent à petite échelle leurs récoltes saisonnières.

Le frère Silouane dans la chapelle Saint-Jean-du-Désert. Ora et labora, prière et travail...

En périphérie de Aïn Trez, dans le caza de Aley, le frère Silouane avec sa longue barbe grise nous accueille avec enthousiasme. Dans cette petite place reculée, où se mêle l’odeur des fleurs au vent frais, son accent breton ne passe certainement pas inaperçu. Le père Pierre, quant à lui, un peu plus timide, arrive d’un pas lent, un grand sourire aux lèvres. Les deux moines, en soutane, nous font faire le tour de leur lieu de résidence et de leurs terres, en commençant par la chapelle où se trouvent plusieurs icônes orientales. Ces moines grecs-catholiques français, qui vivent en marge de la société, sont connus pour les légumes et les fruits biologiques qu’ils cultivent. Outre sa production agricole à 90 % biologique, le très coquet monastère Saint-Jean-du-Désert comporte deux chambres d’hôte ouvertes aux invités.

Reconnaissance canonique
Après avoir habité à Jérusalem dans le monastère Saint-Jean-du-Désert, ils se sont retrouvés contraints de retourner en France à cause des tensions politiques dans la Ville sainte. En l’absence d’un patriarcat grec-catholique en France, ils se sont heurtés à un problème de reconnaissance canonique. « Nous sommes des Orientaux par adoption. Pour pouvoir suivre le rite oriental, nous étions supposés soit devenir grecs-orthodoxes, soit partir. Comme nous voulions rester fidèles et en communion avec le pape, alors nous avons choisi de partir », précise le frère Silouane. Ils expliquent que le patriarcat grec-catholique les a invités au Liban pour reprendre en main un petit monastère qui avait été détruit durant la guerre civile. À leur arrivée à Aïn Trez en 2004, ils ont commencé à cultiver quelques vignes abandonnées, perchées dans la montagne et appartenant au patriarcat depuis le XVIIIe siècle. À eux deux, ils s’efforcent de générer des profits pour être indépendants financièrement. « Nous ne voulions pas vivre comme des parasites », affirme avec humour le frère Silouane, 53 ans, juste avant d’aller sonner les cloches du monastère. Son aîné, le père Pierre, âgé lui de 75 ans, renchérit en replaçant ses lunettes sur un visage raviné : « Les moines doivent travailler, la prière ne suffit pas. »

Le kilo de tomates
Après avoir transformé le vignoble en plusieurs plantations différentes, ils se sont lancés dans la production agricole. Aujourd’hui, ils utilisent le principe de la permaculture, ce qui leur demande beaucoup plus d’efforts et de temps. « La population ne connaît pas la valeur d’un revenu agricole. Pour avoir un kilo de tomates, il faut beaucoup de temps, et cela ne nous rapporte que 2 500 livres, déplore le père Pierre. Ce n’est rien du tout. » 

Avec un demi-hectare de terre, où se trouvent une soixantaine de poules et plusieurs variétés de fruits et de légumes – aubergines, tomates, oignons–, cette modeste récolte permet aux moines de subvenir à leurs besoins. « Avec notre petite agriculture, nous avons suffisamment d’argent pour nous habiller, pour manger et pour entretenir la voiture. Nous vivons avec très peu d’argent », souligne le frère Silouane avec de grands gestes qui laissent paraître sa soutane déchirée à la manche. 

Fichés « étrangers » sur leur carte de séjour, il leur est naturellement interdit de commercer. S’ils le font, c’est au nom du patriarche grec-catholique. « Comme nous dépendons du patriarche, il faut lui rendre des comptes. Il nous assure un toit et de l’électricité, mais nous devons être autonomes pour le reste », explique le père Pierre. 

Un accueil hors du commun
Dès leur arrivée dans leur pays d’adoption, ils ont été accueillis à bras ouverts. « Au Liban, dès que nous portons une soutane, les personnes sont plus respectueuses et généreuses. Elles nous font toujours un prix, et cela nous aide à vivre de rien », constate le père Pierre avec un air très reconnaissant, tout en offrant quelques raisins verts et juteux à ses invités.

Grâce au bouche-à-oreille, le succès a été au rendez-vous dès la première récolte. « Les Libanais achètent nos produits parce qu’ils sont biologiques », constate le père Pierre, fier, en se dirigeant vers la serre où se trouvent des plantations de tomates rouge vif. Pour élargir leur distribution, ils vendent leur marchandise à Beyrouth. « À l’époque, nous descendions à Achrafieh. Nous avions un ami coiffeur et nous mettions la voiture devant chez lui. La voiture était à peine arrêtée que les gens ouvraient les portières parce qu’ils avaient peur que nos produits disparaissent trop vite », s’esclaffe le frère Silouane. Aujourd’hui, ils font affaire avec le supermarché Boukhalil à Hazmieh.

Entre les prières et les offices, ces deux moines travaillent dur et vivent en réelle communauté religieuse. À cause de l’âge avancé du père Pierre, c’est le frère Silouane qui travaille la terre. « Je n’exagère pas si je dis que je ne fais plus rien », lance le premier. « Le frère Silouane s’occupe du jardin et de la cuisine. À cause de mes vieux os, je ne peux faire que les petites tâches telles qu’un peu de ménage et la comptabilité », avance-t-il avec autodérision, en regardant avec complicité le frère Silouane. 

Ces deux moines, qui ont un quotidien d’ermite, sont très fiers de leur nouveau monastère et continuent de travailler la terre. « La vie des moines, c’est la vie chrétienne normale. Ceux qui portent le nom de chrétien devraient prier et travailler autant que nous », fait remarquer le père Pierre en affirmant toutefois comprendre que les gens aient besoin de travailler pour subvenir aux besoins de leurs familles.

En périphérie de Aïn Trez, dans le caza de Aley, le frère Silouane avec sa longue barbe grise nous accueille avec enthousiasme. Dans cette petite place reculée, où se mêle l’odeur des fleurs au vent frais, son accent breton ne passe certainement pas inaperçu. Le père Pierre, quant à lui, un peu plus timide, arrive d’un pas lent, un grand sourire aux lèvres. Les deux moines, en...

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PEUT-ON TRANSFORMER TOUS LES AGRICULTEURS EN MOINES QUI CULTIVENT DU BIO DANS LE PAYS MALHEUREUSEMENT DE TOUS GENRES DE DECHETS ? AU LIEU DU BIO NOUS AVONS DU DECHEIO...

LA LIBRE EXPRESSION

09 h 08, le 24 août 2018

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Commentaires (2)

  • PEUT-ON TRANSFORMER TOUS LES AGRICULTEURS EN MOINES QUI CULTIVENT DU BIO DANS LE PAYS MALHEUREUSEMENT DE TOUS GENRES DE DECHETS ? AU LIEU DU BIO NOUS AVONS DU DECHEIO...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 08, le 24 août 2018

  • Un modèle de vie dont devraient s'inspirer les ordres maronites.

    Yves Prevost

    07 h 11, le 24 août 2018

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