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Lifestyle - Un peu plus

Le regard des hommes

Je ne suis pas féministe. Je suis juste une femme. Je ne suis ni une tentatrice, ni une pécheresse, ni une provocatrice, ni une ensorceleuse. Je suis une femme. Et j’en ai marre d’avoir honte de ce que je suis. J’en ai marre de me cacher et de cacher mon corps du regard des autres. Je voudrais porter ce que je veux sans qu’on me reluque avec des yeux concupiscents. J’aimerais ne pas porter de soutien-gorge quand il fait chaud et faire du topless sans qu’on me traite de pute. J’aimerais pouvoir sortir de mon cours de sport en brassière et short quand il fait 33 degrés et non pas me planquer sous un sweat difforme. Et je serais ravie de me promener dans la rue sans qu’on me siffle, me hèle ou m’abreuve de mots vulgaires. J’aimerais monter sur un pole dance sans qu’on pense que c’est un appel au strip-tease. 

Malheureusement, c’est impossible. Malheureusement, même dans un jogging pourri, les yeux fatigués, je serai obligée d’entendre des chou ya achta, ou des yo2borné tizik. De voir une voiture ralentir et ralentir jusqu’à ce que je tourne mon regard pour constater que le chauffeur qui me propose de m’accompagner (ya héloué) n’est rien d’autre qu’un darak. Un homme qui est censé assurer ma sécurité. 

J’aimerais également qu’on me traite d’égale à égale. Qu’on ne me considère pas comme une citoyenne de seconde zone. J’aimerais donner ma nationalité libanaise à mes enfants. Ne pas être dégoûtée quand j’apprends qu’on naturalise à droite et à gauche, pour une poignée de dollars. J’aurais aimé qu’on soit plus nombreuses à être impliquées dans la vie politique. J’aimerais qu’on ne me traite pas de grande gueule quand je dis ce que je pense. Parce que j’ai cette écœurante sensation de revenir au Moyen Âge. Voilà en fait ce que la plupart d’entre nous ressent : une espèce de retour à ces temps lointains où nous n’étions que des citoyennes de seconde zone. Et quelque part, nous le sommes. Nul besoin de revenir sur le fait que nous ne sommes pas les tutrices légales de nos enfants et qu’on ne peut donc toujours pas leur ouvrir un compte bancaire. C’est dans l’attitude des hommes (pas tous, heureusement) à notre égard que l’on constate que rien n’a vraiment évolué. Lorsqu’il s’agit de formalités à faire, on nous prend souvent pour des connes. Quand on se fait arrêter au volant, c’est soit pour se faire draguer, soit pour nous expliquer avec mépris qu’on vient de commettre une infraction. Probablement que ledit darak doit penser qu’on ne devrait pas conduire et que ledit darak siffle les filles quand il se promène sans casque sur sa mobylette. 

Penser que les choses peuvent s’améliorer, changer, est une utopie. Comment cela pourrait-il se faire quand les soi-disant représentants de l’autorité ne nous respectent pas ? Quand les autorités elles-mêmes nous relèguent à des sous-fonctions ? Quand les salaires ne sont pas équilibrés, ni égaux à ceux des hommes ? Quand dans le monde entier, les femmes se battent pour leurs droits, et que chez nous, c’est encore et malheureusement la société patriarcale qui domine la pensée ? Que les jeunes femmes qui travaillent à domicile sont traitées comme des moins-que-rien ? Que leurs droits sont bafoués ? Qu’il reste encore des hommes (beaucoup trop d’hommes) qui considèrent que les femmes doivent rester à la cuisine, aux tâches ménagères, à la maison, auprès des enfants ? Qu’elles ne sont bonnes qu’à procréer ? Qu’elles n’ont pas le droit à l’avortement ? Que leur pension alimentaire en cas de divorce doit être risible? Que l’adultère féminin est impensable ? Qu’elles doivent prendre l’accord de leur famille avant de se marier quand elles ne sont pas obligées d’épouser un homme de leur choix ? Et j’en passe.

Je suis une femme et je ne suis pas le sexe faible. Je suis une femme et j’ai peur pour l’avenir de nos petites filles.

Je ne suis pas féministe. Je suis juste une femme. Je ne suis ni une tentatrice, ni une pécheresse, ni une provocatrice, ni une ensorceleuse. Je suis une femme. Et j’en ai marre d’avoir honte de ce que je suis. J’en ai marre de me cacher et de cacher mon corps du regard des autres. Je voudrais porter ce que je veux sans qu’on me reluque avec des yeux concupiscents. J’aimerais ne pas...

commentaires (8)

Malheureusement il va falloir légiférer pour interdire ce type de comportement et pour faire cesser les pratiques misogynes de certains. Par la suite, au bout de 5 à 10 ans après, le civisme prendrait le relais.

Shou fi

17 h 12, le 08 juillet 2018

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Commentaires (8)

  • Malheureusement il va falloir légiférer pour interdire ce type de comportement et pour faire cesser les pratiques misogynes de certains. Par la suite, au bout de 5 à 10 ans après, le civisme prendrait le relais.

    Shou fi

    17 h 12, le 08 juillet 2018

  • Madame Ce que vous pouvez avoir raison !!!! Mais quant aux rigolos qui relèvent de l’autorite costumes, leur tenue «  réglementaire » leur permet uniquement soit de se défouler sur tous sans discrimination aucune soit pour s’abreuver toutes monnaies confondues. Le pire vous devez les payer de vos taxes et vous devez vous les payer et leurs vulgarités lâches . Malheureusement, le Liban espace de liberté n’existe plus ... faudra attendre plusieurs générations pour qu’une éducation saine et ciblée soit re instaurée à même de reconstituer une société pluraliste et diversifiée et loin de l’idée unique, et encore...

    EDDE PAUL

    07 h 14, le 08 juillet 2018

  • Le mode de vie "à la française" a duré de 1920 à 1943 et depuis 1945 tant bien que mal jusqu'au milieu des années 1990. Depuis, nous avançons à reculons jusqu'au point de départ. Hélas.

    Un Libanais

    17 h 34, le 07 juillet 2018

  • bien qu'on fanfaronne partout et à chaque occasion que nous sommes au 21eme siecle bla bla bla, il s'avère clairement que l'évolution ne nous a pas réèllement ratrapper! Hommes et femmes ne sont pas pareils mais sont égaux, des mêmes droits et des mêmes résponsabilités! non seulement le Liban mais plein de pays, même dits développés, font face à cette réalité mais souvent sans succès! Ce sont les actions, les positions et les insistences des Médéas de ce monde qui ajusteront les choses! bonne chance à vous, à nos mères, soeurs, filles et parentes!!

    Wlek Sanferlou

    16 h 02, le 07 juillet 2018

  • LAÏCITÉ: Sur les questions d’égalité entre les femmes et les hommes, bien qu’il ne s’agisse pas directement de laïcité, les réponses sont claires : il n’est pas question d’autoriser, sous aucun prétexte, qu’il soit religieux ou autre, une quelconque inégalité. Le droit commun l’emporte évidemment sur toute éventuelle prescription religieuse ou interprétation religieuse. Sur toutes ces questions, y compris les plus sensibles, il faut savoir garder « la tête froide » et appliquer le droit, avec fermeté et discernement. Rien que le droit mais tout le droit. Mais il ne faut pas transformer la laïcité en une série de nouveaux interdits car cela ne pourrait qu’alimenter un discours victimaire et, par voie de conséquence, les provocations et les extrémismes religieux et politiques.

    yves kerlidou

    11 h 06, le 07 juillet 2018

  • Bravo Médéa milles fois bravo je suis un homme et j'avoue être effrayé par le comportement malsain de certains (pour être poli) Libanais et désolé du comportement de certaines religions qui trouvent normal que le mari puisse se mettre en maillot de bain et se baigner et que Mme reste sur le bord habillée jusqu'au oreilles sous la chaleur. C'est peut être une égalité des droits hommes et femmes que j'ai du mal à concevoir

    yves kerlidou

    10 h 28, le 07 juillet 2018

  • MALHEUREUSEMENT VOUS VIVEZ DANS LE MAUVAIS MILIEU TRES CHERE MADAME OU LA MOITIE DES CITOYENS SONT ATTEINTS D,OBSCURANTISME INNE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 27, le 07 juillet 2018

  • 100/100 sur chaque mot écrit. Je suis libanaise et aucun droit de donner ma nationalité a mes enfants. Pour ce qui est des “daraks” et autres fonctionnaires c est une autre histoire. Ge me fais arrêter il y a deux semaines à Tabaris pour soi disant effraction. G dois avouer que vu mon âge j avais omis de renouveler mon permis, et ceci ma faute, MAIS on était 5 voitures-bars arrêtees et TOUTES des femmes, et G fait la remarque au haut places mais bon....

    Irene Ramadan Moussalli

    08 h 51, le 07 juillet 2018

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