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Liban - Décryptage

Gouvernement : un nœud sunnite et des conseils de prudence

En dépit de la remise par le Premier ministre d’une première mouture du gouvernement en gestation au président de la République lundi soir, l’impression générale dans le pays est que Saad Hariri ne semble pas très pressé de former le nouveau gouvernement.

D’ailleurs, cette mouture ne comportait pas de noms, rien qu’une première distribution des portefeuilles selon les parts de chaque partie, qui ressemble étrangement à l’actuel gouvernement. Les milieux proches de Aïn el-Tiné relèvent le manque d’empressement du Premier ministre et précisent qu’il est inexplicable pour plusieurs raisons. D’abord, la situation générale du pays, et en particulier économique, ne supporte pas une vacance au niveau de l’exécutif, même si le gouvernement actuel continue de gérer les affaires courantes. Mais les dossiers importants sont pressants et il faut bien plus qu’un fonctionnement de routine pour les régler. La seconde raison porte en particulier sur le conflit qui s’annonce entre le Liban et le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), dans lequel le Liban devrait présenter un front uni et ferme pour obtenir gain de cause. La troisième raison porte sur la situation régionale qui est instable et complexe et qui devrait pousser les Libanais à se doter le plus rapidement possible d’un gouvernement actif pour se mettre à l’abri des retombées d’éventuelles secousses régionales. Enfin, s’il faut en croire les différentes parties, il n’y a pas d’obstacles insurmontables qui entravent la formation du gouvernement et il n’y a donc pas de raison pour ne pas les régler au plus tôt. Surtout si l’on adopte des critères clairs qui facilitent la distribution des portefeuilles.

À cet égard, la phrase qui a figuré dans le communiqué qui a suivi la réunion nocturne entre Hassan Nasrallah et le ministre Gebran Bassil est assez significative. Selon le communiqué, les deux parties se sont entendues pour que le nouveau gouvernement reflète les résultats des élections législatives, sans exclure personne. Si cette règle est adoptée, elle devra s’appliquer à toutes les composantes, notamment chez les sunnites, chez les druzes et chez les chrétiens, sachant que chez les chiites, il n’y a pas de problème apparent : le Hezbollah et Amal, qui à eux deux ont raflé les 27 sièges parlementaires chiites, ont décidé de se partager les six ministres d’un gouvernement de 30 membres à parts égales, avec un portefeuille régalien pour Amal.

C’est donc chez les autres communautés qu’il y a un problème. Une personnalité qui suit de près le dossier gouvernemental affirme que la question la plus épineuse se trouve chez les sunnites, ensuite vient le problème druze et à la fin le nœud chrétien.

Chez les sunnites, dix sièges parlementaires sur 27 ne sont pas dans l’orbite du courant du Futur et exigent d’être représentés par deux ministres. Or, jusqu’à présent, le Premier ministre désigné refuse d’évoquer cette question, arguant du fait que ces dix députés ne sont pas unis dans un même bloc parlementaire et que par conséquent, ils ne peuvent pas être représentés au gouvernement, où le partage des portefeuilles se fait sur la base des groupes parlementaires. Jusqu’à présent, et dans la première mouture qu’il a remise au chef de l’État, Saad Hariri n’accepte de céder qu’un seul ministre sunnite au président de la République, comme c’est le cas dans l’actuel gouvernement. La question qui se pose à ce stade est la suivante : jusqu’où sont prêtes à aller les personnalités sunnites élues dans le cadre des dernières législatives dans leur revendication et le Hezbollah qui appuie clairement cette revendication est-il prêt à mener un combat dans ce but ? Tout en précisant que ce dernier souhaite faciliter au maximum la formation du gouvernement, car il est conscient de la gravité de la situation économique intérieure et de la situation régionale en général, les sources du parti chiite font toutefois remarquer que si on a organisé des élections, c’est bien pour tenir compte de leurs résultats. On ne peut pas faire comme si elles n’avaient pas eu lieu.

Le même scénario se reproduit au niveau des druzes. Walid Joumblatt qui a obtenu 6 sur les 8 députés druzes du Parlement exige de choisir les 3 ministres druzes (dans une formule de 30), et le camp adverse estime qu’il doit en céder un (à Talal Arslane), quitte à obtenir un troisième ministre d’une autre confession en contrepartie.

Pour les Forces libanaises, le problème est quasiment similaire, car ce parti a obtenu 15 sièges parlementaires, même si deux d’entre eux n’en font pas officiellement partie (César Maalouf et Jean Talouzian). Comme elles ont pratiquement quatre portefeuilles dans l’actuel gouvernement, elles en réclament donc six dans le prochain. Mais de l’avis des différentes parties politiques, il ne s’agit pas là d’un obstacle insurmontable et les discussions en profondeur pourraient faciliter son règlement. Le vrai problème est donc au niveau des sunnites, car c’est le leadership de Saad Hariri qui est en jeu et au niveau des druzes où le leader Walid Joumblatt se sent visé. Mais, jusqu’à présent, aucun contact sérieux n’a été effectué pour tenter d’aplanir ces difficultés. Selon la personnalité qui suit de près le dossier de la formation du gouvernement, les Saoudiens auraient conseillé à Saad Hariri de ne pas se précipiter, car les développements régionaux pourraient jouer en sa faveur et affaiblir indirectement ses adversaires... Ce qui est sûr, c’est que les contacts ne seront repris qu’après la fête du Fitr. D’ici là, l’offensive de Hodeida au Yémen contre les houthis aura peut-être permis aux Saoudiens et à leurs alliés de renforcer leur position dans la région...

En dépit de la remise par le Premier ministre d’une première mouture du gouvernement en gestation au président de la République lundi soir, l’impression générale dans le pays est que Saad Hariri ne semble pas très pressé de former le nouveau gouvernement. D’ailleurs, cette mouture ne comportait pas de noms, rien qu’une première distribution des portefeuilles selon les parts de...

commentaires (4)

comme le disait TRES ironiquement un pro moumanaa : hariri a tous les droits et tte la liberte de proposer son cabinet a aoun 100% libre de ses choix... ET aoun a les memes droits et liberte de rejeter le choix de hariri. l'une des rares prerogatives que taef aurait garde au pres de la republique, forte ou pas . SYMPA HIEN ?

Gaby SIOUFI

10 h 45, le 15 juin 2018

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Commentaires (4)

  • comme le disait TRES ironiquement un pro moumanaa : hariri a tous les droits et tte la liberte de proposer son cabinet a aoun 100% libre de ses choix... ET aoun a les memes droits et liberte de rejeter le choix de hariri. l'une des rares prerogatives que taef aurait garde au pres de la republique, forte ou pas . SYMPA HIEN ?

    Gaby SIOUFI

    10 h 45, le 15 juin 2018

  • Après tout , on exercera notre droit à la patience que les rivaux des mêmes " bord" finissent par s'entendre entre eux .

    FRIK-A-FRAK

    13 h 47, le 14 juin 2018

  • Je ne parle que des ministres chrétiens qui seraient 15 dans un gouvernement de 30 membres. On murmure des rumeurs provenant de notre Erdogan libanais, nouvel élu au Parlement après deux échecs, selon lesquelles 5 ministres seront la part de Fakhamat Michel Aoun, 6 pour le CPL, 2 pour les FL, un pour les Marada et un pour les Kataeb. Le hic principal vient des FL qui réclament 6 sièges sachant car son bloc compte 13 députés + 2 apparentés tandis que le bloc CPL compte 19 + 10 apparentés. Comment Saad Hariri, optimiste comme l'était son père Rafic, va-t-il procéder pour dénouer le noeud gordien ?

    Un Libanais

    10 h 29, le 14 juin 2018

  • " les sources du parti chiite font toutefois remarquer que si on a organisé des élections, c’est bien pour tenir compte de leurs résultats. On ne peut pas faire comme si elles n’avaient pas eu lieu. " C'est qui deja qui a renverse la majorite issue des elections passees?/? Qui a clame haut et fort qu'il ne tiendra pas compte des resultats des elections precedentes??? Cpmment allon-nous nous debarrasse de cette gangrene?

    sancrainte

    02 h 45, le 14 juin 2018

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