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Culture - Exposition

L’extraordinaire saga du canal de Suez

À l’IMA, une scénographie originale fait revivre les personnalités, les anecdotes et les temps forts qui ont ponctué l’histoire de ce lieu symbolique, où se rencontrent trois continents.

Édouard Riou, Eugène Cicéri, « La tribune des souverains ». © Souvenir de Ferdinand de Lesseps et du canal de Suez. Lebas Photographie Paris

À l’Institut du monde arabe (IMA) de Paris, une exposition dédiée au canal de Suez ouvrira ses portes le 28 mars. Le visiteur est d’emblée immergé dans le faste de l’inauguration du canal en 1869 : il fait son entrée sur une scène grandiose au son des trompettes de Aïda, opéra commandé par le khédive Ismaïl à Verdi, pour l’occasion, et un décor recréé par des peintures, des gravures, de vastes écrans animés, et un diorama venu de Port-Saïd. En présence des représentants de toutes les familles royales d’Europe, des envoyés du sultan Abdel Aziz, de l’empereur François-Joseph d’Autriche et de l’impératrice Eugénie, le canal s’ouvre à la circulation, Le Caire est rénové sur le modèle d’une ville européenne : la renaissance de l’Égypte est en marche.

Puis on remonte le temps : l’approche se veut historique et retrace « l’histoire de ce désir de relier les deux mers, devenu réalité, et son impact économique et commercial», comme le précise Zeina Toutounji, en charge de la presse arabe à l’IMA. Objets archéologiques, maquettes, photographies, films d’époque : les pièces présentées sont multiples et illustrent l’évolution de ce passage maritime.

Déjà les pharaons…
C’est le pharaon Sésostris III qui va le premier, 18 siècles avant notre ère, rendre la navigation possible entre la Méditerranée et les mers du Sud. Claude Mollard, commissaire de l’exposition, évoque les pièces archéologiques qui en attestent : « À Karnak, on a une frise représentant Ramsès II avec le canal. Dans l’exposition, on présente une stèle de Darius II où il est inscrit : “J’ai recreusé le canal”. On a retrouvé le tracé de ce canal que le visiteur pourra découvrir à l’IMA. »
Confrontée à la modernité européenne de Bonaparte, l’Égypte connaît une nouvelle dynamique au XIXe siècle sous le règne de Mehmet Ali et ses descendants. Ils modernisent le pays et font venir des experts français, dont Ferdinand de Lesseps, diplomate et aventurier de génie. Soutenu par Saïd Pacha, ce dernier se lance dans l’aventure du canal, qui se poursuit jusqu’en 1869. Des sculptures, des peintures orientalistes, des photographies, des plans et des gravures ressuscitent cette période. « On peut aussi admirer le plan-relief de 1878, qui fait 10m de long sur 1m20 de large, qui représente le canal à ses débuts, au milieu du désert. Cette pièce, qui a été créée pour l’Exposition universelle de 1878, n’a pas été montrée depuis 140 ans, elle a été entièrement restaurée. On peut y voir les maisons d’Ismaïlia, de Port-Saïd et de Suez », précise M. Mollard.

Un symbole politique
L’exposition permet au visiteur de s’évader dans un décor orientalisant et de s’imaginer sur la route des Indes ou de l’Extrême-Orient : « La présentation d’un très beau panorama mobile de 1925 montre un bateau de plaisance dans le canal, on a l’impression qu’il avance », décrit le commissaire de l’exposition. Mais comme le rappelle Zeina Toutounji, « l’exposition fait réfléchir sur toute la dimension symbolique du canal. Sa création a généré des tensions majeures entre Français et Anglais, puis entre Nasser et l’Occident. » Le célèbre discours de Nasser, « Soyez les bienvenus, nous sommes une partie de la nation arabe », est mis en scène de manière cinématographique et fait revivre l’annonce de la nationalisation du Canal à Alexandrie en 1956.
« C’est un message fort pour l’Occident, dont l’Égypte souhaite se démarquer. Dans la foulée, un nouveau rapport de force s’est créé avec le mouvement des non-alignés des pays du Sud, qui veulent reprendre en main leurs pays. » Par la suite, le canal cristallisera le conflit israélo-égyptien, avant la signature d’un traité de paix en 1973.
Claude Mollard souligne l’importance actuelle du canal pour l’un des plus vieux pays du monde : « Symboliquement, il représente pour l’Égypte moderne un avenir de développement économique et urbain. La preuve, le projet récent de construction d’une nouvelle capitale, à mi-chemin entre le Nil et le Canal de Suez, entre Le Caire et Suez. La ville sera trois fois plus grande que Paris. Des ministères ont le projet de s’installer dans un an dans une ville au milieu du désert ! ».
Des images filmées parcourent les 193 km de la mythique voie d’eau et clôturent l’exposition, qui sera ensuite présentée au Musée d’histoire de Marseille puis au nouveau Musée des civilisations du Caire, pour le 150e anniversaire du Canal.


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