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Moyen Orient et Monde - Chine

Trois ans après, que reste-t-il de la révolution des parapluies ?

La police tente de disperser les manifestants pro-démocratie massés près du siège du gouvernement local, en septembre 2014. Aaron Tam/AFP

Trois ans jour pour jour après la fin du mouvement qui avait paralysé Hong Kong en 2014, le bilan est amer pour le camp démocrate. Non seulement les manifestants ne sont pas parvenus à obtenir le suffrage universel, mais ils font face à l'intransigeance des autorités chinoises au quotidien.

L'insurrection de 2014 avait pourtant été particulièrement suivie par la population. Pendant près de trois mois, la cité portuaire connaissait les plus grandes manifestations de son histoire moderne. Soutenues par l'Église locale, près de 100 000 personnes participaient aux rassemblements journaliers. L'objectif ? Forcer la Chine à honorer sa promesse, faite à maintes reprises, mais jamais tenue, de mettre en place le suffrage universel pour les élections législatives et exécutives à Hong Kong. Les manifestants se protégeaient du gaz lacrymogène tiré par les forces de l'ordre à l'aide de parapluies, ce qui finit par donner un surnom au mouvement.

Trois ans plus tard, la Chine renforce toujours plus son emprise sur la péninsule. « Ce que l'on constate à Hong Kong maintenant, c'est une érosion graduelle des garde-fous qui protègent l'État de droit », souligne à L'Orient-Le Jour Nicholas Bequelin, directeur Asie orientale d'Amnesty International à Hong Kong.
L'investiture en juillet dernier de Carrie Lam à la tête de Hong Kong est perçue comme un revers pour les militants. La chef de l'exécutif a été élue alors qu'elle était particulièrement impopulaire dans les sondages d'opinion : elle était devancée de 15 à 20 % par son principal rival. Surtout, elle était la candidate choisie par Pékin.

 

(Pour mémoire : Hong Kong : des militants prodémocratie pourront contester leurs peines de prison)

 

Entrée fracassante
Mais même si le printemps hongkongais n'a pas apporté les fruits espérés, pas moins de 6 partis politiques ont vu le jour au lendemain de la mobilisation. Ils ont tous un point commun : la volonté de prendre de la distance vis-à-vis de la tutelle chinoise. Leur idéologie politique, le localisme, cherche à limiter l'influence économique, culturelle et politique de Pékin sur l'île. Certains prônent l'indépendance de la métropole vis-à-vis de la Chine, d'autres une plus grande autonomie au sein de la République populaire. Les plus radicaux exigent, quant à eux, le retour de l'ordre colonial britannique.

Aux élections législatives de 2016, ces nouveaux partis font une entrée fracassante au Parlement hongkongais. Malgré un scrutin défavorable car semi-démocratique, le camp démocrate décroche 23 sièges et le camp localiste 6 sièges sur 70. « C'est une importante minorité de blocage », précise Jean-Philippe Béja, chercheur au CNRS et à Sciences Po, contacté par L'Orient-Le Jour.

 

(Pour mémoire : Hong Kong : Des milliers de manifestants contre "l'autoritarisme" de Pékin)

 

« Hong Kong n'est pas la Chine »
La pilule est dure à avaler pour la Chine, mais les autorités durcissent le ton pour mettre un terme aux provocations. « Pékin a progressivement renforcé la censure sur la presse, les milieux de l'édition et dans le monde universitaire. L'intimidation des opposants politiques, impensable il y a encore quelques années, est maintenant chose commune », précise M. Bequelin.

À peine élus, deux députés localistes sont disqualifiés, sans avoir jamais pu siéger. Le motif ? Ne pas avoir prêté serment dans les formes. Les deux parlementaires avaient volontairement écorché certains passages de leur discours et s'étaient drapés de bannières proclamant que « Hong Kong n'est pas la Chine ». Pékin récidive en juillet dernier en expulsant les quatre derniers députés localistes du Parlement. Cette fois, la justice pékinoise juge que leurs prestations de serment ne sont pas suffisamment « sincères et solennelles ».

Cette manœuvre politique vise à priver le camp démocrate de son droit de veto. « Les forces favorables à Pékin en profitent pour modifier les règles de fonctionnement de l'Assemblée législative et limiter le temps de parole des députés de l'opposition. Jusqu'aux élections partielles de mars, les démocrates seront donc affaiblis », analyse M. Béja.

Les leaders de la révolution des parapluies ne sont pas en reste, ils subissent également la répression chinoise. En août dernier, ils écopent tous de peines dissuasives : entre 6 et 8 mois de prison. Dépitée mais pas résignée, la jeunesse hongkongaise continue de se mobiliser. Au lendemain du verdict, ils étaient plus de 22 000 manifestants à protester.

« Aujourd'hui, les étudiants hongkongais qui luttent contre Pékin semblent voués à l'échec. Mais ils aiment à souligner que les valeurs qu'ils incarnent sont universelles. C'est bien ce que semble craindre Pékin », explique M. Bequelin.

 

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L'insurrection de 2014 avait pourtant été particulièrement suivie par la population. Pendant...

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