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Liban - Journée mondiale du cœur

Yaduna, centre de référence pour la santé des femmes précarisées

Depuis quatre ans, une structure médico-sociale excelle dans le traitement des maladies cardiaques touchant les femmes.

L’ONG propose une gamme complète de services médicaux spécialisés. Photo Yaduna

Sur le coup de treize heures, Samia* arrive au centre Yaduna pour la santé cardiaque des femmes, situé sur les hauteurs de Baabda, pour sa deuxième consultation. Malgré certains symptômes annonciateurs et un facteur héréditaire négatif, elle a dû attendre l'âge de 45 ans pour se faire diagnostiquer. En cause, les coûts élevés des soins de santé relatifs aux problèmes cardio-vasculaires dans les établissements hospitaliers du pays. « Trois de mes sœurs sont déjà suivies par Yaduna. L'ONG couvre les frais médicaux. Je n'ai dû me soucier de rien », explique Samia, enthousiaste.

Créé en 2013, sous l'impulsion de l'ex-Première dame Wafa' Sleiman, Yaduna a pour objectif de sensibiliser le grand public aux maladies cardio-vasculaires chez la femme ainsi que la prise en charge médicale de bout en bout. Le centre a vu le jour alors qu'une hausse importante de la mortalité cardio-vasculaire était enregistrée parmi les femmes, mais aussi face à l'impossibilité de se soigner pour certaines.

Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), qui a fixé au 29 septembre la Journée mondiale du cœur, le nombre de femmes victimes de maladies cardio-vasculaires est en hausse constante depuis vingt ans, alors qu'une baisse est constatée chez les hommes. Il s'agit en fait de la première cause de mortalité chez la femme. Or « les femmes à cet âge se préoccupent plus du cancer que de leur cœur », déplore Mona Afeiche, vice-présidente de Yaduna. À tort, puisque selon les chiffres de l'OMS également, près de 54 % des décès survenus dans le monde en 2015 étaient dus aux maladies cardio-vasculaires contre 15,6 % dus aux cancers.

En tant que femme, une patiente comme Samia court jusqu'à 50 % de risques supplémentaires par rapport à un homme de souffrir d'une maladie du cœur, avance le Dr Rana Osta, cardiologue. Elle souligne qu'« une femme court jusqu'à trois fois plus de risques de mortalité suite à un problème cardio-vasculaire qu'en développant un cancer du sein ». « Environ 45 % des femmes décèdent des suites de ce type de maladie, un chiffre interpellant », estime-t-elle.

 

Âge minimal fixé à 45 ans
Yaduna profite aux femmes âgées de plus de 45 ans, « car c'est habituellement à ce moment que les problèmes cardio-vasculaires augmentent chez la gent féminine, ceux-ci allant de pair avec la phase de ménopause », explique Rana Osta.

« L'objectif de Yaduna est d'éveiller la femme sur ces risques, insiste pour sa part Mona Afeiche, ancienne ministre d'État. Nous demandons à toutes les femmes de réaliser au minimum un test annuel. Il faut changer les mentalités. L'entourage familial doit jouer un rôle dans ce sens en incitant la femme à réaliser ces examens. »
Environ huit campagnes de sensibilisation sont réalisées chaque mois. Pour étendre son champ d'action, le centre organise régulièrement des circuits en autobus pour acheminer les femmes provenant des régions éloignées. « Cela permet d'offrir un diagnostic fiable à l'ensemble de la population », note Ghada Akiki, coordinatrice du centre. Près de 60 % des patientes ne possèdent pas de couverture médicale. « C'est en cela que le centre se veut bénéfique pour cette frange de la population qui est de facto précarisée médicalement », souligne-t-elle.

Au niveau de l'équipement, le centre fonctionne en autonomie et dispose de l'ensemble du matériel requis pour assurer un suivi médical complet. En ce qui concerne le corps médical, le centre est affilié au Centre médical de l'Université américaine de Beyrouth, à l'Université Saint-Joseph et à l'Hôtel-Dieu. « Les patientes sont soumises à une batterie de tests rigoureux », assure la coordinatrice. « Nous surveillons le taux de calcium dans le sang, le taux de sucre, le cholestérol, la pression sanguine, l'hypertension, etc. », ajoute-t-elle, mettant en garde contre « le tabagisme et l'obésité qui augmentent les risques ».

 

Miser sur la sensibilisation
Alors que la sensibilisation et la prise en charge de la gent masculine montrent des résultats encourageants, le bilan santé cardiaque des femmes est actuellement négligé. Selon Yaduna, la sensibilisation du public féminin à ces maladies est insuffisante, « à l'échelle mondiale ». C'est pourquoi l'ONG organise régulièrement des journées d'action à travers le pays. Des campagnes de prévention se déroulent dans les municipalités, les écoles, les entreprises, les banques, ainsi qu'au sein d'autres ONG. « Il fallait aller à la rencontre des femmes, pour les sensibiliser dans les régions rurales », relate Mme Afeiche. « Au début du coup d'envoi de nos activités en 2013, les premiers dépistages ont montré que près de la moitié des femmes diagnostiquées présentaient des problèmes cardio-vasculaires, alors que la plupart étaient asymptomatiques », rappelle-t-elle. En plus des campagnes régionales, Yaduna organise annuellement une campagne nationale pour toucher le plus grand nombre de femmes.

Les actions de Yaduna semblent d'ores et déjà porter leurs fruits. Mme Akiki explique que « jusqu'à aujourd'hui, nous avons reçu 3 898 femmes et réalisé 7 365 suivis médicaux ». « Nous sommes fiers de ces statistiques », s'enorgueille-t-elle. Pour couvrir ses dépenses, l'ONG organise une fois par an un gala d'honneur. Le prochain en date se déroulera le 3 novembre au Four Seasons.

 

* Le prénom a été changé à la demande de la patiente.

 

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