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Moyen Orient et Monde - Éclairage

L’armée chinoise s’installe aux portes de l’Arabie

En construisant sa première base militaire à Djibouti, Pékin se rapproche du Moyen-Orient.

La marine chinoise recueillant des réfugiés chinois ayant fui les combats au Yémen. Photo Reuters

Djibouti, nouveau repaire des grandes puissances mondiales ? L'idée n'est pas nouvelle puisque le petit État fait déjà office de havre militaire dans le détroit de Bab el-Mandeb.

Dernière installation en date, celle de la première base extraterritoriale chinoise fin juillet, nouvelle voisine de son homologue américaine et dont l'apparition, pourtant préparée, suscite surprise et questionnement. La Chine a dû négocier pendant de longues années avant d'obtenir le feu vert de l'enclave africaine et s'assurer une place de choix dans le décor stratégique et tumultueux de la région, aux portes de la péninsule Arabique. Elle rejoint ainsi le Japon, la France, les États-Unis, mais aussi l'Arabie saoudite, partenaires économiques privilégiés de Pékin, qui possèdent déjà un ancrage militaire à Djibouti et une capacité d'intervention notoire dans la région.

Avec une base logistique navale qui sera dotée, d'ici à 2026, d'un peu moins de 10 000 hommes, la Chine, déjà bien installée en Afrique de l'Est, fait ainsi de Djibouti, en plus d'un port avec lequel commercer, un nouveau terrain de jeu pour son armée. Mais cette implantation inédite interroge sur les intentions du gouvernement de Xi Jinping et ses nouvelles modalités d'action.
« L'installation de la base à Djibouti a beaucoup marqué les experts étrangers alors qu'il s'agit bien plus d'une continuation de la politique chinoise internationale. Cela lui permet de disposer d'une force militaire pour protéger ses propres intérêts mais aussi d'avoir une armée, qui en se mondialisant est capable d'avoir un positionnement à l'international », explique Pierre Picquart, docteur en géopolitique à l'Université Paris VIII et spécialiste de la Chine, interrogé par L'Orient-Le Jour. « C'est aussi la confirmation que, depuis son arrivée au pouvoir, le nouveau secrétaire général du parti, Xi Jinping, cherche à affirmer plus sérieusement la présence militaire chinoise dans le monde », ajoute Jean Philippe Béja, directeur de recherche au CNRS et au Centre de recherches internationales à Paris.

Cette volonté d'affermir son positionnement n'a visiblement rien d'anodin puisqu'elle semble correspondre aux visées économiques chinoises et à l'extension de sa zone d'influence, dans une région stratégique pour ses importations en matières énergétiques. « Cela fait un certain temps que la Chine déploie une politique plus active au Moyen-Orient », observe Jean Philippe Béja. L'enjeu : sécuriser ses approvisionnements mais également accroître ses capacités d'intervention dans une région en proie à l'instabilité. « La Chine se destine à être la future puissance économique mondiale et elle est donc bien obligée de se donner les moyens diplomatiques et militaires de pouvoir éventuellement intervenir en cas de besoin », explique Pierre Picquart.

 

Stratégie équilibriste
Sa nouvelle capacité d'action et ses objectifs correspondent parfaitement à la politique que cherche à mener Xi Jinping dans la région. « C'est une stratégie d'équilibriste, puisqu'il s'agit à la fois de promouvoir la paix, de ne pas se mettre à dos les différents partenaires et en même temps d'engranger des contrats économiques avec les différents pays », explique Pierre Picquart. Pour la Chine, le Moyen-Orient est une véritable poudrière capable de déstabiliser le monde, l'économie mondiale et aller à l'encontre de la croissance chinoise. D'où l'intérêt d'y promouvoir la paix. L'éventualité d'un débordement des conflits qui touchent le Moyen-Orient, notamment au Yémen, n'échappe d'ailleurs pas aux observateurs chinois qui craignent que cela n'affecte la stabilité de leurs échanges avec la région. Il s'agit « de protéger ses intérêts mais aussi peut-être demain de protéger les intérêts de ses partenaires et pourquoi pas intervenir conjointement », explique Pierre Picquart.
Cette politique s'inscrit également dans le cadre du projet économique chinois de nouvelle route de la Soie,

One Belt, One Road, qui concerne notamment le Moyen-Orient. Ce qui, une fois encore, n'est pas vraiment nouveau. « Si on considère que l'Iran et la Turquie font partie du Moyen-Orient, alors la route de la Soie passait naturellement par la Perse et il y avait d'importantes relations à l'époque des Tang, au VIIIe siècle, entre les Persans et les Chinois », observe Jean-Philippe Béja. Le développement de ce projet, au fort potentiel économique, est l'une des idées phares de la politique de Xi Jinping. De quoi accroître la présence militaire chinoise au Moyen-Orient ?

 

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commentaires (3)

Les petits Chinois, un peuple travailleur, discipliné, qui sait planifier son avenir...BRAVO ! Tout comme les Libanais, n'est-ce pas ? Irène Saïd

Irene Said

18 h 44, le 28 août 2017

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • Les petits Chinois, un peuple travailleur, discipliné, qui sait planifier son avenir...BRAVO ! Tout comme les Libanais, n'est-ce pas ? Irène Saïd

    Irene Said

    18 h 44, le 28 août 2017

  • TROP DE PUISSANCES ETRANGERES S,INSTALLENT AUTOUR DE LA POUDRIERE DU MOYEN ORIENT DEJA EN EXPLOSION !

    LA LIBRE EXPRESSION

    17 h 30, le 28 août 2017

  • Depuis une trentaine d'années la stratégie chinoise consiste à se rapprocher de l'Afrique et d'autres pays dans d'autres régions du monde en leur apportant aide logistique, et humanitaire (constructions des infrastructures notamment) ce qui rapprochent forcément les deux côtés, Le reste devient un jeux d'enfant. Alors que la France et l'Europe se désengagent de cette région malgré eux, l'Amérique trop focalisée à nuire à la Russie et de l'empêcher de construire des ponts avec l'Afrique,,,la Chine surprend et fait les choses en grand ! En un an elle arrive à se doter d'une base capable d’accueillir dans les mois à venir plus de 10 000 soldats chinois, Il faut regarder cette implantation chinoise dans une optique géopolitique globale. Elle met ses pions là où cela li semble nécessaire,pour une phase ultérieure. Le nouvel ordre mondial du XXI è siècle se dessine peu à peu !

    Sarkis Serge Tateossian

    16 h 43, le 28 août 2017

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