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Culture - Exposition

Moi, cet autre qui est présent et absent à la fois

Comment le face-à-face avec l'autre peut-il se révéler et réveiller ce qui, dans le Moi, est premier? Moji Ramzi et Paridokht Moshkzad s'interrogent et tentent d'élucider ce mystère à travers leurs œuvres.

« Magic Pissy Bank», de Moji Ramzi.

C'est à l'Université d'art de Téhéran que leurs chemins se croisent pour ne plus se séparer. Moji Ramzi obtient un master en art et animation et Paridokht Moshkzad un BA en peinture et un MA en Advanced Art. Unis dans la vie et dans leur passion pour l'art, les voila, après plusieurs participations à des expositions collectives, réunis à Beyrouth pour une première exposition en solo et avouant que la sculpture a toujours été pour eux une passion.

C'est à travers trois sculptures exposées l'une à la galerie Art Lab et deux autres à la galerie 392 Rmeil393, que Paridokht Moshkzad se penche dans un premier temps sur le mystère de l'Autre, celui qui demeure et qui échappe toujours, interpelle, fait sortir de la solitude et impose un sentiment de responsabilité. Mais quel est cet Autre ? Et comment se passe cette rencontre ? Il est à la fois présence et absence, présence parce que nous avons l'idée de l'autre mais absence parce que nous ne pouvons le saisir. On ne peut le nommer, mais il s'impose puisqu'on ne peut le nier. Et dans un deuxième temps, sur le thème de l'hermaphrodite, nom donné d'une façon générale à tous les êtres dont la nature est double, à la fois masculine et féminine. La légende attribue la naissance d'un garçon, doté d'une grande beauté, à sa mère Aphrodite et à son père Hermès. Adolescent, à 15 ans, il parcourait le monde lorsqu'il est séduit par la limpidité d'un lac au fond duquel vivait une nymphe. Celle-ci succombe à sa beauté, l'attire au fond des eaux, le met à sa merci et l'attache. Désormais, leurs corps ne seront jamais plus séparés. Il forme une troisième personne.

Elle ou lui ?
De ce mythe universel Paridokht Moshkzad dira : « Il est ce conflit qui déchire l'espèce humaine, car chaque être est doté de deux facettes qui peuvent soit vivre en harmonie, soit se défier et se mesurer dans un combat acharné à la recherche de leur véritable identité. ». Grâce à une technique propre à elle, l'artiste tricote la maille de métal récupérée des poulaillers, la superpose en une multitude de couches, pour enfin la sculpter et lui donner forme. Suspendu au plafond, un bébé se balance. Quoi de plus innocent que cet être qui flotte dans l'air, libre de choisir sa voie mais qui, pour l'artiste, n'échappera pas au dilemme du choix. Tantôt féminin, tantôt masculin, souvent heureux et parfois en colère face à la souffrance du monde en perspective. Cette sculpture fait partie d'une série de plusieurs œuvres restées dans le pays natal.

« Ce mythe de la création et du dualisme des êtres, ajoute Moji Ramzi, a traversé toutes les civilisations de l'Inde en Chine, des grecs à l'islam en passant par le zoroastrisme, première religion monothéiste. Zoroastre prêchait un dualisme reposant sur la bataille entre le bien et le mal, la lumière et les ténèbres, dualisme présent dans l'islam chiite duodécimain. » Le principe de Zoroastre est qu'il existe un esprit saint et un esprit mauvais, opposés car représentant le jour et la nuit, la vie et la mort. Ces deux esprits ont toujours coexisté dans chacun des êtres vivants. Pour l'artiste, les humains sont comme les oiseaux quand ils migrent, comment délimiter leurs frontières ? Ils appartiennent tous au monde. Mais l'homme se verra enfermé dans un cadre social, religieux, ou politique, ce qui n'en finira pas de l'éloigner de l'Autre.

Le règne animal en formes et en couleurs
Moji Ramzi affectionne le règne animal. Les bêtes jouent un rôle primordial dans son processus créatif et sont les acteurs de son théâtre artistique. D'abord le taureau qui se décline sur les planches en bois sculpté d'une façon spontanée et intuitive, à l'acrylique sur un support en canevas ou en sculptures suggestives et souvent ludiques.

« Le taureau, dit-il, pour son caractère mythologique, est en Iran un symbole très présent. La légende de Mythra, le dieu né d'une pierre, raconte le rite sacrificiel d'un taureau qu'il avait réussi à dompter et a ramené sur ses épaules. Arrivé dans la grotte, un corbeau envoyé par le Soleil lui annonce qu'il devra faire un sacrifice, et le dieu, soumettant le taureau, lui enfonce le couteau dans le flanc. De la colonne vertébrale du taureau sort du blé et de son sang coule du vin. Sa semence, recueillie par la Lune, produit des animaux utiles aux hommes. Souvent reproduit avec une boucle d'oreille, il renvoie au principe de l'esclavage et de l'homme privé de sa liberté et soumis aux règles sociales.

Ces deux artistes, issus d'un pays où la liberté reste encore un concept, étonnent et séduisent par leur libre pensée et leur travail engagé.

 

* ARTLAB et 392Rmeil393
Moji Ramzi et Paridokht Moshkzad.
Jusqu'au 29 juillet 2017

C'est à l'Université d'art de Téhéran que leurs chemins se croisent pour ne plus se séparer. Moji Ramzi obtient un master en art et animation et Paridokht Moshkzad un BA en peinture et un MA en Advanced Art. Unis dans la vie et dans leur passion pour l'art, les voila, après plusieurs participations à des expositions collectives, réunis à Beyrouth pour une première exposition en solo et...

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