Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Éclairage

Les conservateurs iraniens misent sur l’unité pour battre Rohani

Ebrahim Raisi est le favori pour prendre la tête du clan conservateur, mais sa capacité à réunir les différentes tendances au sein de son camp est mise en question.

Ebrahim Raisi, l’un des cinq candidats favoris du Front populaire des forces de la révolution islamique pour représenter les conservateurs à l’élection présidentielle à Qom (Iran), en avril 2016. Handout/Reuters

Les conservateurs peuvent-ils encore espérer s'imposer à l'élection présidentielle iranienne ? Le 19 mai prochain, le président de la République islamique d'Iran, Hassan Rohani, remettra son poste en jeu, après un mandat de quatre ans. Depuis la révolution islamique de 1979, tous les présidents sortants ont été réélus pour un second mandat. Les chances de l'opposition conservatrice sont d'autant plus maigres que le clan des réformateurs est soudé autour de M. Rohani.

Pour éviter une nouvelle débâcle comparable à celle de 2013, les principalistes (ou conservateurs) se sont prêtés cette fois-ci au jeu de l'élection primaire. L'objectif étant d'éviter la multiplication des candidatures, qui avait eu pour effet de disperser les votes au cours de la dernière élection. Les ultraconservateurs se sont réunis au sein du Front populaire des forces de la révolution islamique dès décembre 2016. Jeudi 6 avril, ils sont parvenus à sélectionner cinq personnalités pour, in fine, choisir leur candidat dans les prochaines semaines.

Parmi les favoris, Ebrahim Raisi. L'homme « adoubé » par l'ayatollah Khamenei est à la tête de la puissante fondation de charité Astan Quds Razavi, gardienne du mausolée de l'imam Reza, haut lieu du tourisme chiite à Mashaad, ville du nord-est de l'Iran et fief natal de Ebrahim Raisi. La popularité de ce dernier est quelque peu en berne. « Son manque de générosité malgré sa fortune, puisque seuls 10 % de celle-ci sont reversés aux plus nécessiteux, ne joue pas en sa faveur », souligne Amélie-Myriam Chelly, membre associée au CNRS et spécialiste de l'Iran. Son entourage ultrarigoriste a également un effet repoussoir sur une partie de l'électorat. « Il n'est pas du tout apprécié de la population plutôt traditionnelle de Mashaad. Il est peu probable qu'il soit soutenu dans une ville sécularisée comme Téhéran », ajoute Amélie-Myriam Chelly.

Le maire de Téhéran, Mohammad Bagher Ghalibaf, fait aussi partie des personnalités sélectionnées bien qu'il ait laissé entendre qu'il ne se présenterait pas, conscient de son impopularité suite à sa gestion de l'incendie ayant causé la mort de seize pompiers dans la capitale en janvier dernier. Parviz Fattah, le dirigeant d'une fondation de bienfaisance, Alireza Zakani et Mehrdad Barzpash, deux députés conservateurs ayant vivement critiqué l'accord sur le programme nucléaire conclu entre Téhéran et les grandes puissances occidentales en 2015, sont les trois autres personnalités élues mais peu connues de la population.

Ebrahim Raisi reste le grand favori, mais le ralliement du clan des conservateurs autour de lui n'est pas encore acté. « Les conservateurs sont dans un tel désarroi que même le processus de la primaire est peu susceptible de les unir autour d'un seul candidat, qui est la seule façon de constituer une menace sérieuse pour le président Rohani », note Ali Vaez, analyste senior sur l'Iran à l'International Crisis Group (ICG).

 

« Fissures profondes »
Cette sélection intervient alors même que certains conservateurs ont annoncé concourir à la présidence sans passer par l'élection primaire. Hamid Baghaie, l'ancien adjoint de l'ex-président conservateur Mahmoud Ahmadinejad, a annoncé sa candidature. Ce dernier, à défaut de se porter candidat après que l'ayatollah Khamenei eut avoué craindre une « bipolarisation de la société » s'il se présentait, soutient avec ferveur son ancien adjoint. Emprisonné durant sept mois pour une affaire de corruption, Hamid Baghaie risque néanmoins de voir sa candidature invalidée par le Conseil des gardiens de la Constitution. Composé de six juristes et six religieux, ce conseil a un droit de regard sur « l'exemplarité » des candidats à l'élection présidentielle et peut refuser une candidature.

La myriade de partis dont est composée la coalition des conservateurs ne peut que difficilement faire émerger des consensus. « Les fissures dans le camp conservateur sont profondes et peuvent justifier les candidatures indépendantes », souligne Ali Vaez. L'ancien ministre de la Culture et de l'Orientation islamique entre 1993 et 1997, Mostapha Mirsalem, ou encore l'ancien négociateur en chef sur le dossier nucléaire sous Ahmadinejad qui avait terminé troisième à l'élection présidentielle de 2013, Saïd Jalili, ne retireront probablement pas leur candidature.

« Il est ironique que les conservateurs qui ont la mainmise sur les principaux leviers du pouvoir en Iran manquent d'un homme d'État qui puisse unir leur camp et mobiliser leur base », souligne Ali Vaez. À ce stade, les candidatures peuvent encore affluer, leur enregistrement s'effectuant du 11 au 15 avril 2017. Le nombre de candidats est donc déterminant pour les principalistes qui risquent une nouvelle fois de voir les votes de leurs sympathisants dispersés, laissant la voie libre aux réformateurs réunis autour de Hassan Rohani.

 

Pour mémoire

Hassan Khomeyni évincé : les conservateurs ont préféré ne prendre « aucun risque »

Rohani critique l'emprise des conservateurs sur l'organisme supervisant les élections

Les conservateurs peuvent-ils encore espérer s'imposer à l'élection présidentielle iranienne ? Le 19 mai prochain, le président de la République islamique d'Iran, Hassan Rohani, remettra son poste en jeu, après un mandat de quatre ans. Depuis la révolution islamique de 1979, tous les présidents sortants ont été réélus pour un second mandat. Les chances de l'opposition conservatrice...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut