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Moyen Orient et Monde - Éclairage

Le Hamas rédige son acte de renaissance

Le mouvement de la résistance islamique prépare la publication officielle d'une nouvelle charte, un moyen de dédiaboliser son image et d'assumer une nouvelle stratégie vis-à-vis de l'État hébreu.

Des Palestiniens célèbrent le 29e anniversaire du mouvement Hamas, à Rafah, dans le sud de Gaza, le 16 décembre 2016. Ibraheem Abu Mustafa/Reuters

L'heure de l'aggiornamento politique du Hamas a sonné. Après trente années ponctuées de déclarations sans lendemain, le Hamas est fin prêt à officialiser son renouveau idéologique. Dans l'optique de dédiaboliser son image et d'améliorer ses relations avec les grandes puissances, le Mouvement de la résistance islamique prépare la publication officielle d'une nouvelle charte. Symbole de tous les fantasmes, la charte originelle avait été « rédigée par un jeune cadre du parti, dans l'urgence » de la première intifada, note Leila Seurat, chercheuse associée au CERI (Centre de recherches internationales), interrogée par L'Orient-Le Jour. Publié le 18 août 1988, ce document a rapidement contribué à la diabolisation du groupe par Israël, tant il recèle de rhétorique antisémite et jihadiste.

La nouvelle charte, actuellement en cours de rédaction, devrait être promulguée fin mars-début avril, après l'élection du successeur de Khaled Mechaal à la tête du bureau politique. Cette feuille de route annonce clairement les changements de stratégie du parti, puisque le Hamas a décidé d'instaurer un dialogue avec les Occidentaux et de reconnaître officiellement les frontières de 1967. Suite à la guerre des Six-Jours du 5 au 10 juin 1967, la Cisjordanie, la bande de Gaza et Jérusalem-Est étaient tombées sous le joug de l'État hébreu. En acceptant un État palestinien composé uniquement de ces trois territoires, le Hamas renoncerait définitivement à la Palestine historique qui s'étend du Jourdain jusqu'à la mer et à laquelle il était « illicite (de) renoncer en tout ou en partie », selon le onzième article de la charte de 1988.

Le compromis sur les frontières n'ira toutefois pas plus loin. Sans contester l'existence d'Israël sur les terres palestiniennes, le Hamas se défend de reconnaître l'État hébreu. L'ambiguïté laisse poindre une contradiction, consistant à s'accommoder de l'État hébreu sans le reconnaître. Il s'agit davantage d'« un compromis avec les buts politiques du Hamas » que d'un antagonisme, analyse Björn Brenner, chercheur et auteur de Gaza Under Hamas: From Islamic Democracy to Islamist Governance (2017).

 

« Garder le pouvoir à Gaza »
La reconnaissance des frontières de 1967 était un préalable nécessaire pour officialiser le dialogue avec les puissances internationales. Depuis sa victoire aux élections législatives de janvier 2006 à Gaza, le parti essaye de « se convertir en interlocuteur légitime, notamment auprès des puissances occidentales », souligne Leila Seurat. En adéquation avec cet objectif, la nouvelle charte implique « la reconnaissance des résolutions 242 (relative au retrait des forces armées israéliennes de(s) territoires et à la reconnaissance de la souveraineté de l'intégrité territoriale), 338 (appelant à des négociations pour une paix juste et durable au Moyen-Orient) et possiblement 2334 de décembre 2016 (exigeant l'arrêt immédiat des activités de peuplement dans le territoire palestinien occupé) », ajoute la chercheuse. Un moyen d'adoucir le ton belliqueux du treizième article de la charte de 1988, postulant « qu'il n'y aura de solution à la cause palestinienne que par le jihad », et de devenir un acteur politique de compromis.

La charte permet au parti de s'inscrire dans une vision de long terme. « Le Hamas veut incarner l'alternative politique la plus pertinente dans la politique palestinienne et garder le pouvoir à Gaza », résume Björn Brenner. Prendre de la distance avec les Frères musulmans dont il émane idéologiquement ou encore afficher son unité idéologique (dont son adversaire politique, le Fateh, manque cruellement) sont des gages de longévité sur la scène politique palestinienne, contrebalançant les difficultés du Hamas à assurer aux Gazaouis leurs besoins élémentaires.

 

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