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Lifestyle - Rencontre

Marie-Christine Saragosse, un supplément dame

Mental de fer et énergie solaire, Marie-Christine Saragosse* affirme un féminisme décomplexé à la tête de France Médias Monde, dont elle est le PDG depuis 2012.

Marie-Christine Saragosse, présidente de France Médias Monde, était l’invitée de la May Chidiac Foundation dans le cadre de la conférence « Women on the Front Line ». Photo DR

Le trio blazer, chemise blanche sur pantalon noir qu'elle porte ce jour-là correspond parfaitement à une autre elle : la corporate woman qui hisse sa silhouette sur des stilettos vernis pour honorer ses fonctions de PDG chez France Médias Monde. Autre elle, car on l'imaginerait sans peine, aussi, en capitaine vif-argent cornaquant un terrain de sport emboué. De fait, même si l'entretien est trop court pour qu'on approfondisse cette impression, quelque chose nous dit qu'il y a du sportif chez Marie-Christine Saragosse, de la persévérance et de la gagne, des appétences pour le challenge, un gène tonique aussi. Elle le confirme d'emblée, grignotant son stress sur une cigarette électronique qu'elle cherche dans les fatras de son fourre-tout : « Le management, je l'ai appris sur un terrain de handball. J'en suis convaincue ! »

Le regard vert olive cadre bien serré et écarquille son rimmel en antennes qui enregistrent tout ce qui les entoure. On y palpe l'énergie de celles qui ne se compliquent pas l'existence. Le courage de celles qui ne craignent pas les crawls en eaux troubles. L'assurance de celles qui font des choix, tranchent, trébuchent pour mieux se relever. Et surtout, on sent l'idéalisme, un rien suranné et qui ne baisse pas les bras, quand elle déclare : « L'avenir appartient à ceux qui rêvent. »

 

Itinéraire pas linéaire
D'entrée de jeu, celle qui s'était d'abord orientée vers Sciences Po pour du journalisme dit : « Je sais mieux répondre aux questions que les poser, c'est sans doute pourquoi je n'ai finalement pas été journaliste. » Effectivement, les réponses sont claires et nettes, nul évitement ou effet de manche, de la malice par moments, mais aucune malfaisance, les mains montées de bagues rocheuses scandent le propos, de la franchise pas feinte : il n'y a ici rien que de très naturel. Tel est son itinéraire, moins linéaire qu'il n'y paraît.
Marie-Christine Saragosse pousse à Cannes, s'essaye à la danse, est capitaine d'équipe de handball. Quant au monde des médias, elle en évoque son premier contact de la sorte : « Enfant, j'assistais à la mutation de Cannes à l'occasion du festival ou du Marché international des programmes. Ça fourmillait de stars et de presse, c'était le summum du glamour. Sauf qu'à l'époque, ma vocation initiale était celle de danseuse ! »

Le déclic se produit à l'ENA, lorsque l'étudiante d'alors rencontre Michèle Cotta qui était venue participer à un séminaire. « J'ai vu en cette journaliste un modèle de femme drôle, libre et cultivée. Je me suis dit : tiens, voilà un chemin inspirant ! » se souvient la patronne de France Médias Monde. Et de poursuivre, avec le sourire en bandoulière des choyés de la vie à la sueur de leur front : « En plus, à l'époque, le ministère de la Culture recrutait directement à partir de l'ENA. C'était sans doute un signe du destin. »
À la sortie de l'ENA, le secteur public s'arrache la jeune énarque qui démarrera sa carrière au ministère de la Communication, puis au sein du cabinet du ministre délégué à la Francophonie, où elle est chargée de l'action audiovisuelle extérieure de la France, mission qu'elle poursuivra au ministère des Affaires étrangères.

 

(Pour mémoire : Deux Libanaises dans les coulisses du groupe France Médias Monde)

 

Méritocratie
Cet avant-après pourrait être la simple histoire d'un virage rêvé et réussi, de la découverte d'un territoire de prédilection. L'équation s'avère plus compliquée que cela. Saragosse nuance donc : « Au début de ma carrière, il arrivait qu'on ne m'écoute pas pendant des réunions. Quelques minutes plus tard, lorsqu'un homme répétait la même phrase, tout d'un coup, tout le monde se retournait. » Sauf que la jeune femme a un côté croqueuse de vie à belles dents, dopée à l'adrénaline, du genre à se propulser dans le vide sans besoin de parachute. Chez TV5 qu'elle rejoint en 1997 à la demande de son PDG, dont elle claque la porte et où elle est rappelée en mai 2008 à la direction générale de TV5 Monde, Marie-Christine Saragosse se révèle être une femme-tronc qui empoigne la cause de la gent féminine en se battant surtout pour les parités à l'antenne, avec ténacité et intelligence vertébrées. « Venant de province, n'ayant pas les bons filons à Paris, ça n'a pas été évident pour moi. Mais j'ai réussi grâce à quelque chose de fantastique qu'on appelle la méritocratie. Je crois foncièrement en l'école de la République et je dois tout à mes parents qui m'ont inculqué ce culte de l'enseignement », confie-t-elle.

 

Soldat entêté
En 2012, elle est élue PDG de France Médias Monde, groupe qui rassemble la chaîne d'information France 24 et les radios RFI et Monte-Carlo Doualiya. Depuis, la patronne fait office de femme-ancre d'un navire auquel elle veut donner un supplément d'âme. Explications : « Sans oublier ce qu'il y a de bon dans l'héritage, l'expression de mon temps m'exaspère. Je dois sans doute suivre les pas de ma mère, enseignante, qui était toujours dans le camp de ses élèves. » Elle poursuit : « La presse est un quatrième pouvoir vital qui réinvente des repères dans cet environnement précaire. Après, comme tout autre outil, il peut être employé à bon ou mauvais escient. Je préfère extraire le meilleur du numérique vers lequel on glisse, le conquérir. »
Bien que la prétendue dame de fer n'ait aucune parenté avec les Cruella des médias, forte de son bon sens à volets ouverts, il ne faut pas croire pour autant que Marie-Christine Saragosse soit une rebelle, ou encore moins une réac. Avec son énergie qui bouillonne, sa jovialité qui tambourine, elle raconte : « Avec l'émission "Pas 2 quartier" diffusée sur France 24, nous ouvrons notre rédaction à des enfants de ce qu'on appelle quartiers difficiles. Une manière de rendre notre outil médiatique utile. »

Chose à laquelle celle qui a été promue au grade d'officier de l'ordre du Mérite s'essaie quotidiennement en brave petit soldat entêté. Et le désespoir dans lequel sombre le monde ? lui demande-t-on pour terminer. Cela ne l'inhibe en rien. Au contraire : « La joie engendre la victoire », répond-elle.

*Marie-Christine Saragosse était invitée à intervenir dans le cadre de la conférence « Women on the Front Line » organisée par la May Chidiac Foundation, à Beyrouth, le lundi 6 mars 2017.

 

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