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Moyen Orient et Monde - Diplomatie

Les Émirats arabes unis s’installent dans la Corne de l’Afrique

Abou Dhabi veut devenir à long terme un acteur militaire incontournable.

Un convoi militaire émirati revenant du Yémen. WAM/AFP

La « Petite Sparte » installe ses troupes sur le continent noir. Une seconde base militaire des Émirats arabes unis va bientôt s'implanter dans la Corne de l'Afrique. Après l'Érythrée l'an dernier, c'est le Somaliland qui a accepté dimanche dernier d'accueillir des troupes émiraties sur son territoire, dans le port de Berbera.

La proximité immédiate du Yémen fait de la Corne de l'Afrique une implantation stratégique à court terme. Les Émirats y sont engagés depuis début 2015, en particulier dans la lutte contre el-Qaëda, qui profite du conflit entre le pouvoir soutenu par l'Arabie saoudite et les rebelles houthis, aidés par l'Iran, pour accroître son influence. La base d'Assab, en Érythrée, accueille actuellement des avions de combat utilisés par les Émiratis dans le conflit yéménite.

Les bases d'Assab et Berbera ont également un intérêt à long terme. Les pays arabes du Golfe mènent dans la Corne de l'Afrique une guerre d'influence face à leur rival iranien. Un combat que la République islamique est en train de perdre. Djibouti a coupé ses liens avec Téhéran à cause de son soutien aux houthis, tandis que l'Érythrée, ancien appui des rebelles, a changé de camp dans le conflit yéménite après une visite de son président Issayas Afewerki à Riyad en avril 2015. Le Soudan a également fait le même choix il y a un an.

L'implantation d'une base militaire correspond à la dernière phase d'une stratégie d'influence dans la région entamée il y a une dizaine d'années. Ressources naturelles, aide au développement, tourisme : les investissements émiratis sont multiples et diversifiés. Les Émirats cherchent à protéger leurs intérêts maritimes dans le golfe d'Aden et la mer Rouge, situés en bordure de la Corne de l'Afrique. La sécurisation de leurs eaux, actuellement frappées par la piraterie somalienne, permettrait un développement encore plus important du commerce maritime. Le détroit de Bab el-Mandeb, entre le Yémen et Djibouti, est un point stratégique du commerce maritime international. Les opportunités économiques sont très fortes avec l'Autorité intergouvernementale pour le développement, une zone de libre-échange incluant huit pays est-africains dont Djibouti, le Soudan, la Somalie et surtout l'Éthiopie, deuxième pays le plus peuplé du continent.

La concurrence pour l'influence militaire dans la Corne de l'Afrique est toutefois rude : alors que la France est traditionnellement installée à Djibouti, qui accueille également la seule implantation américaine permanente sur le continent, deux bases chinoise et saoudienne devraient y ouvrir prochainement. La Turquie est quant à elle présente en Somalie. Si les Émiratis devaient initialement s'installer également à Djibouti, un incident diplomatique a nui aux relations entre les deux pays en mars 2015. Les autorités de Djibouti avaient protesté contre l'atterrissage sans autorisation d'un avion émirati sur leur territoire.

 

Soutien sécuritaire
Pour les pays de la région, les opportunités économiques et sécuritaires apportées par les Émirats arabes unis sont multiples. Ils combattent d'ores et déjà le groupe terroriste somalien al-Shebab. En 2013, des observateurs des Nations unies avaient rapporté que ces derniers étaient approvisionnés en armes par l'Iran via la golfe d'Aden. La présence militaire accrue des Émiratis permettra de lutter contre ces trafics et de sécuriser la région.

La République autoproclamée du Somaliland, qui a déclaré son indépendance de la Somalie en 2011, mais n'est actuellement pas reconnue par la communauté internationale, cherche à affirmer son indépendance à travers l'accueil des militaires émiratis. « Accepter une base militaire étrangère fait partie de leur stratégie pour obtenir une légitimité internationale, et de se montrer comme une nation indépendante, capable de faire sa propre politique extérieure », explique Martin Plaut, chercheur à l'Université de Londres. En pratique, la Somalie, fragmentée et instable, est incapable d'empêcher l'installation de cette base. « Ils vont entraîner nos soldats. Ils vont également nous aider à défendre notre littoral, afin de protéger nos ressources marines. De plus, cela aidera à améliorer notre prospérité économique. Aujourd'hui, notre pays ne peut pas se permettre de nombreux projets de développement d'infrastructures parce qu'il est pauvre », a affirmé le ministre de l'Information du Somaliland, Osman Abdillahi Sahar, samedi 11 février.

Les Émirats cherchent aujourd'hui à s'imposer comme une puissance militaire incontournable dans la Corne de l'Afrique, tout comme au Moyen-Orient. Malgré leur petit territoire, ils ont été en 2015 le troisième plus important importateur mondial de matériel de défense, et ils tentent actuellement d'étendre en particulier les capacités de leur marine. Ce n'est pas pour rien que l'actuel secrétaire américain à la défense James Mattis avait affublé les Émirats du surnom de « Petite Sparte » en 2014, en référence à la cité antique grecque dotée d'une formidable puissance militaire au regard de sa taille.

 

Pour mémoire

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