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Culture - Photographie

Une odyssée automnale

Les photos de Yann Dumoget à la galerie Alice Mogabgab* évoquent non pas le long voyage du héros Ulysse, mais celui de centaines de migrants qui ont un jour pris le large.

L'artiste voyageur qui s'intéresse à un monde globalisé et numérisé s'amuse à tâter de toutes les techniques dans le but d'une mise à distance poétique d'une réalité sociale souvent cruelle. Comme une peau de tambour, sa photo est une résonance de tous les échos de la planète. Plus que jamais, son odyssée au goût doux-amer témoigne d'une manière colorée et stylisée du plus gros et triste phénomène humain qui a lieu en pleine Mare Nostrum.

Qui ?
Après une licence en histoire de l'art à l'Université Paul Valéry de Montpellier obtenue en 1993, Yann Dumoget s'inscrit en arts plastiques en 1999 en réalisant la performance de peindre une toile par jour pendant un an, soit 366 toiles pour l'an 2000 qui feront l'objet d'une première exposition. Il s'installe par la suite à Berlin et connaît un franc succès à l'occasion de la 11e Documenta de Kassel. En 2004, il revient vivre en France et en 2008 entame un tour du monde de deux ans qui l'emmène dans une trentaine de pays. Il participera en 2011 à l'exposition Ailleurs à l'Espace culturel Louis Vuitton à Paris et c'est à cette époque que son travail se diversifie et prend différentes allures.

Que ? Quoi ?
Dans les paysages photographiques de Yann Dumoget, de minuscules embarcations-coques de noix glissent sur l'eau calme d'un bassin. Ces coques hissent leurs mâts rouge, jaune et vert dans un cadre aux teintes automnales. Tout est calme, lent, presque figé. La violence et la laideur n'ont pas de place dans cette œuvre où le temps a suspendu son vol. Et pourtant ! Tout n'est pas si beau que ça, tente d'expliquer l'artiste par sa démarche très poétique. Ces coques si belles et si ludiques qui rappellent l'innocence de l'enfance ne sont en fait que les répliques du Radeau de la Méduse.

Comment ?
En octobre 2015, Yann Dumoget est invité à participer à une campagne de sensibilisation sur le sort des migrants. « La première pensée qui me vint fut pour ces frêles esquifs chargés à ras bord de personnes terrorisées qui bravaient la tempête sur l'immensité de la mer, pour ces coquilles capables de couler d'une minute à l'autre dans l'indifférence totale, dit l'artiste dans sa note d'intention. Par une association d'idées, poursuit-il, je pensais au Calais de mon enfance, non de la jungle éponyme où de pauvres hères pataugent dans la boue (plus maintenant !) en rêvant au radeau de fortune qui changerait leur vie, mais celui de l'époque insouciante où mon grand-père m'apprenait comment transformer les noix en embarcations. » Aujourd'hui, l'imaginaire prend la place de l'imagination, et l'aigreur de la vie celle de la tendre innocence. Les coques de noix demeurent le symbole de l'enfance mais celui d'une enfance immolée. En pleine Méditerranée.

*Galerie Alice Mogabgab, Achrafieh, secteur Sassine, jusqu'au 26 novembre.

L'artiste voyageur qui s'intéresse à un monde globalisé et numérisé s'amuse à tâter de toutes les techniques dans le but d'une mise à distance poétique d'une réalité sociale souvent cruelle. Comme une peau de tambour, sa photo est une résonance de tous les échos de la planète. Plus que jamais, son odyssée au goût doux-amer témoigne d'une manière colorée et stylisée...

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