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Liban - La situation

Des facteurs internes et régionaux gèlent le compromis Frangié

Le chef des Marada a reçu samedi à Bnechii la chef de Délégation de l’UE au Liban, Christina Lassen. Photo Ani

Le compromis interne en vue, dont l'une des clauses est le consensus autour de la candidature du député Sleiman Frangié à la présidence de la République, est gelé depuis vendredi dernier.

L'une des raisons directes de ce gel est l'abstention des Kataëb d'y répondre favorablement : devant servir de couverture chrétienne au compromis en question, le parti a soumis son accord éventuel à la condition que M. Frangié s'engage au préalable à respecter une liste de principes qu'il lui a soumise par écrit. Le refus des Kataëb a été subtilement enrobé de conditions quasi impossibles pour Sleiman Frangié, qui continue de se définir comme « un candidat consensuel du 8 Mars ».
Dès lundi dernier, à la suite de la rencontre du chef du courant du Futur, Saad Hariri, avec Samy Gemayel à Paris, le refus des Kataëb se faisait déjà sentir, contrairement aux informations ayant pu être rapportées, à Beyrouth, aux parties parrainant ce compromis, notamment le député Walid Joumblatt. Des sources informées qui ont suivi de près les concertations en cours à Paris avaient laissé entendre à L'Orient-Le Jour qu'il n'était « pas sûr que les Kataëb avalisent le compromis ».
Pris de court par la position du député Samy Gemayel, le député Walid Joumblatt a reporté l'annonce du retrait de la candidature du député Henry Hélou en faveur de Sleiman Frangié. Le Rassemblement démocratique, qui s'est réuni samedi, attendrait les contacts de « dernière minute » en faveur du compromis. De son côté, Saad Hariri s'est entretenu samedi par téléphone avec M. Frangié.

Mais le refus chrétien s'érige désormais en bloc face à la candidature de M. Frangié. L'échange acidulé entre le député Walid Joumblatt et le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, samedi sur Twitter, en est révélateur. C'est dans ce contexte que l'ancien ministre Salim Sayegh s'est rendu samedi à Maarab avec le membre du bureau politique des Kataëb, Albert Kostanian. Il a annoncé que « notre parti n'a aucun complexe quant à la personne des candidats, mais s'attache au programme politique proposé ».
Une source du parti précise à L'OLJ que les Kataëb attendent des « garanties internationales qui empêcheraient Sleiman Frangié d'être un président au service du Hezbollah et de l'axe dont il relève ».
Des garanties que le compromis ne semble pas près de fournir, contrairement à certaines assurances émanant de certains milieux du Futur à Beyrouth. Il pourrait même inclure un tiers de blocage. Quoi qu'il en soit, une conviction règne, chez les indépendants notamment, renforcée par de tristes précédents : le 8 Mars ne respecte pas ses engagements et rien ne peut garantir qu'il le fasse désormais. D'autres milieux du 14 Mars s'interrogent en outre sur l'avantage de concéder la présidence du Conseil des ministres au 14 Mars, lorsque les deux autres présidences, pourvues d'un mandat fixe, sont confiées au 8 Mars.


(Lire aussi : Les Kataëb campent sur leur position de principe : « Pour un président garant de la souveraineté et de l'indépendance »)


Ces réticences sont corroborées par la versatilité du terrain syrien : il serait fort risqué d'anticiper sur le jeu d'influence en Syrie en élisant, d'ores et déjà, un candidat qui assume son appartenance au camp iranien.
En revanche, les cadres du Futur favorables au compromis estiment que la relance des institutions au Liban est possible et surtout cruciale, à l'heure où l'intérêt étranger porté au pays s'amenuise et la solution en Syrie s'ébauche. « Si le compromis ne passe pas aujourd'hui, l'immobilisme institutionnel est parti pour durer longtemps », affirme une source du Futur à L'OLJ. C'est dans cet esprit que la députée Bahia Hariri a défendu samedi la perspective d'un compromis. Recevant samedi, à la Maison du Centre, des notables de Beyrouth, la députée de Saïda a déclaré que « le leader est celui qui innove des solutions, non celui qui entraîne les gens dans des guerres ».
Elle a rappelé « l'historique du président Saad Hariri qui, depuis l'assassinat du président Rafic Hariri, a fait de nombreux compromis importants dans l'intérêt du Liban ».

Il semble pourtant que les divergences autour de la solution envisagée par Saad Hariri se soient exacerbées en Arabie saoudite, notamment entre le roi et le prince héritier.
Le résultat en est un tiraillement au sein du Futur, manifeste dans le discours de Ahmad Hariri, samedi, à Tripoli.
Selon des informations recueillies par L'OLJ, le ministre de la Justice Achraf Rifi, le seul de son camp à avoir mené une campagne ouverte et constante contre la candidature de Sleiman Frangié, aurait eu un entretien téléphonique tendu, samedi soir, avec le chef du courant du Futur, Saad Hariri. Le ministre aurait même menacé de démissionner de son ministère et de sortir des rangs. D'autres personnalités sunnites non affiliées au Futur ont également exprimé leur rejet ferme de la candidature de Sleiman Frangié, comme l'ancien député de Tripoli Misbah Ahdab, qui s'est adressé samedi à Saad Hariri en ces termes lapidaires : « La dignité des sunnites n'est pas entre vos mains pour que vous en disposiez. »

En Arabie, le débat se serait orienté vers un refus de la candidature de Sleiman Frangié, apprend-on de sources concordantes. Ce refus serait motivé par le conflit ouvert qui a brusquement émergé entre la Russie et la Turquie. Il pourrait aussi être lié à certaines informations, émanant de Washington, selon lesquelles le lobby iranien, qui avait œuvré pour l'accord sur le nucléaire, tenterait à l'heure actuelle un forcing intérieur libanais en faveur d'un président libanais qui soit l'allié de l'axe irano-syrien : les votes du Hezbollah seraient gardés secrets jusqu'à la dernière minute. En arguant, auprès de la Maison-Blanche, du rôle qu'un président libanais « ami » de Téhéran pourrait jouer dans la stabilisation de la situation, ce lobby entendrait convaincre ses interlocuteurs de laisser faire ce forcing.

C'est ce qui pourrait expliquer la teneur du discours du Hezbollah depuis l'annonce dans les médias de la rencontre Hariri-Frangié à Paris : appuyer « l'ouverture » et le principe du compromis, sans pour autant se prononcer sur la candidature de Sleiman Frangié, ni renoncer à celle du député Michel Aoun. Ce dernier aurait d'ailleurs refusé catégoriquement de discuter de la candidature de Sleiman Frangié avec le chargé d'affaires américain, Richard Jones, lors de la dernière visite de ce dernier à Rabieh.
Ce mutisme, qui a pour effet de jeter la balle du compromis dans le camp du Futur, a freiné l'élan de certaines parties saoudiennes et libanaises qui avaient été, dans un premier temps, réceptives à la candidature de Sleiman Frangié. S'il ne bénéficie pas directement au parti chiite, ce mutisme aura fortement affaibli le 14 Mars. Pour une figure centriste, « en cas d'échec du compromis, Saad Hariri se doit de déclarer que l'heure n'est plus aux candidats forts, mais aux indépendants. Sans quoi, il accorderait au 8 Mars le droit de réclamer un nouveau Taëf »...

 

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Le compromis interne en vue, dont l'une des clauses est le consensus autour de la candidature du député Sleiman Frangié à la présidence de la République, est gelé depuis vendredi dernier.
L'une des raisons directes de ce gel est l'abstention des Kataëb d'y répondre favorablement : devant servir de couverture chrétienne au compromis en question, le parti a soumis son accord éventuel...

commentaires (8)

Alors comment sauver notre Liban?

PPZZ58

19 h 52, le 30 novembre 2015

Tous les commentaires

Commentaires (8)

  • Alors comment sauver notre Liban?

    PPZZ58

    19 h 52, le 30 novembre 2015

  • Apres Emile Lahoud le syrien, vous allez elire Sleiman Frangieh un autre Syrien???? Pauvre Liban.....

    IMB a SPO

    19 h 31, le 30 novembre 2015

  • KÉNÉT MAZHA YIA CHABEB...

    LA LIBRE EXPRESSION

    17 h 39, le 30 novembre 2015

  • Tout candidat à la Présidence de la République qui ne s'engagerait pas à respecter la Déclaration de Baabda est à écarter d'office. Aucun agent de l'étranger ne doit accéder au poste de Chef de la Nation libanaise, libre et indépendante. Le temps des collabos est à jamais révolu depuis 2005. C'est clair, net et précis !

    Un Libanais

    15 h 27, le 30 novembre 2015

  • Je ne comprends pas une candidature du 8 ou du 14 Mars qui soit consensuelle! Comment peut elle l’être puisque les deux idéologies sont aux antipodes l'une de l'autres! Les uns sont souverainistes et les autres sont assujettis les uns au Fakih, les autres a Bachar, encore d'autre a l'Egypte ou a l'Iraq et Dieu sait encore a qui d'autres! Comment donc peut on prétendre être d'un camp mais consensuel a un moment cruciale de l'histoire du pays? C'est triste de voir que certains politiciens prennent vraiment les Libanais pour des imbéciles! Triste...

    Pierre Hadjigeorgiou

    14 h 53, le 30 novembre 2015

  • 11heures 28: "Frangié réaffirme son soutien à M. Aoun" Et c'est une telle girouette que certains inconscients proposent comme Président du Liban ??? L'avez-vous déjà entendu parler...??? Combien ont-ils touché pour cela...quels avantages personnels recevraient-ils ??? Quelle tragi-comédie...pour ne pas employer d'autres mots... Irène Saïd

    Irene Said

    12 h 12, le 30 novembre 2015

  • Mais pourquoi continuer de miser sur ces personnes appartenant au 8 et 14 mars etc., qui n'ont jamais rien apporté de positif à leur pays, qui ne savent pas ce que "patrie" veut dire, étant toutes vendues à leurs divers commanditaires à l'extérieur et donc dépendantes de leur volonté. Avec eux nous n'aurons jamais un Liban fort, souverain, libre et indépendant ! Irène Saïd

    Irene Said

    09 h 29, le 30 novembre 2015

  • "candidat consensuel du 8 mars" est un oxymore. On ne peut pas être président de la République "libanaise" et, en même temps, soutenir le Hezbollah iranien et le gouvernement syrien!

    Yves Prevost

    07 h 04, le 30 novembre 2015

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