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Le Liban en 2015 - Politique

Le Hezbollah, désormais un acteur régional

Archives AFP

2015 a certainement été une grande année pour le Hezbollah. Non seulement en raison des succès enregistrés dans le cadre de sa participation aux combats en Syrie, et de l'expérience militaire qu'il y a acquise, mais surtout à cause du fait qu'il est désormais reconnu comme un acteur régional. Pourtant, les pronostics des responsables du 14 Mars le disaient affaibli, d'une part parce que, selon eux, il souffrirait d'une véritable hémorragie humaine à cause de la guerre en Syrie, et d'autre part parce qu'avec la signature de l'accord sur le nucléaire entre l'Iran et la communauté internationale, son rôle devrait forcément se réduire. Dans l'optique de ceux qui défendaient cette théorie, l'Iran, qui a obtenu une reconnaissance de son rôle de la part de l'Occident à travers l'accord sur le nucléaire, devrait faire des concessions en contrepartie, sur le plan régional, et en particulier au Liban. Ces analystes ont même été jusqu'à voir dans l'offensive saoudienne au Yémen contre Ansarullah (les houthis, accusés d'être appuyés par l'Iran) la première concrétisation du déclin supposé de l'influence iranienne dans le monde arabe, suite à l'accord sur le nucléaire.


Inutile de s'étendre sur le désastre que constitue l'offensive saoudienne contre le Yémen, sur le plan humanitaire et sur le plan militaire, pour les protégés des Saoudiens, notamment le président démissionnaire, au mandat expiré, Abed Rabbo Mansour Hadi. Ce qui est sûr, c'est que le groupe Ansarullah ne cache plus son alliance, au moins idéologique, avec le Hezbollah au Liban, qui lui offre en tout cas un grand soutien médiatique et des conseils techniques. En Irak, l'implication du Hezbollah est aussi palpable, aux côtés des forces dites de « la mobilisation populaire » (en grande partie chiites), sur le plan de la formation et des conseils techniques, sans oublier le soutien médiatique et politique au gouvernement qui lutte contre Daech.


Mais c'est surtout en Syrie que le rôle du Hezbollah est devenu déterminant. Ce qui n'était au milieu des années 1980 qu'un petit noyau de jeunes résistants soucieux de libérer le Liban-Sud et la Békaa-Ouest de l'occupation israélienne est devenu une formation structurée, surarmée, avec des troupes d'élite, des stratèges et une grande capacité de mobilisation populaire. Aujourd'hui, certains experts militaires disent même que le Hezbollah se bat désormais aux côtés de l'armée russe et des armées régionales comme celles de l'Iran, de l'Irak et de la Syrie, en territoire syrien. Ses tactiques sont souvent celles qui sont retenues en raison de sa capacité à imaginer des plans qui surprennent l'ennemi, de sa grande mobilité et de son efficacité dans les combats urbains et dans les opérations de résistance. Il fait donc partie d'une salle militaire d'opérations commune aux côtés des grands généraux russes, iraniens, syriens et irakiens, et c'est souvent sur lui que comptent ces armées pour mener les opérations délicates, comme par exemple la récupération en plein territoire contrôlé par l'opposition syrienne du pilote russe tombé, avec son avion, dans le rif de Lattaquié. Des experts militaires disent même que c'est au Hezbollah qu'on doit le changement dans la tactique de l'armée syrienne, qui se contentait auparavant d'avancer en milieu urbain avec ses blindés avant d'être stoppée par les missiles antichars. Désormais, cette armée préfère prendre les collines stratégiques et encercler les combattants pour les pousser à se rendre...


Tout au long de cette année, le Hezbollah s'est donc imposé comme un acteur militaire régional essentiel, puisqu'après l'assassinat de Samir el-Kantar, il a réussi à faire vivre les Israéliens, dirigeants, militaires et population, dans l'inquiétude de la riposte. Tous les médias israéliens ne parlent, ces derniers jours, que des deux discours du secrétaire général du Hezbollah dans lesquels il annonce une opération de représailles imminente.


Le Hezbollah a aussi réussi à s'imposer sur le plan politique interne. Lui que l'on disait trop occupé à se battre aux côtés de grandes armées en Syrie a montré qu'il n'était pas question pour lui de renoncer à ses alliances internes, notamment avec le général Michel Aoun, sous n'importe quel prétexte ou en contrepartie de n'importe quel appât. La fameuse entente signée en février 2006 est plus solide que jamais, et le Hezbollah s'est imposé comme un acteur interne incontournable. Sans son accord, il ne peut y avoir d'élection présidentielle... ni de nouveau Premier ministre. Le gel de la récente « option Frangié » en est la meilleure preuve. Pour certains, cette ascension du Hezbollah ne peut qu'être suivie par une chute car il est devenu trop grand pour le Liban et il dérange désormais beaucoup de pays dans la région. Sa grande responsabilité en 2016 sera donc justement de savoir utiliser sa force à bon escient, et surtout dans l'intérêt du Liban.

 

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