La chorale à l’œuvre.
Tandis que le Christ prêchait à Sidon, la Vierge l'attendait à Maghdouché, dans une grotte sise sur les hauteurs de la cité. Sans doute Marie était-elle angoissée ; elle savait qui était son fils et les dangers qui le guettaient. Mais toutes les mères font l'expérience de cette peur, toutes ont le cœur transi lorsqu'elles songent à leur enfant. C'est un sentiment unique, particulier, illogique et merveilleux, qui peut également donner un courage surhumain. Alors que les hommes fuyaient, Marie, elle, invincible, bravant tous les risques, attendait encore son fils, et le gardait.
Les mères de Saïda n'ont pas changé depuis le temps de la Révélation. Elles espèrent toujours le bonheur et la réussite de leurs enfants. Durant deux semaines, en août, ces derniers ont pu fréquenter les colonies de Maghdouché et de Lebaa. En association avec l'évêque de Saïda, Mgr Elie Haddad, la fondation Sacy mettait deux écoles à la disposition des familles de la région. Le temps est souvent long sous ce soleil dont parle l'Ecclésiaste. Il l'est encore plus quand on a dix ans et que nos parents n'ont pas les moyens de nous offrir des vacances. Les colonies voulaient corriger une injustice et transmettre une espérance. Leur succès fut total.
SOS chrétiens d'Orient
Fondée en 2013 après la chute de Maaloula (Syrie), l'association française « SOS Chrétiens d'Orient » avait dépêché sur place une dizaine de volontaires. Leur rôle ? Donner un supplément d'âme et certaine exigence aux activités proposées aux enfants. La fondation Sacy, qui, attachée à l'équilibre entre les communautés du pays, défend notamment la présence des résidents au Liban-Sud – d'où elle est originaire –, avait fait appel à eux. Cours de français, d'arts plastiques et de bricolage occupaient ainsi les matinées de jeunes gens chaque jour plus nombreux à se presser entre les murs des établissements.
On cherche les signes ; parfois, il faut les provoquer. La mission française est venue témoigner du lien indéfectible qui unit l'Orient et l'Occident. Elle avait lieu au moment où, de par la volonté de Mgr Barbarin, archevêque de Lyon, les cloches des églises de France sonnaient pour le Liban. L'amitié peut se dire sur le papier ; la prouver nécessite d'agir ; à son échelle, avec ses moyens, par définition limités, « SOS Chrétiens d'Orient » a tenté de la faire vivre pleinement.
Les chiffres sont éloquents : alors qu'une quarantaine d'enfants étaient attendus à Lebaa et autant à Maghdouché, les deux colonies ont accueilli respectivement 102 enfants. Épaulés par une équipe de professeurs et d'animateurs du cru, les volontaires leur ont appris des chansons traditionnelles françaises, des poèmes baroques, l'art de l'origami. Ils les ont fait dessiner sur des thèmes bibliques, pastoraux, bucoliques, paysagers. Pendant dix jours, Ronsard a côtoyé Noé, Moïse a adoubé saint Georges, la conjugaison a été agrafée. Une fillette à qui on demandait « Pourquoi faut-il obéir à la volonté de Dieu ? » répondait cette chose simple et superbe : « Parce que je l'aime ». Des matches de football, de basket et, pour les plus petits, des jeux, ont récompensé les efforts fournis en classe. Une visite au couvent du Saint-Sauveur, à Joun, a couronné le tout, au même titre qu'une sortie à la piscine.
Consolider les liens intercommunautaires
Finalement, tandis que l'Assomption approchait, les enfants ont donné un spectacle devant leurs parents. En présence de Mgr Élie Haddad, du Père Jihad, de Nicole et Antoine Sacy, les 300 enfants de Saïda ont chanté et dansé, ont aussi montré leurs créations et ri en français. Des larmes ont coulé ; des invitations ont fusé ; les volontaires comptaient-ils revenir au Liban ? Ce n'est pas sans douleur que nous avons entendu ces mots : « Vous allez nous manquer. » Les enfants nous manqueront, eux aussi. Certes, par moments, nous bénévoles, aurions aimé mieux connaître l'arabe afin d'imposer le silence. L'envie de bien faire affrontait le désir d'amusement, propre à la période et au genre. Le but fut atteint, cependant. Les enfants ont compris que, pour citer Gibran, « le travail est l'amour rendu visible ».
Un travail remarquable des organisateurs, accompagnés des bénévoles de la région et de SOS Chrétiens d'Orient, a contribué à ce formidable succès, pour l'épanouissement des enfants et le bonheur des parents.
D'autres rendez-vous sont prévus avec la fondation Sacy, qui continue son engagement de soutien pour la région du Sud et lance un nouveau projet (Nikolaï) avec l'objectif de renforcer l'éducation, de consolider les liens intercommunautaires, et de promouvoir les initiatives économiques.
Et pour finir, cette citation de Mère Teresa : « Nous réalisons que ce que nous accomplissons n'est qu'une goutte dans l'océan. Mais si cette goutte n'existait pas dans l'océan, elle manquerait ».