Deux soldats turcs ont été tués hier lorsqu’une mine télécommandée a explosé au passage de leur convoi dans la province de Sirnak, frontalière avec la Syrie et l’Irak. En outre, un soldat en faction devant une garnison militaire a été mortellement touché par un tir de lance-roquettes près de la ville de Silopi, dans la même province. Stringer/AFP
L'Union européenne et les États-Unis ont appelé hier la Turquie à s'en tenir à une « réponse appropriée » dans ses attaques aériennes contre la rébellion kurde du PKK, pointant leur inquiétude sur l'ampleur des raids aériens turcs qui entretiennent le cycle de représailles et pourraient tuer des civils.
Dans un communiqué publié à Bruxelles, le commissaire européen à l'Élargissement, Johannes Hahn, s'est dit « très préoccupé » par l'escalade de la violence. « L'UE reconnaît que la Turquie a le droit de prévenir et de réagir à toute forme de terrorisme, qui doit être condamné sans ambiguïté », a affirmé M. Hahn dans un communiqué publié après un entretien avec le ministre turc aux Affaires européennes Volkan Bozkir. Avant d'ajouter : « La réponse doit toutefois être proportionnée, ciblée, et elle ne doit en aucun cas mettre en danger le dialogue politique démocratique dans le pays. »
De Washington, le porte-parole du département d'État, Mark Toner, a envoyé le même message. « Nous voulons que le PKK renonce à la violence et reprenne les discussions avant le gouvernement turc (...), et nous voulons voir le gouvernement turc répondre de manière proportionnée » aux attaques, a-t-il dit à des journalistes.
La Turquie a lancé le 24 juillet une « guerre contre le terrorisme » visant simultanément le PKK et les combattants du groupe État islamique (EI) dans le nord de la Syrie. Mais jusqu'à présent les raids ont visé en très grande majorité la rébellion kurde, ces violences mettant un terme à près de trois années d'accalmie et un fragile processus de paix. Au moins trois soldats turcs ont trouvé la mort hier matin dans une nouvelle attaque contre un convoi militaire attribuée au PKK, alors qu'Ankara poursuit ses bombardements massifs contre les bases de la guérilla du nord de l'Irak.
Les opérations de sabotage contre des objectifs économiques se multiplient en Turquie parallèlement aux attaques de la guérilla contre les forces de l'ordre. Hier, une explosion a endommagé un gazoduc entre l'Azerbaïdjan et l'est de la Turquie, et l'acheminement de gaz a dû être suspendu.
Parallèlement à la reprise des hostilités entre l'armée et la rébellion kurde, la Turquie est empêtrée dans une crise politique depuis les législatives de juin qui ont privé le parti islamo-conservateur de la majorité absolue au Parlement et anéanti les plans du président Recep Tayyip Erdogan.
Stratégie du chaos
Cette contre-performance inattendue du parti de la Justice et du Développement (AKP) permet largement d'expliquer l'engagement d'Ankara dans un nouveau cycle de violences avec la guérilla kurde, à en croire l'opposition et certains médias.
M. Erdogan, resté de facto le chef de l'AKP, aurait ainsi choisi la « stratégie du chaos » pour préparer un nouveau scrutin qui effacerait les résultats du précédent grâce à un réflexe légitimiste de l'électorat.
« En privant l'AKP de sa majorité absolue, les élections du 7 juin empêchent M. Erdogan d'être à la tête d'un régime de type présidentiel et l'empêchent encore plus d'inscrire un tel régime dans la Constitution », notait hier l'analyste politique Murat Yetkin dans les colonnes du journal Hurriyet. Il s'agirait aussi d'empêcher à tout prix qu'un autre parti ne mette son nez dans les archives de certains ministères après 13 ans d'un règne sans partage de l'AKP marqué par l'affairisme.
L'AKP a entamé le 13 juillet des pourparlers avec le parti social-démocrate CHP, deuxième force du Parlement, pour former un gouvernement de coalition. Ces discussions doivent être bouclées avant le 23 août, date à laquelle M. Erdogan reprendra la main en cas d'échec. Après trois semaines de tractations, le dirigeant du CHP, Kemal Kiliçdaroglu, a publiquement accusé M. Erdogan d'agir en coulisses pour les faire capoter.
Considéré avec le Parti démocratique du peuple (HDP) comme le grand vainqueur du scrutin de juin, le jeune leader prokurde Selahhatin Demirtas est par ailleurs devenu la bête noire du pouvoir. Visé depuis peu par une enquête judiciaire pour « incitation à la violence » et « troubles à l'ordre public », M. Demirtas assure que le pouvoir cherche désormais à interdire son parti afin de l'éliminer de la scène politique. Mais il n'est pas certain que la stratégie du président turc fonctionne : plusieurs sondages, publiés par la presse d'opposition, soulignent une stabilité de l'électorat. L'un d'entre eux a même placé le HDP à 15 % des intentions de vote tandis que l'AKP passait sous les 40 %.
(Source : AFP)
LE SULTAN..JOUE SON : QUITTE OU DOUBLE !!!
12 h 01, le 05 août 2015