Colombie : des hauts responsables militaires accusés d'exécutions de civils (ONG)

Plusieurs hauts responsables militaires colombiens ont été impliqués dans des exécutions extra-judiciaires "généralisées et systématiques" de civils entre 2002 et 2008, dans le cadre du conflit armé qui déchire le pays depuis les années 1960, a affirmé mercredi l'ONG Human Rights Watch (HRW).

Dans un rapport de 105 pages, l'organisation de défense des droits de l'homme dont le siège est à New York fournit des preuves selon lesquelles "de nombreux généraux et colonels" étaient au courant de ces cas de civils que les forces armées faisaient apparaître comme des guérilleros morts au combat. Cet artifice permettait à l'armée colombienne de présenter les décès comme des succès dans sa lutte contre la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) et d'attribuer des primes et promotions à certains hauts responsables militaires.

Deux généraux parmi les plus importants du pays sont pointés du doigt dans ce rapport : Juan Pablo Rodriguez, actuel chef des forces militaires, et Jaime Lasprilla, commandant de l'armée. Les deux hommes ont dirigé des brigades au sein desquelles au moins 76 exécutions extra-judiciaires présumées ont été recensées par HRW, qui s'est fondé sur les données de la justice colombienne, des entretiens avec des témoins, des procureurs, des proches de victimes et des avocats. "Il y a de plus en plus de preuves que de hauts responsables de l'armée seraient responsables de ces faits atroces", a déclaré José Miguel Vivanco, directeur exécutif de HRW Amériques, lors d'une conférence de presse à Bogota. Mais ces responsables "ont réussi à éviter l'action de la justice et se sont même hissés aux plus hauts niveau du commandement militaire", a-t-il ajouté.

Selon HRW, la justice colombienne enquête sur au moins 3.000 de ces cas. Si des centaines de simples soldats ont déjà été condamnés, seuls quelques colonels l'ont été jusqu'à présent, et aucun général. "Les procureurs font face à des obstacles importants les empêchant d'avancer sur ces cas, comme des représailles contre des témoins-clés et l'absence de coopération des autorités militaires", a assuré José Miguel Vivanco, précisant qu'il y a "probablement des centaines" de ces cas devant la justice militaire, "où l'impunité est pratiquement garantie".