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Liban - Le commentaire

Les chrétiens appelés à faire leur autocritique

Les leaders chrétiens et plus particulièrement les maronites d'entre eux seraient en train de commettre une très grande faute s'ils devaient jouer la carte du nombre avec leur partenaire musulman ou entrer en compétition entre eux-mêmes au sujet des prérogatives présidentielles ou des « qualités » que devrait avoir le futur chef d'État.
Nul n'est besoin de rappeler que l'importance des chrétiens n'a jamais été mesurée à leur nombre, mais plutôt à leur rôle, surtout qu'ils ont été pionniers en éducation et en culture, s'imposant également dans le domaine des affaires et le monde de l'économie. Dans le même esprit, force est de constater qu'ils n'auront plus un rôle important même si leur nombre devait substantiellement augmenter, alors que celui-ci continue de baisser en valeur et en efficacité.
Voici quelques-unes des questions fondamentales que l'on est en droit de se poser aujourd'hui.
Les chrétiens veulent-ils plus de députés pour atteindre une véritable parité, plus d'emplois au sein de l'État, plus de pouvoir accordé au chef de l'État, ou bien veulent-ils assurer, avec leurs partenaires, une nation libre, souveraine, indépendante, une entité définitive et une stabilité continue consolidée par une neutralité absolue ?
Veulent-ils par ailleurs une représentation équitable au sein du Parlement qui ne peut être obtenue que si chaque communauté élit ses propres députés ? Ne préfèrent-ils pas que l'ensemble des parlementaires puissent incarner une représentation politique et nationale issue d'un électorat mixte de sorte à faire prévaloir la modération et la prise de conscience, et à gagner la réputation de député de la nation ?
Veulent-ils enfin incarner le principe du partenariat sincère et constructif, ou bien celui d'une relation conflictuelle qui ne peut que conduire le pays vers l'éclatement et la division ?
Le choix à faire est également entre un Liban monochrome ou pluraliste, entre des leaders rationnels ou aventuristes, entre la parité qui peut aller jusqu'à la partition et un patriotisme chéri et partagé de tous, dans une nation qu'ils défendraient d'un même élan refusant d'inviter les conflits des axes sur leur propre territoire.
Les chrétiens devront également trancher et décider s'ils veulent un Liban qui continue de stagner dans une situation anormale sans constitution, sans justice et en l'absence d'un État, chaque communauté s'érigeant en parti politique et en mini-État, et le tout conduisant droit à un chaos total.
Ou préférer au contraire, opter pour un pays uni pratiquant un régime pluraliste et consensuel qui constitue un filet de sécurité pour tous ses citoyens et un bouclier qui protège des risques venant de l'extérieur.
Il faudra également savoir s'ils veulent une coalition des minorités, ou une alliance entre les modérés brandie comme un choix de vie pour contrer les extrémismes.
À l'instar de n'importe quel pays, l'indépendance et la souveraineté du Liban sont conditionnées par son unité qui doit être couplée à la faculté de communiquer.
Sans la communication, le pluralisme ne peut plus être source de richesse, mais un prélude au conflit civil.
« N'avons-nous donc pas réalisé l'impossibilité de fonder un État en présence de deux armées dont l'une lui est affectée et l'autre, dépendant d'un autre parti voire d'une force régionale qui échappe à son pouvoir ? » s'interrogeait, il y a un an Samir Frangié.
La réalité est que le poids des chrétiens ne se mesure ni à leur nombre ni par le biais de la parité, encore moins par des amendements constitutionnels visant à renforcer les prérogatives du président. D'autant qu'à travers l'histoire, certains présidents dits forts ont fini par devenir faibles parce qu'ils ignoraient les équilibres internes délicats. Aujourd'hui, la « force » est devenue la condition sine qua non pour l'élection d'un président, une condition qui a achevé de plonger le pays dans une vacance totale en paralysant ses institutions et en menant à une déstabilisation globale. Le prétexte étant qu'un président « fort » ne saurait parvenir à la première magistrature que par le biais d'une élection directe par le peuple. Or, force est de constater que le peuple pourrait s'avérer encore moins conscient que les députés dès lors qu'il est mû par des sentiments confessionnels et partisans. L'autre problème est le risque de voir cette révolution constitutionnelle ouvrir la voie à d'autres pour aboutir à des revendications qui iraient jusqu'à la demande de la rotation des trois principales communautés à ce poste, mais aussi à d'autres postes, tels que les présidences du Parlement et du Conseil.

Les leaders chrétiens et plus particulièrement les maronites d'entre eux seraient en train de commettre une très grande faute s'ils devaient jouer la carte du nombre avec leur partenaire musulman ou entrer en compétition entre eux-mêmes au sujet des prérogatives présidentielles ou des « qualités » que devrait avoir le futur chef d'État.Nul n'est besoin de rappeler que l'importance...

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