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Culture - Livre

La poésie incantatoire d’Adonis à Jérusalem

Adonis, le poète et le mage du monde arabe, s’adresse à une ville mythique : Jérusalem. En rimes, strophes, musicalité et images, l’auteur de « Célébrations » offre aux lecteurs ce vibrant « Concerto al-Kods »* (Dar al-Saki, 108 pages). À travers des mots-diamants, en un arabe ciselé de main d’orfèvre, incantation, prière, chant d’amour et hymne à la plus sainte des villes...

Adonis, toujours engagé pour la cause arabe ne peut parler comme le commun des mortels.

Plusieurs fois nommé sur les listes «nobelisables», plusieurs fois nommé «docteur honoris causa» (entre autres à l’AUB), prix Jules Janin en 2005, auteur de plus de 40 opus entre poésie et essais sur la culture, Adonis, né en 1930 à Quassabiné, près de Lattaquieh, au nord de la Syrie, entre sa vie à Beyrouth, Paris et Genève, n’en a pas moins son cœur et son esprit au plus profond du monde arabe. Monde auquel il est viscéralement lié, auquel il appartient
fondamentalement.
Mais aussi il y a cet amour, cet attachement, cette blessure qui ne se cautérise jamais et qui s’appelle Jérusalem. Jérusalem, ville trois fois sainte où convergent les regards des peuples des trois religions monothéistes (chrétiens, musulmans et juifs) de la planète terre.
Jérusalem, ville autrefois repère, est aujourd’hui ville de dissension, de discorde, de démantèlement, d’interdit, de non-entente, de séparation, de barrières infranchissables, de sophismes creux, de diatribes interminables, de palabres politiques, de regards obliques... Mais une ville unique, céleste, où «la mort s’attarde et où la vie n’offre que d’autres morts...». Écoutez les premiers mots du poète :
«Haut, haut,
Regardez-la pendre au cou du ciel
Regardez-la protégée par les cils des anges.»
Pour l’auteur de Commencement du corps fin de l’océan, dans cet opus au souffle de «quassida», porté à la fois par un «gazal» fou et un chant sacré, il y a sans nul doute les yeux d’Oumrou’el-Quays, que sa plume invoque et porte à témoin de l’histoire...
Il y a cette plainte aux pieds des ruines, mais pour une résurrection éclatante, car Jérusalem, depuis la période protocananéenne jusqu’aux dérives israéliennes, en passant par l’Empire romain, l’Empire byzantin, les croisades et la dictature ottomane, en a vu de toutes les couleurs, a bravé toutes les tempêtes et frayé avec toutes les folies mégalomanes et expansionnistes des hommes.... Mais de la hauteur des monts de Judée et de ses remparts, elle demeure une ville inaliénable, un point de mire, une forteresse inexpugnable. Elle a odeur et essence de sainteté.
Du fil qui relie un chameau à un char blindé, de la biblique pomme d’Ève à la grenade des combattants, le poète accumule, en un art consommé des associations verbales, des images où se télescopent et s’enchevêtrent présent et passé. Pour la transhumance des sociétés et des êtres, funeste et incontournable mouvance humaine, on s’accorde pour des valeurs éternelles, qu’on voudrait intouchables.
Un poète comme Adonis, toujours engagé pour la cause et le monde arabe, ne peut parler d’al-Kods comme le commun des mortels.
D’abord ce flux d’images où étoiles, soleil, ciel et ouragans sont les cordes en houle pour un concerto éruptif, mêlant avec un étincelant sens de la formule, notions politiques, historiques et religieuses. Pour cette vision poétique d’une ville, citadelle imprenable, les prophètes et les martyrs jouxtent avec Nietzche et Joyce. Les rues et les ruelles sont chargées des clameurs et du vacarme d’une histoire jamais en paix.
Adonis, preux et fervent chevalier du «chiir», lui qui a toujours su parler de l’injustice, des dictatures, de la guerre et de la misère, a ici, plus que jamais, le ton véhément des psaumes qui en appellent à Dieu et aux consciences vives. Son «vibrato», pour emprunter au lexique musical sa terminologie, est des plus puissants, des plus amples, à la fois sforzando et dolce, Te Deum et célébrations, mugissements des cordes et chant des anges...
Dans une langue arabe d’une divine splendeur, prestige immortel d’une civilisation incomparable, Adonis fait appel, en musicien et expert des vocables, aux battements du cœur. Il revisite Jérusalem en pèlerin pieux et lucide, mais doublé d’un amoureux transi.
Les derniers mots du recueil? Entre autres :
«L’instinct est un paradis couronné par les balles...
La mort s’amoncelle... la mort s’enfante...
Une étoile sur un cheval traverse une arcade
Elle porte une poupée qui s’appelle politique...
Que faire d’une langue qui refuse d’avouer autre que l’automne ?
Et toi géhenne, en quel ciel as-tu élu domicile?
De quel ciel tombes-tu?»

*« Concerto al-Kods » d’Adonis, 103 pages, Dar al-Saqi, en vente à la librairie al-Bourj.
Plusieurs fois nommé sur les listes «nobelisables», plusieurs fois nommé «docteur honoris causa» (entre autres à l’AUB), prix Jules Janin en 2005, auteur de plus de 40 opus entre poésie et essais sur la culture, Adonis, né en 1930 à Quassabiné, près de Lattaquieh, au nord de la Syrie, entre sa vie à Beyrouth, Paris et Genève, n’en a pas moins son cœur et son esprit au plus...

commentaires (1)

Dommage qu'il soit PRO-assadiot.... mais il Changera !

Antoine-Serge KARAMAOUN

19 h 54, le 14 novembre 2012

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Commentaires (1)

  • Dommage qu'il soit PRO-assadiot.... mais il Changera !

    Antoine-Serge KARAMAOUN

    19 h 54, le 14 novembre 2012

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