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Économie - Éclairage

Les marchés sont-ils coupables de la chute des gouvernements en zone euro ?

La pression des marchés est jugée à la fois dangereuse pour la démocratie et légitime compte tenu de l’incurie de certains dirigeants.
La crise de la dette en zone euro a donné un rôle prépondérant aux marchés accusés d’avoir eu la peau de plusieurs gouvernements, une pression jugée à la fois dangereuse pour la démocratie et légitime compte tenu de l’incurie de certains dirigeants.
Après le Premier ministre grec Georges Papandréou, le chef de l’exécutif italien Silvio Berlusconi a annoncé son départ, pris à la gorge par une situation financière incontrôlée et un déficit de confiance des marchés.
Mise sous tutelle, diktat, déni de démocratie, les marchés sont le coupable désigné pour certains, au point d’être accusés de faire et défaire les gouvernements en lieu et place des électeurs.
Cette remise en cause du jeu démocratique est notamment relevée par une partie de la presse italienne qui soulignait jeudi que la démission de Silvio Berlusconi est d’abord le fait des « bulldozers des marchés ».
Plusieurs économistes relativisent toutefois l’impact des investisseurs sur les gouvernements.
« Si on veut soustraire les États au pouvoir des marchés, il faut arrêter de s’endetter. Ce pouvoir, on leur a donné en s’endettant massivement », explique Gunther Capelle-Blancard, professeur d’économie à l’université Paris 1.
Et les pays endettés sont nombreux à avoir vu leur gouvernement déstabilisé, comme le Portugal ou l’Irlande. Même la France, notée triple A, voit le thème de la dette occuper une grande place dans le débat politique.
« Ce n’est pas que les marchés prennent de l’influence, c’est qu’on ne leur répond pas », juge Philippe Dessertine, professeur d’économie à l’Institut de haute finance.
La meilleure preuve que les marchés ne jouent pas toujours contre les pays est à chercher du côté des États-Unis, de l’Allemagne ou du Royaume-Uni, qui se financent tous à bon compte, certes pour des raisons différentes.
« On peut même dire que le marché leur redonne du pouvoir. En leur demandant des taux aussi bas pour prêter à ces pays, il leur donne une marge de manœuvre importante », explique Philippe Brossard, économiste chez Macrorama.
Les marchés créanciers ne feraient donc que cibler les pays à risque et mal gérés, pointant du doigt le problème bien réel et non résolu de la dette, de peur de ne pas être remboursés.
Du coup, « les marchés sont suspendus aux annonces politiques », rappelle M. Capelle-Blancard, alors que la désignation de gouvernements de transition, de coalition ou technocratiques semble un peu apaiser la situation en Grèce et en Italie, parce qu’ils sont considérés comme les seuls à même de mettre en œuvre les mesures que les marchés jugent indispensables pour sortir de la crise.
Pourtant, « il y a quand même un souci. On ne voit plus très bien quelle est la légitimité de ces nouveaux gouvernements. Ce sera leur problème d’ailleurs », vis-à-vis des peuples, explique René Defossez, stratégiste obligataire chez Natixis.
Certains pays sont d’autant plus malmenés qu’ils ne bénéficient pas du parapluie européen, ce qui met en lumière une autre carence soulevée par les marchés, celle de la construction inachevée de l’Europe.
La chute des gouvernements devient alors « un symptôme assez inquiétant qui illustre un des problèmes principaux de la zone euro, d’être un montage un peu kafkaïen », prévient M. Defossez.
L’Europe, par le biais de réunions au sommet ou de la Banque centrale européenne (BCE), n’a pas convaincu les marchés qu’elle était prête à se donner les moyens de ses ambitions, via par exemple plus de fédéralisme, pour combler le déficit démocratique des pays.
Du fait de ce manque de réponses européenne et nationales, le risque pour certains est de mettre en danger le fonctionnement démocratique.
« C’est la démocratie qui doit se ressaisir. Le déni de crise, c’est tragique pour la démocratie parce que ça va faire un décalage comme dans les années 1930 entre les gouvernements et la population qui va accuser les marchés », prévient M. Dessertine.
             ©AFP
La crise de la dette en zone euro a donné un rôle prépondérant aux marchés accusés d’avoir eu la peau de plusieurs gouvernements, une pression jugée à la fois dangereuse pour la démocratie et légitime compte tenu de l’incurie de certains dirigeants.Après le Premier ministre grec Georges Papandréou, le chef de l’exécutif italien Silvio Berlusconi a annoncé son départ, pris à...

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