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Liban - Conflit

L'hôtel mythique Saint-Georges rêve de sa gloire d'antan

Ravagé durant la guerre, l'hôtel est toujours désert et paraît effacé à l'ombre des gratte-ciel qui ont poussé ces dernières années.

L'hôtel est aujourd'hui cerné par une marina et un nouveau projet immobilier construit sur un ancien dépotoir. Sur une façade latérale du Saint-Georges, une pancarte lance un message clair: "Stop Solidere". Joseph Eid/

Symbole de l'âge d'or de Beyrouth, l'hôtel Saint-Georges n'est plus qu'une vieille carcasse au centre d'une bataille acharnée entre ses propriétaires et de puissants promoteurs immobiliers. "Avant la guerre civile (1975-1990), le Liban était la capitale du monde et le Saint-Georges était la capitale du Liban", affirme Serge Nader, dont la famille a géré la plage adjacente à l'hôtel jusqu'en 1997. "Nous étions le centre du monde", lance-t-il.

Construit à la fin des années 1920, l'hôtel incarnait le glamour du Liban d'avant-guerre, accueillant des stars d'Hollywood comme Élisabeth Taylor et Richard Burton, des têtes couronnées et d'autres célébrités comme le Chah d'Iran, la diva arabe Oum Koulsoum. La crème de la société beyrouthine se retrouvait au bar, à la spectaculaire terrasse donnant sur la Méditerranée, ou à la piscine, qui seule aujourd'hui est ouverte au public. Là, des dirigeants peaufinaient les tractations politiques, des journalistes étaient à l'affût de scoops et des espions comme Kim Philby, agent britannique passé à la solde des Russes, à la recherche d'informations confidentielles.

"L'emplacement était absolument féerique. Le Saint-Georges, c'était une douceur de vivre avec le charme d'un Beyrouth disparu", se souvient Georges Corm, économiste et historien libanais. "La baie, qui était une merveille, est aujourd'hui sans aucune poésie", ajoute-t-il. Et pour cause. Ravagé durant la guerre, l'immeuble de quatre étages à la façade rosée est toujours désert et paraît effacé à l'ombre des gratte-ciel qui ont poussé comme des champignons ces dernières années.

L'hôtel, qui jouissait d'une vue imprenable, est aujourd'hui cerné par une marina, une digue d'environ 2,5 mètres de hauteur et un nouveau projet immobilier construit sur un ancien dépotoir en Méditerranée. Sur une façade latérale du Saint-Georges, une pancarte lance un message clair: "Stop Solidere". Solidere, c'est la compagnie créée sous l'égide du milliardaire Rafic Hariri, devenu Premier ministre du Liban en 1992. Une âpre bataille judiciaire oppose le propriétaire de l'hôtel Fady el-Khoury et cette compagnie qu'il accuse de l'avoir empêché de rénover le Saint-Georges.

"Ils ne veulent pas que nous existions", affirme M. Khoury. Contacté par l'AFP, le porte-parole de Solidere Nabil Rached, a indiqué que la compagnie ne faisait pas de commentaire à ce sujet. En 2005, Rafic Hariri a été tué dans un attentat à la camionnette piégée juste en face du Saint-Georges, qui a également défiguré la façade de l'hôtel. Une statue commémorative de l'ex-Premier ministre fait aujourd'hui face à l'hôtel. Au Liban, il y a les "pro" et les "anti-Solidere": pour les uns, c'est la compagnie qui a reconstruit un Beyrouth ravagé par la guerre, pour les autres, c'est un ogre immobilier qui a détruit l'héritage de la capitale et exproprié ses habitants. La bataille entre M. Khoury et Solidere a éclaté après qu'il s'est opposé à un projet de construction d'une nouvelle marina qui, selon lui, empiète sur l'accès historique - et légal - de l'hôtel à la mer. "Ce qu'ils ont fait est apocalyptique", estime M. Khoury. "Quand vous vous tenez sur cette marina, vous ne pouvez plus voir le soleil à cause des bâtiments énormes".

Certains se demandent toutefois si l'hôtel n'est pas victime des calculs des uns et des autres. "Que ce soit Solidere ou le propriétaire actuel, ils se moquent complètement de l'image de l'hôtel, de son histoire et de l'histoire de Beyrouth", affirme Jad Tabet, dont le père Antoine a été l'un des architectes du Saint-Georges avec trois Français. "C'est une histoire de gros sous". Toutefois, M. Khoury assure qu'il ne baissera pas les bras. "Je ne ferai aucun compromis", dit-il. Après l'assassinat de Rafic Hariri, il a entamé la rénovation du Saint-Georges qu'il espère rouvrir dans un délai de 18 mois à deux ans. "Les gens pensent que je suis un Don Quichotte, mais je ne le suis pas", dit M. Khoury. "Je ne peux pas abandonner cette icône, témoin de la guerre civile qui l'a ravagée".

Symbole de l'âge d'or de Beyrouth, l'hôtel Saint-Georges n'est plus qu'une vieille carcasse au centre d'une bataille acharnée entre ses propriétaires et de puissants promoteurs immobiliers. "Avant la guerre civile (1975-1990), le Liban était la capitale du monde et le Saint-Georges était la capitale du Liban", affirme Serge Nader, dont la famille a géré la plage adjacente à...

commentaires (9)

Il serait content de voir le Saint George resuscite

maurice maroun

18 h 55, le 03 juillet 2011

Tous les commentaires

Commentaires (9)

  • Il serait content de voir le Saint George resuscite

    maurice maroun

    18 h 55, le 03 juillet 2011

  • Pour cette fois,je ne peux qu'être d'accord avec ceux qui disent STOP SOLIDERE.Franchement Dieu ait l'âme de Rafic Hariri,mais Solidere a tué le coeur battant de Beyrouth et l'a remplacé par quelquechose sans âme...voilà c'est dit !!!mes à mes bons amis qui ne s'en prennent qu'à Rafic Hairi,je passe l'information que d'autres buildings sans âme qui ont détruit bien des vieilles maisons de Beyrouth ont été construits par leurs"amis" et d'autres sont en projet de la même façon.Le perchoir de l'Assemblée Nationale n' a rien à envier à l'ex Sérail de ce point de vue.N'est ce pas?

    GEDEON Christian

    18 h 39, le 03 juillet 2011

  • Pure mentalité réactionnaire, ces réactions de Jabour et de sa "jumelle", C. Fares ! " Al boukaä aala el Atlal ! "

    MOUJABER Alphonse

    10 h 08, le 03 juillet 2011

  • Très heureux de vous lire à nouveau Carine et André et je salue votre militantisme patriotique inébranlable. Il serait injuste d'enlever tout crédit à ceux qui ont oeuvré à la reconstruction du pays mais il est grand temps qu'un coup de barre soit donné dans le sens de la modération de la cupidité des promoteurs, de l'esthétique et de la finesse. Bien entendu on ne lira probablement pas de commentaires de nos amis quatorze-marsistes sous cet article et on comprendra pourquoi... Roy Allam

    roy ALLAM

    06 h 52, le 03 juillet 2011

  • Soyez Don Quichotte Mr Khoury et battez vous ,votre hotel en plus d'etre une institution a représenté l'age d'or de la belle période beyrouthine, j'ai eu le privilège d'etre membre de la plage du St Georges et d'y avoir passé les plus belles années de l'ère 1970/75 ,Serge Nader a été un boute en train et tous les amis que j'ai connu (entre autres André Jabbour,Nadim Barrage, Nael El Assaad ) ont cet endroit figé dans leur mémoire ..cet hotel ne redeviendra pas ce qu'il était mais que Solidère and Co ne mette pas la main sur lui.......... Selim Chams

    chams selim

    05 h 45, le 03 juillet 2011

  • Saint-Georges un rêve qui doit se réaliser car si on on croit à l'amour, à la beauté, on doit aussi croire à la justice. Reviens vite Saint-Georges des nostalgiques . Nazira.A.Sabbagha

    Sabbagha .A.Nazira

    04 h 35, le 03 juillet 2011

  • Desole de jetter un pave dans la marre, mais ce qui se passe avec le St Georges ne me derange pas outre mesure. Certes, du point de vue nostalgique et meme culturel, j'aimerai voir l'hotel reprendre ses activites et complementer les autres hotels de la region. Quand a la marina, je prefere, et de loin, ce qu'en a fait Solidere compare a ce que ca aurait ete avant. L'extension de la corniche, le parc qui s'y amenage, et la vue de ces beaux yachts en plein Beyrouth me vont tres bien. Il ne faut pas oublier que la plage et la baie dont Mr. Corm parle ont cesse d'exister depuis longtemps a cause du depotoir sauvage "Normandie", et non pas a cause de Solidere. Mettons la faute a la guerre et au manque d'esprit civique des combattants! Jusqu'a quand allons nous pleurer sur ce Beyrouth d'antant, ces "golden years" qui ne profitaient qu'aux quelques "happy few" bien nantis?

    Amer Chehab

    03 h 54, le 03 juillet 2011

  • Nous sommes tous des Fadi EL-KHOURY et le disons tout haut tous ensemble ; STOP SOLIDERE .

    jabbour andré

    01 h 04, le 03 juillet 2011

  • Le conflit du St Georges avec Solidere resume à lui seul tout le ressentiment que nombre de libanais eprouvent à l'egard des promoteurs immobiliers qui ont defiguré le Liban et plus particulierement la marina et ceux qui etaient derriere eux et qui se sont remplis les poches, mais egalement vis à vis des libanais qui sont de plus en plus nombreux à vendre leurs terres aux etrangers, sans etre inquietes, et enfin ceux qui n'ont aucun probleme à implanter les palestiniens au Liban. Le combat de Fady Khoury est courageux et exemplaire. Nous attendons du nouveau gouvernement qu'il REHABILITE LES MINISTERES DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TOURISME en leur allouant tous les fonds necessaires afin de doter le Liban de plages dignes de celles de Monaco ou Chypres. Il faudrait demolir tout ce qui nous bouche la vue et reconstituer des plages sablonneuses faciles d'acces.PRIORITE A L'ENVIRONNEMENT, la vraie richesse du Liban.Sans oublier la montagne et cette monstrueuse deforestation qui se poursuit! Il faudrait changer la loi, declarer bon nombre de terrains non construtibles (pour cele, avoir les moyens d'indemniser les proprietaires).ALLEZ AU TRAVAIL! PLUS DE TEMPS A PERDRE!RIEN N'EST IMPOSSIBLE!Les anciens gouvernants n'ont fait qu'encourager les constructions sauvages et illegales, l'enlaidissement du Liban! D'ou entre autres, notre ressentiment! RENDEZ-NOUS NOTRE LIBAN D'AVANT!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

    Carine Fares

    00 h 27, le 03 juillet 2011

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