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Actualités - OPINION

Être ambassadeur au Liban…

L’article 5 de la section 1 (Agent diplomatique) du Dalloz sur les fonctions et l’autorité des ministères publics, paragraphe 168, stipule que « les principales fonctions des ambassadeurs sont la négociation des affaires d’État, la protection et la défense des nationaux pour tout ce qui concerne les droits des gens, les compliments de félicitation ou de condoléance au nom du pays qui les envoie ». Par ailleurs, la convention de Vienne sur les relations diplomatiques, conclue le 18 avril 1961, accorde le droit aux ambassadeurs « de s’informer par tous les moyens licites des conditions et de l’évolution des événements dans l’État accréditaire et faire rapport à ce sujet au gouvernement de l’État accréditant ». La convention précise dans l’un de ses articles que les diplomates, s’ils jouissent de ce droit de s’informer, ont également le devoir de ne pas s’immiscer dans les affaires intérieures de l’État accréditaire. L’on se demande où se termine donc l’exercice de la mission de s’informer telle que définie par la convention de Vienne et où commence l’ingérence dans les affaires internes du pays hôte ? Dans les faits et depuis son indépendance, l’État libanais ne cherche même pas à définir les limites que doit s’imposer une mission diplomatique. Nous avons vu au fil des ans des ambassadeurs, comme Abdelhamid Ghaleb, Jeffrey Feltman, etc. et consorts s’ériger en hauts commissaires, se comportant au Liban comme en terrain conquis. L’autre jour, dans les nouvelles, M. Mounir Maqdah déclarait que certaines ambassades fournissent des armes à des factions dans le camp palestinien de Aïn el-Heloué. N’est-ce pas ahurissant qu’une information pareille soit publiée dans les médias sans susciter de réaction de la part des autorités ? L’autre jour encore, M. Joumblatt a dépêché l’un de ses assistants auprès de l’ambassadeur iranien, comme si ce dernier devait lui donner la bénédiction pour ses accords avec le Hezbollah. Hier aussi, cet autre ambassadeur rendait visite à l’une des factions à Tripoli pour discuter avec ses membres. Ici et là, d’autres diplomates, américains, français, anglais, etc., prennent des initiatives controversées et établissent des contacts avec des partis politiques pour débattre de la politique intérieure, prenant des libertés avec les usages et les règles diplomatiques. Comment peut-on qualifier de telles intrusions dans la politique intérieure du pays ? S’agit-il là d’initiatives maladroites ou délibérées pour servir la politique ou les autres intérêts de leurs pays respectifs ? Si ces diplomates se sont permis de pousser le bouchon aussi loin, n’est-ce pas parce qu’ils étaient sûrs qu’ils pouvaient le faire sans risquer une protestation des autorités. Sinon, comment expliquer qu’ils prennent le risque de provoquer un incident diplomatique ? En fait, ils n’en ont rien à faire puisque le Liban se comporte en terrain abandonné, sans clôture et sans règles, donc ouvert à tous les excès. Mais qu’est-ce qui a donc permis une telle audace de la part de certaines chancelleries ? Ou encore qu’est-ce qui a fait croire aux ambassadeurs qu’ils pouvaient intervenir dans le débat politique interne du Liban, et même peut-être aller au-delà du débat – ce qui est hallucinant – sans soulever d’objection de la part des autorités ? À la veille des Jeux olympiques, l’ambassadeur de Chine en France avait déclaré que les relations entre les deux pays souffriraient si le dalaï-lama était reçu par l’Élysée, ce qui lui avait valu une convocation immédiate au Quai d’Orsay où on s’est chargé de lui indiquer clairement qu’il était inacceptable de s’immiscer dans les affaires intérieures du pays. Avons-nous eu ce genre de réactions quand les ambassadeurs s’arrogeaient le droit de nous dicter la façon de conduire notre politique ? Les contacts entre des ambassadeurs et des leaders de partis politiques portant sur les affaires intérieures du pays constituent certainement un dépassement des prérogatives du représentant diplomatique et une marque de non-respect des règles et conventions internationales. Ne faudrait-il pas que le ministère des Affaires étrangères mette fin à ces ingérences et établisse des règles strictes sur les agissements des ambassades ? Ne faudrait-il pas aussi que les autorités lancent un avertissement à tout Libanais participant à des réunions de chancelleries, quand celles-ci sont assimilées à de l’ingérence dans la politique intérieure ? La coopération et les relations bilatérales relèvent de cadres officiels connus. Cependant, et sous prétexte d’un dialogue entre les deux peuples, les ambassades cherchent l’information en ratissant large dans la société et les partis politiques. Cette couverture dont jouissent les diplomates doit être levée et ces agissements dénoncés quand ils ne relèvent pas du cadre diplomatique. Par ailleurs, aucune déclaration ne doit être faite par un ambassadeur sur la politique intérieure du pays même si cette déclaration est positive. Et si les déclarations faites sur les perrons de tel ou tel palais sont intolérables, financer les armes, s’il est avéré, l’est encore plus et est considéré comme un acte belliqueux et doit être dénoncé immédiatement, sous peine de haute trahison. Le Liban doit cesser d’être une cour de récréation où les chancelleries peuvent agir à leur guise. Malheureusement, qui a donc intérêt à ce que cette valse cesse puisque presque tous ou presque participent à la danse ? Joseph ZOGHBI
L’article 5 de la section 1 (Agent diplomatique) du Dalloz sur les fonctions et l’autorité des ministères publics, paragraphe 168, stipule que
« les principales fonctions des ambassadeurs sont la négociation des affaires d’État, la protection et la défense des nationaux pour tout ce qui concerne les droits des gens, les compliments de félicitation ou de condoléance au...