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Chto delat ? Paul RISCALLAMD

Ou «?que faire à partir de maintenant?? ». Ces mots de Lénine au lendemain de la révolution d’octobre pourraient facilement s’appliquer à l’actualité au Liban. Mais commençons d’abord par quelques constatations : – Le 8 mai dernier, l’abcès qui affligeait le pays depuis déjà dix-huit mois était crevé par un coup de force de la part de l’opposition contre le gouvernement. – Le 9 mai, les actes promulgués par le gouvernement contre le Hezbollah ?étaient révoqués sous pression de l’armée. – Le 21 mai, un accord entre protagonistes était signé à Doha, qui partagerait le pouvoir de façon à satisfaire l’opposition. – Le 22 mai, les protestataires campés au centre-ville commencent à se disperser et l’activité économique et sociale, qui avait été interrompue longtemps, reprend finalement. – Le 25 mai, le général Sleimane est élu président de la République. Un nouveau gouvernement devra donc être formé qui placerait le pays sur la voie des réformes constitutionnelles et s’occuperait de gouverner. En 2006, la crise qui avait été provoquée par le Hezbollah et qui avait débouché sur l’attaque brutale israélienne contre le Liban avait coïncidé avec le début de la saison estivale. En 2008, les accords de Doha sont venus à ce même moment de l’année et devraient avoir l’effet inverse : des touristes du Qatar d’abord, mais des autres pays de la péninsule et du Golfe, de la diaspora libanaise aussi, devraient affluer au Liban. Il est donc à souhaiter que l’économie libanaise soit relancée et bénéficie cette fois-ci du boom financier que causent les prix élevés du pétrole. Lors du boom de l973, le Liban préparait sa guerre civile ; cette occasion-là avait été ratée. Les Libanais devront penser d’une façon nouvelle, faire montre de sagesse et d’imagination si leur pays doit rattraper les opportunités perdues que Chypre, Dubaï et d’autres dans la région ont exploitées. Pour y parvenir, tous les citoyens auront à participer dans un nouveau contrat national. Les dernières années ont été marquées par un durcissement confessionnel de la part de tous. Les puissances régionales ont profité des querelles entre communautés au Liban pour régler leurs propres contentieux. Ainsi, la Syrie, Israël, l’Iran et l’Arabie saoudite ont opté, avec l’aide d’un groupe libanais ou d’un autre, de promouvoir leurs intérêts. Leurs alliés libanais du moment y ont trouvé leur compte aussi. Ainsi se joue la politique. Une réconciliation nationale, c’est-à-dire un partage adéquat des pouvoirs, affaiblit invariablement l’ingérence des pays étrangers. Souvenons-nous, tout simplement, des sunnites au Liban : en 1958, ils s’étaient tournés vers la Syrie et l’Égypte pour revendiquer leur place. Depuis les accords de Taëf de l989, ils se sentent autant libanais que les maronites. Les accords de Doha devraient réaliser la même conversion s’agissant des chiites. Lors de la formation d’un nouveau gouvernement, certains portefeuilles devraient être confiés à des ministres chiites qui accorderaient la priorité à la reconstruction du Liban-Sud et de la banlieue sud. Des routes, l’eau potable, l’agriculture et l’habitat ont été trop longtemps déniés aux régions chiites. Si l’on veut que les réfugiés à Beyrouth rentrent chez eux, il faudra les y attirer. Paroles et promesses ne suffisent plus. J’ai toujours été partisan de l’éducation nationale. Ces dernières années, j’entendais chrétiens et sunnites parler de leurs voisins chiites comme d’étrangers dont ils ignoreraient tout. Je conviens que le contraire doit être aussi vrai. La mosaïque confessionnelle dans ce pays est une source de richesse pour tous les Libanais. Imaginez un Liban qui aurait des antennes dirigées vers l’Iran, l’Irak et l’Afrique occidentale grâce à ses chiites, vers les pays arabes et musulmans grâce à ses sunnites, vers l’Arménie grâce à ses Arméniens et ainsi de suite. En définitive, l’unité entre les Libanais leur permettra de résister aux tensions régionales en cours. La guerre froide imposée par les États-Unis au Moyen-Orient déchire pays et sociétés. Il est à souhaiter que la prochaine administration à Washington saura mettre un terme aux erreurs dues à l’incompétence de l’actuel occupant de la Maison-Blanche. Le Liban pourrait se préparer aux changements qui devraient suivre. – La Syrie, dont les visions irrédentistes se perpétuent en ce qui concerne le Liban, accepterait, j’en suis sûr, la souveraineté libanaise si un bon voisinage devait être négocié et si le danger israélien s’estompait. – Il est de l’avantage du Liban que le Golan revienne à la Syrie tout comme le retour des fermes de Chebaa ôterait au Hezbollah son seul argument en faveur du maintien de sa milice armée. – Les contacts que certains Libanais auraient avec les Américains bénéficieraient au Liban, à la Syrie, à Israël et aux États-Unis. La neutralité d’un pays repose, en général, sur une cohésion interne forte et sur des relations étroites avec autant de protagonistes que possible. Je souhaite que le prochain ministre des Affaires étrangères fasse montre de compétence et de vision. Son département a grand besoin d’être modernisé si le pays entend jouer le rôle d’intermédiaire économique et culturel dont il est sans aucun doute capable. L’avenir politique du régime alaouite, en Syrie, est finalement précaire. Si le Liban ne forge pas son unité à coups de réformes et de développement, la tornade confessionnelle que devra subir une Syrie en révolte touchera le Liban. À Dieu ne plaise. Article paru le mercredi 4 juin 2008
Ou «?que faire à partir de maintenant?? ». Ces mots de Lénine au lendemain de la révolution d’octobre pourraient facilement s’appliquer à l’actualité au Liban. Mais commençons d’abord par quelques constatations :
– Le 8 mai dernier, l’abcès qui affligeait le pays depuis déjà dix-huit mois était crevé par un coup de force de la part de l’opposition contre le gouvernement.
– Le 9 mai, les actes promulgués par le gouvernement contre le Hezbollah ?étaient révoqués sous pression de l’armée.
– Le 21 mai, un accord entre protagonistes était signé à Doha, qui partagerait le pouvoir de façon à satisfaire l’opposition.
– Le 22 mai, les protestataires campés au centre-ville commencent à se disperser et l’activité économique et sociale, qui avait été interrompue longtemps, reprend...