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La «stupid girl», icône de l’été

À peine descendu d’avion, Robert Duffy, cofondateur de Marc Jacobs, file à la boutique éponyme du centre-ville. Il est 22h00, un peu tard pour se soumettre au rituel des interviews. Mais l’Américain est avide de connaître la ville. C’est d’ailleurs lui qui pose les questions. Il étale avec une certaine nonchalance sa grande silhouette sur le canapé blanc de la mezzanine. Bronzé à point, le cheveu savamment décoloré, Robert Duffy découvre des poignets de potache où les grandes dates de sa vie son tatouées en bleu. Bleus aussi les murs et les mannequins de la boutique. L’homme sourit d’aise?: il se sent ici chez lui, tout comme il est chez lui dans la centaine de boutiques Marc Jacobs éparpillées dans le monde. Entre deux coups d’œil à l’écran qui diffuse le défilé de la collection été, Duffy évoque son premier séjour à Beyrouth. Il est venu ici adolescent, il y a une quarantaine d’années. En compagnie de sa grand-mère, il passait des vacances en Méditerranée. «?Il était inconcevable de passer dans le coin sans visiter le Liban. Ça a toujours été le pays de la fête. Partout ailleurs, même en Grèce, l’atmosphère était plus terne.?» Revenant à son écran, il commente en souriant?: «?Ce défilé a eu lieu à l’“Armory?”, l’arsenal de Manhattan. J’adore organiser les défilés dans des lieux qui n’ont rien à voir avec la mode. À l’“Armory”, le contraste était saisissant entre la grâce légère des mannequins et l’agressivité des chars et des canons?». Il sourit encore. Le genre de sourire aux anges. Il n’en revient pas de se trouver en pleine nuit, après des heures de vol, dans ce décor invraisemblable?: «?Je n’ai encore rien vu pour retrouver des souvenirs. Mais cette partie de la ville… on dirait un décor de théâtre?! On se demande si c’est vrai.?» On lui assure que malgré les apparences, oui, c’est vrai. Le centre-ville est bien réel, mais il n’a pas eu le temps de commencer à vivre, ni de prendre la patine qui vous assoit une ville. À ce propos, le sourire s’élargit, se transforme en rire?: «?Avant de quitter New York, quand j’ai annoncé aux jeunes de la boîte (je suis le plus vieux) mon passage à Beyrouth, leur réaction a été de me supplier de les emmener avec moi. J’étais stupéfait de l’image positive que les jeunes ont de Beyrouth en Amérique. Ils s’imaginent que c’est la ville la plus “trendy” du monde. Que les gens ici sont tous à la pointe de la mode et qu’ils passent leur temps en boîte de nuit à danser sous les bombes?!?» Cela s’appelle «?résilience?», osons-nous. Et la résilience, Duffy, il connaît. Il montre ses tatouages?: 1984, la date de sa rencontre avec Marc Jacobs. Depuis, le tandem a essuyé toutes sortes de tempêtes. «?Marc a du génie, mais il avait aussi des problèmes d’alcool et de drogue. Nous avons été tour à tour engagés, virés, soutenus, lâchés, jusqu’à ce qu’un autre génie, Bernard Arnault, en quête d’une nouvelle image pour Louis Vuitton, décide de nous faire confiance. Nous avions déjà une boutique à Tokyo. Quand l’information a circulé que Marc Jacobs était le styliste de Vuitton, il y a eu un rush sur notre enseigne. Tout s’est passé il y a cinq ou six ans. Les boutiques Marc Jacobs et Marc by Marc Jacobs ont subitement essaimé dans le monde entier.?» Il touche du bois. Directeur et responsable de la communication de Marc Jacobs, il a appris son métier sur le terrain, au hasard des embauches. Désormais, il n’a pas son pareil pour gérer une image et toucher le public là où ça vibre. À propos de la collection de l’été 2008, une confidence?: «?Nous écoutions le tube de Pink, Stupid Girl. Les “stupid girls” sont nombreuses dans notre entourage, la plus emblématique étant Victoria Beckham?: elle sourit aux caméras et a toujours l’air à moitié nue dans les magazines. Or il faut savoir que Victoria est l’une des filles les plus intelligentes qui existent. Elle a une grande culture, un humour corrosif, n’a pas son pareil pour organiser une soirée réussie et, de plus, elle élève ses enfants à la perfection. Mais elle a compris que pour que son nom vaille de l’argent, il lui suffisait de faire la “stupid girl” pour les médias. Nous avons donc compris qu’une image à la fois sexy et naïve a quelque chose d’attrayant qui fait vendre. Partant de ce principe, les robes de la collection portent des impressions de couleurs vives sur des fonds déclinés dans toutes les tonalités de la peau. De loin, les filles ont l’air nues et de près, ingénues.» Et ça marche!
À peine descendu d’avion, Robert Duffy, cofondateur de Marc Jacobs, file à la boutique éponyme du centre-ville. Il est 22h00, un peu tard pour se soumettre au rituel des interviews. Mais l’Américain est avide de connaître la ville. C’est d’ailleurs lui qui pose les questions. Il étale avec une certaine nonchalance sa grande silhouette sur le canapé blanc de la mezzanine....