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Actualités - OPINION

LE POINT Faire fronts Christian MERVILLE

Il revenait au général Peter Van Uhm d’annoncer la mort au combat de deux soldats du contingent néerlandais opérant dans la province d’Uzurgan, portant à seize le nombre de victimes depuis la décision de La Haye, en août 2006, d’envoyer 1 650 hommes de troupe en Afghanistan. C’est un autre haut gradé, Freek Meulman, qui s’est chargé d’annoncer la triste nouvelle plutôt que le commandant en chef dont le fils, Dennis Van Uhm, était l’une des victimes d’une guerre dont les ravages menacent toute une région devenue hautement explosive. Nous avons voulu nous venger d’un film insultant pour l’islam, ont fait savoir les talibans, dans une allusion au Fitna du député Geert Wilders. Contestable – il est permis de douter de l’efficacité des services de renseignement des étudiants en théologie –, la revendication n’en est pas moins révélatrice de la tournure prise par l’intervention alliée dans un pays en proie par ailleurs au double fléau de la famine et de la drogue. Et dont les habitants ont de moins en moins tendance à considérer les combattants étrangers envoyés sur place comme autant d’archanges salvateurs d’une démocratie en péril. Comme pour ajouter au malaise (délicat euphémisme) qui prend forme au sein de la société locale, il y a cette enquête donnée comme imminente à Kaboul pour savoir si l’ami yankee, dans son extrême sollicitude, n’a pas utilisé en 2001 des bombes à uranium appauvri, ce qui expliquerait le nombre excessif de nouveau-nés malformés, notamment dans les montagnes de Tora Bora, sanctuaire d’el-Qaëda. Près de sept ans après le renversement d’un régime honni qui avait instauré le règne de la burqa et entrepris de dynamiter les superbes bouddhas de Bamyan, la partie est loin d’être gagnée. Pour la seule année 2007, on a enregistré 140 opérations terroristes d’envergure, un record, qui ont fait un millier de victimes. La culture du pavot, elle, ne s’est jamais aussi bien portée ; la construction de routes, d’écoles et de dispensaires marque le pas et ce pauvre Hamid Karzai peine à établir un semblant de démocratie dans un pays qui souffre d’une pénurie d’hommes politiques capables de distinguer entre les intérêts de la tribu et ceux de la nation. De l’autre côté de la Khyber Pass, la situation n’est guère plus reluisante depuis qu’en mars 2006, Pervez Musharraf a demandé l’aide de l’Administration Bush dans sa lutte contre le terrorisme, obtenant la promesse d’un plan d’urgence d’environ un milliard de dollars étalé sur quatre ans, dont l’approbation attend toujours le bon vouloir du Congrès. La paralysie à ce niveau est telle, indique le New York Times, que l’état-major US a réclamé le droit de lancer des attaques contre les extrémistes pakistanais retranchés dans la zone frontalière. Autorisation refusée, a-t-on répondu en haut lieu, en faisant valoir que le risque serait grand d’une crise majeure avec le nouveau gouvernement en place à Islamabad, moins docile qu’il n’y paraît et qui, de plus, a établi des contacts secrets avec les hommes du mollah Omar. En attendant un improbable feu vert de Washington, le bilan n’est guère brillant : quelques dizaines de rebelles abattus, mais aussi 1 400 membres des forces de sécurité et de l’armée. Et surtout une désolante absence de tout plan coordonné entre les divers organismes officiels pour faire face à la menace, réelle cette fois, du rétablissement d’un régime honni. À des milliers de kilomètres de là, sur les bords de l’océan Indien, il est une contrée qui revit les heures de la piraterie des siècles passés. Le monde a eu droit, en l’espace de moins de deux semaines, à des saisies de trois bateaux dignes des heures glorieuses de Jean Laffite, Henry Morgan et John Rackham (pardon, capitaine Haddock…). Coup sur coup, il y a eu les opérations contre le yacht Le Ponant pris à l’abordage, un thonier espagnol, enfin le pétrolier Takayam, attaqué à coups de roquettes et d’armes automatiques. Spectaculaires autant que folkloriques en ce qu’elles relèvent d’une époque que l’on croyait révolue – c’est à peine si, de nos jours, il est question de temps à autre d’un hijacking, mais un seajacking… –, ces attaques ont pour effet de détourner l’attention de la crise aiguë que n’a jamais cessé de connaître Mogadiscio. Pour les trois derniers jours, on a eu à déplorer 56 morts dans les combats d’une rare violence qui ont opposé les forces gouvernementales somaliennes et leurs alliés éthiopiens, d’une part, les insurgés d’autre part. Belle réussite que cette intervention armée d’Addis-Abeba dans la crise somalienne : les responsables des Tribunaux islamiques, qui ont longtemps gouverné le pays, se trouvent désormais en Érythrée où ils réorganisent le gros de leurs effectifs avant de repartir à l’assaut de leurs anciens bastions. En attendant, ils refusent de prendre langue avec le Premier ministre Nour Hassan Hussein ou même d’accepter l’idée d’une trêve qui permettrait au pays de panser ses blessures. Avec tous les développements que connaît ces temps-ci l’Irak, voilà pas mal de pains sur une planche, soigneusement savonnée, que George W. Bush s’apprête à transmettre à son successeur. Il n’est pas dit que ce dernier appréciera cette aimable attention.
Il revenait au général Peter Van Uhm d’annoncer la mort au combat de deux soldats du contingent néerlandais opérant dans la province d’Uzurgan, portant à seize le nombre de victimes depuis la décision de La Haye, en août 2006, d’envoyer 1 650 hommes de troupe en Afghanistan. C’est un autre haut gradé, Freek Meulman, qui s’est chargé d’annoncer la triste nouvelle plutôt que le commandant en chef dont le fils, Dennis Van Uhm, était l’une des victimes d’une guerre dont les ravages menacent toute une région devenue hautement explosive. Nous avons voulu nous venger d’un film insultant pour l’islam, ont fait savoir les talibans, dans une allusion au Fitna du député Geert Wilders. Contestable – il est permis de douter de l’efficacité des services de renseignement des étudiants en théologie –, la...