Le Pakistan accuse el-Qaëda d’avoir assassiné Bhutto

Benazir Bhutto est morte en heurtant le toit ouvrant de la voiture dans laquelle elle se trouvait au moment de l’attentat-suicide contre elle, et on n’a trouvé dans son corps ni balle ni éclat de métal, a déclaré hier le ministère pakistanais de l’Intérieur. Le ministère a par ailleurs indiqué que des services de renseignements avaient intercepté un appel téléphonique dans lequel un haut responsable du réseau terroriste el-Qaëda félicitait un activiste pour l’attentat contre Benazir Bhutto. Le ministère a déclaré qu’il y avait « une preuve irréfutable » qu’el-Qaëda tentait de déstabiliser le Pakistan. Au cours d’une conférence de presse, le porte-parole du ministère de l’Intérieur, le général Javed Cheema, a déclaré que Benazir Bhutto était décédée des suites d’une blessure à la tête qu’elle a subie lorsqu’elle s’est cognée contre le levier du toit ouvrant de sa voiture en tentant de se protéger à l’intérieur du véhicule au moment de l’attentat. « Le levier l’a heurtée près de l’oreille droite et a fracturé son crâne », a déclaré le général Cheema. « On n’a pas trouvé de balle ni d’éclat de métal dans la blessure », a-t-il dit. Le porte-parole a estimé que Benazir Bhutto n’aurait pas été atteinte par l’attentat si elle était restée à l’intérieur de la voiture blindée. L’auteur de l’attentat a apparemment tiré trois coups de feu vers Benazir Bhutto avant de faire exploser la bombe qu’il portait sur lui, mais l’a manquée, a déclaré le général Cheema. Il a aussi projeté au cours de la conférence de presse une brève vidéo des moments qui précèdent l’attentat et l’explosion, mais ce document est peu clair. Par ailleurs, le général Cheema a déclaré que des services de renseignements avaient intercepté un appel téléphonique dans lequel l’homme qui est considéré comme le principal responsable du réseau terroriste el-Qaëda pour le Pakistan, Baitullah Mehsud, félicitait un activiste après la mort de Benazir Bhutto. Il y a « une preuve irréfutable qu’el-Qaëda, ses réseaux et ses troupes tentent de déstabiliser le Pakistan », a dit le général Cheema. « Nous avons enregistré la conversation au cours de laquelle il congratule un activiste pour l’attentat », a-t-il déclaré. Le porte-parole a affirmé que Mehsud était aussi responsable de l’attentat-suicide commis en octobre à Karachi, dans le sud du Pakistan, contre le cortège de Benazir Bhutto quelques heures après son retour d’exil. Cet attentat, auquel l’ancien Premier ministre avait réchappé, avait fait 139 morts. Peu après cette conférence de presse, un proche collaborateur de Benazir Bhutto a affirmé que la version de sa mort donnée par le gouvernement pakistanais était « un tissu de mensonges ». « C’est sans fondement (...) », a déclaré à l’AFP Farooq Naik, qui était le principal avocat de Benazir Bhutto et est un haut responsable de sa formation politique, le Parti du peuple pakistanais (PPP). « Deux balles l’ont touchée, une dans l’abdomen et une dans la tête », a affirmé M. Naik. « Le secrétaire personnel de Bhutto, Naheed Khan, et le responsable de son parti Makhdoom Amin Fahim se trouvaient dans la voiture et ont vu ce qui s’est passé », a-t-il dit. « C’est une perte irréparable et ils racontent des histoires avec de telles affirmations. Le pays va à la guerre civile », a-t-il ajouté. « Le gouvernement affirme maintenant que Baitullah Mehsud est responsable. (...) Où sont les preuves ? » a encore dit M. Naik. D’autre part, le renseignement américain continue à essayer de savoir qui a tué Benazir Bhutto, en dépit des affirmations officielles pakistanaises, a dit un porte-parole de la Maison-Blanche, Scott Stanzel. « Il y a eu de nombreuses revendications. Nos services de renseignements continuent à examiner la question », a-t-il indiqué. M. Stanzel a noté que le renseignement américain n’avait pas la preuve de l’implication d’el-Qaëda. La veille, il avait cependant lui-même évoqué el-Qaëda en imputant l’attentat à des « ennemis de la démocratie » employant les mêmes méthodes que l’organisation terroriste. Enfin, le ministère pakistanais de l’Intérieur a également annoncé que l’opposant Nawaz Sharif figure parmi plusieurs politiciens qui sont menacés d’attentat après l’assassinat de Benazir Bhutto.