Prenez le cas de ce malheureux Dan Haloutz. On croyait que les généraux mouraient dans leur lit. C’est de plus en plus vrai. Mais ils meurent, aussi, plus riches ; enfin, disons qu’ils ne risquent pas de finir en visiteurs des Restos du cœur. Que croyez-vous...
Actualités - OPINION
LE POINT Classe mafieuse Christian MERVILLE
Par MERVILLE Christian, le 20 février 2007 à 00h00
Voilà un pays qui va à la ruine, politique d’abord, économique ensuite, avant sa disparition pure et simple pour cause de nécrose généralisée, diront certains. Toutes ces enquêtes, tous ces scandales sont un signe de solidité, de pérennité, soutiendront d’autres. On peut être partisan inconditionnel ou critique acharné d’un pays qui a, depuis sa création, usé ses hommes politiques à une vitesse telle qu’il risque bientôt de se retrouver à court de chefs – ce qui, au vu du degré atteint aujourd’hui, ne serait peut-être pas une mauvaise chose.
Prenez le cas de ce malheureux Dan Haloutz. On croyait que les généraux mouraient dans leur lit. C’est de plus en plus vrai. Mais ils meurent, aussi, plus riches ; enfin, disons qu’ils ne risquent pas de finir en visiteurs des Restos du cœur. Que croyez-vous que ce chef d’état-major sans peur et sans reproche (jusque-là) faisait le 12 juillet 2005, soit trois heures après la capture par le Hezbollah de deux soldats israéliens, prétexte au déclenchement de la guerre ? Non, il n’était pas penché, avec ses principaux adjoints, sur ses cartes du Liban-Sud, cherchant le meilleur angle d’attaque. Plus prosaïquement, il se trouvait dans son agence bancaire pour vendre un portefeuille d’actions de 120 000 shekels, soit l’équivalent de 20 000 dollars. À croire qu’il n’avait pas une confiance aveugle dans l’invincibilité de ses troupes. Le même jour, Haïm Ramon, alors ministre de la Justice, entreprenait d’arracher un baiser à une jeune soldate, dernier incident d’une longue série de harcèlements sexuels. Le chef de l’État, lui aussi un récidiviste notoire, a dû jeter l’éponge pour une multitude d’actes similaires commis dans les bureaux attenants au sien et abritant ses secrétaires. Il s’est aussitôt drapé dans sa dignité bafouée, dit-il, se retirant sous la tente pour préparer sa défense. Car, c’est à peine s’il a eu besoin de le souligner, les accortes demoiselles en question étaient consentantes. C’est tout juste s’il ne s’est pas présenté en victime aux enquêteurs. À cette liste exceptionnellement fournie, on pourrait ajouter le nom d’Abraham Hirshson, soupçonné de détournement de fonds, celui de Shoula Zaken, directrice du cabinet du Premier ministre, ceux d’une vingtaine de hauts fonctionnaires de la Direction des impôts, de Tzahi Hanegbi, qui fut en charge de l’Environnement, reconnu coupable d’avoir nommé à tour de bras des adjoints pas très recommandables, de Jacky Matza, qui vient de quitter la Direction des services fiscaux pour avoir accepté des dessous-de-table.
Il y a, bien sûr, le cas d’Olmert lui-même qui, lors de son passage aux Finances, était intervenu de manière hautement suspecte dans le processus de privatisation de la deuxième plus grande banque, la Leumi. Le dernier en date des scandales a éclaté avant-hier dimanche, éclaboussant le chef de la police israélienne et le forçant à présenter sa démission, « pour l’exemple », a-t-il souligné à l’intention des journalistes. La vérité est que, quelques instants auparavant, une commission ad hoc avait recommandé sa destitution ainsi que celle de son subordonné, le responsable de la sécurité publique à Jérusalem. Raison de ce nouveau coup de balai : Moshe Karadi et Ilan Franco avaient donné leur aval à la nomination d’un commissaire ayant des attaches criminelles avec une famille mafieuse du Sud, les Farinyan. Pour être bref, disons que tous les hommes politiques ne sont pas passibles de poursuites judiciaires, mais qu’ils ont presque tous, suspendu au-dessus de leurs têtes, comme un petit nuage qui n’est pas une auréole de saint.
En remontant loin dans le temps, il est aisé de trouver trace d’autres affaires qui ont entaché la vie politique de l’État hébreu. Ariel Sharon n’est pas au-dessus de tout soupçon – et pas seulement pour les boucheries perpétrées à Sabra-Chatila, avec son tacite consentement. Pas plus que ne le sont Benjamin Netanyahu et son épouse, l’ex-président Ezer Weizman, si l’on ne veut pas faire un bond de plus de cinq décennies, jusqu’à la peu glorieuse affaire Haïm Lavon, en 1954, quand il s’était agi d’attaquer des objectifs américains et britanniques en Égypte « afin de nuire aux relations de Washington et Londres avec Gamal Abdel Nasser ».
Jugement de Rafi Smith, directeur de l’institut de sondage éponyme à Tel-Aviv, cité par le Christian Science Monitor : « Depuis quelques années, nous assistons à l’érosion de tous les systèmes de gouvernement en Israël. Qualifiez un homme de “politicien” et vous verrez aussitôt sa cote de popularité chuter d’une vingtaine de points. » Le résultat est que – à moins d’une tentative de fuite en avant (nouvelle opération, contre le Liban, raids sur des sites nucléaires iraniens...) – on s’achemine, lentement mais inéluctablement, vers des élections anticipées. Avec tous les risques de voir surgir de nouveaux scandales, sous des noms différents, cette fois.
Voilà un pays qui va à la ruine, politique d’abord, économique ensuite, avant sa disparition pure et simple pour cause de nécrose généralisée, diront certains. Toutes ces enquêtes, tous ces scandales sont un signe de solidité, de pérennité, soutiendront d’autres. On peut être partisan inconditionnel ou critique acharné d’un pays qui a, depuis sa création, usé ses hommes politiques à une vitesse telle qu’il risque bientôt de se retrouver à court de chefs – ce qui, au vu du degré atteint aujourd’hui, ne serait peut-être pas une mauvaise chose.
Prenez le cas de ce malheureux Dan Haloutz. On croyait que les généraux mouraient dans leur lit. C’est de plus en plus vrai. Mais ils meurent, aussi, plus riches ; enfin, disons qu’ils ne risquent pas de finir en visiteurs des Restos du cœur. Que croyez-vous...
Prenez le cas de ce malheureux Dan Haloutz. On croyait que les généraux mouraient dans leur lit. C’est de plus en plus vrai. Mais ils meurent, aussi, plus riches ; enfin, disons qu’ils ne risquent pas de finir en visiteurs des Restos du cœur. Que croyez-vous...