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Actualités - OPINION

Le point Retour de la Realpolitik Christian MERVILLE

Attention, cet homme peut être dangereux... Il s’agit du Premier ministre britannique qui annonçait dimanche sur les ondes de la vénérable BBC son intention de continuer à manifester, dans les années à venir, « un énorme intérêt pour le processus de paix entre Palestiniens et Israéliens». Quand on songe à la manière dont il s’est acquitté jusqu’à présent de cette tâche, de conserve avec son ami George W. Bush, il y a tout lieu de s’inquiéter d’un zèle aussi intempestif. Même si, signe de ses bonnes intentions passées, présentes et à venir, il a précisé qu’une telle tâche nécessite « beaucoup de travail, un engagement marqué et, de la part de l’ensemble de la communauté internationale, de reconnaître qu’il n’y a pas de sujet plus important que celui-là ». Comme premier gage de ses bonnes intentions, Tony Blair a chargé le chef de sa diplomatie, Margaret Beckett, d’entamer au Proche-Orient une tournée destinée à lui permettre de jauger les possibilités de progrès dans d’éventuelles négociations de paix entre représentants des deux camps – une tâche, ont par avance relevé les observateurs sur place, rendue extrêmement ardue par l’éruption de violence qui secoue Gaza depuis quelques semaines. Qu’importe ! Le mot impossible n’étant pas anglais, Londres tient à faire savoir qu’il n’y a pas de salut hors du processus de paix et pas de meilleur moyen d’aller de l’avant que l’instauration de deux États. On ne saurait trop louer le Foreign Office pour d’aussi bonnes intentions, même si elles ont tardé à se manifester et que le moment peut sembler mal choisi. À bien y réfléchir pourtant, les circonstances seraient plutôt favorables à une relance d’une initiative, la fameuse « feuille de route », dont l’ultime mouture – inspirée d’un discours prononcé par George W. Bush près d’un an auparavant – remonte au 30 avril 2003. Il y a, d’un côté, une Administration républicaine qui multiplie les déboires, sur le double plan interne et extérieur, et qui se montre soucieuse de redorer un blason dangereusement terni alors que se profile à un horizon pas si lointain la perspective de la présidentielle. Il y a, d’un autre côté, à Tel-Aviv, un gouvernement Olmert acculé par ses déboires successifs (désastre de la guerre contre le Liban, scandales financiers et sexuels) à se battre le dos au mur, sans aucune figure de proue depuis qu’Ariel Sharon est entré dans un coma profond, voilà treize mois. Il y a enfin, côté palestinien, un organisme et un exécutif qui n’ont d’Autorité et de gouvernement que les noms, engagés depuis des semaines dans une épreuve de force qui a achevé de les discréditer aux yeux des leurs et surtout de l’opinion internationale. Logiquement donc, tout ce monde étrange aurait intérêt à voir couronnée de succès la relance des efforts du quartette USA-Russie-Union européenne-ONU. Ce qui ne veut pas nécessairement dire qu’il en sera ainsi dès demain. L’Allemagne assurant depuis le début de l’année la présidence tournante de l’Union européenne, la chancelière Angela Merkel a pris le week-end dernier son bâton de pèlerin pour s’en venir prêcher la bonne parole en terre arabe. Il lui faudra beaucoup de doigté pour se présenter en interprète des intentions US en apparence louables et dans le même temps respecter la volonté des Vingt-Cinq de ne pas isoler complètement, comme le voudraient les Américains, la formation politico-militaire du tandem Khaled Mechaal-Ismaïl Haniyeh. À cela s’ajoute le fait que les préoccupations de Berlin sont, aussi, d’ordre purement allemand. C’est ainsi qu’au Caire, Die Bundeskanzlerin a proposé à l’imam d’el-Azhar une rencontre avec des chrétiens et des juifs. Avec cheikh Khalifa ben Zayed al-Nahyane, elle a évoqué le dossier des échanges commerciaux avant de prendre la parole devant un forum d’hommes d’affaires. Le thème des investissements a été abordé à chacune des étapes du voyage et aujourd’hui même à Dubaï, en présence de cheikh Mohammad ben Rached al-Maktoum, puis sans doute, quelques heures plus tard, à Koweït. Non pas, loin de là, que la crise arabo-israélienne soit reléguée au second plan. Elle constituerait plutôt le principal sujet de préoccupation des Européens, si l’on ne saurait en dire autant du Big Brother yankee. Mais rien n’impose de dissocier l’utile politique de l’agréable économique, un exercice dans lequel excellent de nos jours les dirigeants du monde, capables d’alterner, avec plus ou moins de bonheur, la casquette de « commis-voyageur » et celle d’émissaire de bonne volonté. À l’heure où les nobles sentiments des uns le disputent à la plus criante partialité des autres, un peu de Realpolitik ne peut être que bienvenu. Après tout, l’expression, mise à l’honneur jadis par Henry Kissinger, est bien allemande.
Attention, cet homme peut être dangereux... Il s’agit du Premier ministre britannique qui annonçait dimanche sur les ondes de la vénérable BBC son intention de continuer à manifester, dans les années à venir, « un énorme intérêt pour le processus de paix entre Palestiniens et Israéliens». Quand on songe à la manière dont il s’est acquitté jusqu’à présent de cette tâche, de conserve avec son ami George W. Bush, il y a tout lieu de s’inquiéter d’un zèle aussi intempestif. Même si, signe de ses bonnes intentions passées, présentes et à venir, il a précisé qu’une telle tâche nécessite « beaucoup de travail, un engagement marqué et, de la part de l’ensemble de la communauté internationale, de reconnaître qu’il n’y a pas de sujet plus important que celui-là ». Comme premier gage de ses...