Le général Aoun a réussi le pari de concentrer autour de lui la majorité du vote des chrétiens lors des élections législatives du printemps dernier.
La bataille fut âpre. Le général avait même conclu des alliances avec certains des acteurs politiques qui n’avaient pas pris leurs distances avec la présence syrienne. Les Libanais et particulièrement les chrétiens ont suivi avec intérêt la suite des événements. Allait-il y avoir suffisamment de points d’accord entre le général et le mouvement du 14 mars pour une participation du Courant patriotique libre au premier gouvernement de l’ère post-syrienne au Liban ? Malgré toutes les interventions et recommandations, les tractations devaient échouer. Le général Aoun se cantonna dans l’opposition.
Cette attitude a fait l’effet d’un choc sur les chrétiens qui avaient favorisé Aoun en croyant remédier à près de quinze ans de marginalisation résultant du rôle de Damas.
La cristallisation s’est ensuite faite autour de la loi électorale. L’ensemble des chrétiens espéraient le retour à celle de 1960, perçue comme étant plus équitable. Mais les composantes du 14 mars ont dû parer aux risques de torpillage des élections qu’auraient fait courir le Hezbollah et Amal en cas d’adoption de la loi de 1960. Le compromis eut lieu autour de la loi de 2000. Mais la propagande du général Aoun avait déjà pris pour cible les composantes du 14 mars, et en particulier les membres de Kornet Chehwane. Malgré les résultats du vote dans les secteurs chrétiens, le général Aoun bloqua la conversion politique de la réémergence politique des chrétiens en optant pour l’opposition.
Cependant, la conjoncture libanaise impose à toute opposition le respect de la démocratie consensuelle, concrétisée à l’heure présente par l’accord de Taëf.
Fin juin dernier, l’ancien député M. Nassib Lahoud a souhaité de la part de tous une position claire et définitive à cet égard. Cela signifie l’adhésion au principe de la démocratie consensuelle ou son rejet.
Les institutions étatiques libanaises sont le fruit d’un pacte national, hier celui de 1943, aujourd’hui celui de Taëf. Les deux pactes furent le produit d’un consensus.
À certains moments de leur ascension fulgurante mais courte, les Forces libanaises ont voulu dépasser l’essence consensuelle du pacte de 43. Les conséquences furent contraires aux attentes. Par sa guerre de libération, en 1989, le général Aoun avait voulu forcer le leadership islamique (surtout le président Sélim Hoss) à adhérer à un projet unificateur. C’est le pacte consensuel de Taëf qui en fut l’issue.
À leur tour, les dernières élections législatives ont mis face à face les chrétiens et les druzes à Baabda-Aley et les chrétiens et les sunnites au Liban-Nord. L’esprit, nécessairement anticonsensuel, de ces confrontations intercommunautaires a sans doute peu d’avenir, mais aura entre-temps causé beaucoup de dégâts.
En conclusion, l’intérêt ultime pour les chrétiens résiderait dans leur ralliement au régime de Taëf, parallèlement à un effort commun de rééquilibrage dans le mécanisme de son application.
Ainsi, après la fin des élections, le patriarche maronite, Mgr Nasrallah Sfeir, a souhaité un dialogue interlibanais en vue de rectifier les erreurs dans l’application de l’accord.
Le leader des Forces libanaises, Samir Geagea, a pour sa part relevé, à l’aéroport de Beyrouth, au moment de son départ pour Paris, le déséquilibre dans le cours de la vie politique interne et prôné une solution à travers le dialogue entre les membres du 14 mars.
Pour faire passer la force retrouvée des chrétiens libanais de l’état de fronde populaire à un authentique mouvement politique, le général Aoun se retrouve placé devant le choix prioritaire qui consiste à réintégrer le mouvement du 14 mars 2005. En son temps, cet événement a représenté le point culminant de l’action pour la libération du Liban de la présence syrienne enclenchée après le premier appel du conseil des évêques maronites, en septembre 2000.
La conséquence en sera que le mouvement du 14 mars se renforcera dans sa constitution politique et sa base populaire, et le général Aoun, ainsi que la majorité des chrétiens regroupés autour de lui feront partie intégrante du nouveau processus en cours. Finalement, leur poids politique mènera à un pouvoir équilibré, capable de jeter les fondements de la nouvelle République.
Ibrahim K. GEMAYEL
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Le général Aoun a réussi le pari de concentrer autour de lui la majorité du vote des chrétiens lors des élections législatives du printemps dernier.
La bataille fut âpre. Le général avait même conclu des alliances avec certains des acteurs politiques qui n’avaient pas pris leurs distances avec la présence syrienne. Les Libanais et particulièrement les chrétiens ont suivi avec intérêt la suite des événements. Allait-il y avoir suffisamment de points d’accord entre le général et le mouvement du 14 mars pour une participation du Courant patriotique libre au premier gouvernement de l’ère post-syrienne au Liban ? Malgré toutes les interventions et recommandations, les tractations devaient échouer. Le général Aoun se cantonna dans l’opposition.
Cette attitude a fait l’effet d’un choc sur les chrétiens...
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