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Actualités - OPINION

Comment pratiquer au Liban une diplomatie à la Talleyrand

Depuis un certain temps, les choses semblent devoir changer du côté de la Syrie. Sage décision ; elle aurait dû être prise il y a tout juste 30 ans. Aujourd’hui, la Syrie commence à mettre un peu plus d’eau douce dans son vinaigre ; elle a dû s’inspirer de cette pensée de saint François de Sales : « On attrape plus de mouches avec une cuillerée de miel qu’avec un tonneau de vinaigre. » Ce qui n’est pas loin de cette citation, de Talleyrand, cette fois. Concernant « les conseils judicieux que j’ai donnés à l’empereur, dit-il, il ne m’a jamais écouté ; ce fut sa chute irrémédiable. Ce fut Waterloo ! » Les choses vont bon train avec la Syrie, quoique lentement ; le va-et-vient de quelques diplmates syriens peut signifier qu’ils ont abandonné la politique d’un Khaddam pour adopter la méthode Talleyrand. Boileau a dit : « Faites-vous des amis prompts à vous censurer. » La Syrie borde nos frontières au Nord et à l’Est ; elle est pour le Liban le premier partenaire arabe ; le plus fraternel quand il est fraternel ; le plus hostile quand il est hostile ; le plus implacable quand il est implacable. En 1943 et 1946, la Syrie et le Liban ont accédé à l’indépendance. Dans les premières années de cette indépendance, la concertation et la coordination étaient à peu près parfaites entre les deux capitales. La première crise devait éclater sous le gouvernement de Khaled el-Azm, un richissime grand bourgeois qui, pour des raisons d’intérêt personnel (il était l’actionnaire majeur de la plus grande société industrielle et commerciale, la Khoumassia), a mis fin le 1er mars 1949 à l’union monétaire et douanière entre les deux pays. Le parallélisme en politique arabe et en politique étrangère a été cependant maintenu, tant bien que mal, jusqu’à l’intervention fracassante et l’union de la Syrie et de l’Égypte au sein de la République arabe unie, qui sera éphémère (1958-1961). La crise libanaise de 1958, encouragée et voulue par Damas, a donné un premier exemple de ce dont pouvait être capable la Syrie quand elle veut déstabiliser le Liban. Entre la crise de 1958 et l’année 1975, la Syrie a exercé sur le Liban des pressions politiques et économiques, le plus souvent par la fermeture des frontières, interrompant de ce fait non seulement le commerce syro-libanais, mais aussi le commerce de transit à partir du port de Beyrouth vers la Syrie, l’Irak, la Jordanie et l’Arabie saoudite, les pays du Golfe et même l’Iran. Donc, il y a eu toujours coordination, coopération, consultation et concertation : ce que le Liban a refusé par l’alignement officiel de sa politique sur celle de la Syrie. Ainsi, la Syrie n’a pas assisté en spectateur indifférent au développement de la guerre civile de 1975 ; elle a joué un rôle actif sur notre scène politique ; elle s’est immiscée dans l’élection de tous les présidents de la République en tentant par tous les moyens de paralyser leur action politique. En conclusion, il faut bien que le Liban apprenne à vivre avec sa voisine, sans oublier que nous avons également pour voisin Israël, toujours menaçant, redoutable, ayant pour objectif de réaliser le rêve de Salomon : celui d’une nation allant du Nil à l’Euphrate. Les Libanais ne sont nullement hostiles à une politique de rapprochement et d’excellent voisinage avec la Syrie, qui pourrait déboucher sur une véritable réconciliation, peut-être définitive, entre toutes les parties libanaises. Encore faut-il que la Syrie sache que le Liban ne se mettra jamais sur son orbite ; qu’elle doit respecter notre indépendance et notre souverainté. En retour, le Liban devra tenir compte des intérêts légitimes de la Syrie, qui nous trouvera toujours sur le chemin de l’honneur, de la dignité et de l’amitié sincère. Donc, entre la Syrie et le Liban, la compréhension devrait grandir et la coopération s’accentuer d’égal à égal s’agissant de deux États indépendants et souverains. Cela suppose une orientation générale de la politique syrienne quel que soit le régime qu’elle se choisira, pour peu qu’elle rejoigne notre conception du monde régional et international. Cela pourrait venir, tant que notre ardeur ne manquera pas à lutter pour ce beau Liban, un Liban pour tous les Libanais, pays d’accueil pour tous les Arabes. Brigadier François Génadry Ancien ministre, ancien commandant de l’École militaire
Depuis un certain temps, les choses semblent devoir changer du côté de la Syrie. Sage décision ; elle aurait dû être prise il y a tout juste 30 ans. Aujourd’hui, la Syrie commence à mettre un peu plus d’eau douce dans son vinaigre ; elle a dû s’inspirer de cette pensée de saint François de Sales : « On attrape plus de mouches avec une cuillerée de miel qu’avec un tonneau de vinaigre. » Ce qui n’est pas loin de cette citation, de Talleyrand, cette fois. Concernant « les conseils judicieux que j’ai donnés à l’empereur, dit-il, il ne m’a jamais écouté ; ce fut sa chute irrémédiable. Ce fut Waterloo ! »
Les choses vont bon train avec la Syrie, quoique lentement ; le va-et-vient de quelques diplmates syriens peut signifier qu’ils ont abandonné la politique d’un Khaddam pour adopter la méthode...