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FESTIVAL DE BYBLOS - Ouverture avec un spectacle franco-tunisien « Oum », le destin d’une voix et d’une nation(photo)

L’histoire d’Oum Koulsoum en ouverture du Festival international de Byblos pouvait paraître, de prime abord, comme un choix audacieux, voire risqué. Eh bien, au contraire, ce spectacle franco-égypto-tunisien, qui rend hommage à « l’astre de l’Orient », est, pour une inauguration hors des sentiers battus des traditionnels concerts, un coup de maître. Il annonce un programme éclectique, intéressant et ne s’engageant pas forcément sur la voie de la facilité.
Vendredi dernier donc, le public de Byblos a assisté à Oum, un très bon spectacle du metteur en scène tunisien Lotfi Achour, sur un texte de l’auteur égyptien Adel Hakim, inspiré du roman éponyme du journaliste libanais Sélim Nassib.
Oum est une évocation en paroles, en citations, en projection d’images, en musique et chants, de la vie de la diva égyptienne sur fond d’histoire de l’Égypte contemporaine. Interprété, en français et en arabe, par une troupe de comédiens français d’origine tunisienne, ce spectacle de 2h 20 mn est prenant. Ce qui, malgré cette longue durée sans entracte, ne rend que plus étonnante l’impatience manifestée par certains spectateurs qui n’ont pas attendu la fin pour se retirer !

Monstre sacré
Sur la scène aménagée à l’intérieur de la citadelle, au pied d’un mur datant des Croisés, les comédiens accompagnés de Afaf Reda, une chanteuse à la voix proche de celle de Oum et d’un musicien au qanun, ont transporté les spectateurs des rivages de Jbeil vers les bords du Nil, au siècle dernier, et dans l’intimité de celle qui gardait « suspendus à ses lèvres des millions d’hommes arabes ».
Cette « paysanne », comme se plaisait à la surnommer l’autre grande gloire musicale égyptienne, son rival Mohammed Abdel Wahab, devenue la diva incontestée du monde arabe, était, en effet, une personnalité fascinante. C’est ce que se sont attachés à montrer Adel Hakim et Lotfi Achour à travers le portrait, certes admiratif mais non complaisant, de cette femme toute vouée à son art, mais qui pouvait se montrer d’une révoltante sécheresse de cœur. Une femme taillée dans l’étoffe des monstres sacrés, vouée à la passion absolue du chant, à l’égocentrisme le plus extrême et au sens aigu de la psychologie des foules. Et une voix surtout. Une voix venue des entrailles, captivante au point qu’elle a été accusée, lors de la défaite de la guerre de juin 1967, d’avoir été l’opium du peuple, l’instrument de sa léthargie. Mais une voix qui a aussi galvanisé le peuple arabe lors des tournées triomphales qu’Oum Koulsoum a entreprises au début des années soixante-dix au profit de l’effort de guerre.

Parallèle
Traité à la manière d’une grande fresque épique, ce spectacle établit un parallèle entre le destin personnel de la chanteuse et celui de son pays. De ses débuts en 1923, un an après que l’Égypte eut arraché son indépendance aux Anglais, à la guerre d’octobre 1973, en passant par le règne du roi Farouk, la révolution, la prise de pouvoir de Gamal Abdel Nasser et la vague d’espoir et de changements qu’il suscite (nationalisations, justice sociale, unité arabe et libération de la Palestine), Oum Koulsoum reste durant toutes ces périodes la voix de l’Égypte. Figure majeure de la culture égyptienne, celle qui a été entourée des plus grands compositeurs et musiciens de son époque et pour laquelle le poète Ahmad Rami s’est voué corps et âme, était en fait l’incarnation de l’esprit de l’Égypte. Le symbole d’une identité arabe sublimée, celle qui essaye de se trouver au croisement de la tradition et de la modernité.
Servie par une mise en scène judicieusement simple, des décors et des costumes qui ont de l’allure, des pointes d’humour, des citations qui font mouche, Oum est de ces œuvres artistiques qui servent de catalyseur à la réflexion personnelle.

Zéna ZALZAL
L’histoire d’Oum Koulsoum en ouverture du Festival international de Byblos pouvait paraître, de prime abord, comme un choix audacieux, voire risqué. Eh bien, au contraire, ce spectacle franco-égypto-tunisien, qui rend hommage à « l’astre de l’Orient », est, pour une inauguration hors des sentiers battus des traditionnels concerts, un coup de maître. Il annonce un programme...