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Actualités - OPINION

En marge de deux centenaires Quand le haririsme se mêle du plus-que-parfait

Dans le doute de, il ne faut pas s’abstenir, il faut chercher l’inspiration au fil de l’actualité, comme les journalistes et les opérateurs en Bourse. La fin de l’année s’est en effet révélée fertile en commémorations : celle du centenaire de la naissance de Georges Naccache, célébrée par une fête de famille le 2O novembre, et celle du centenaire de la naissance de Fouad Chéhab, célébré, lui, le 29 décembre par des anonymes de l’État, et de l’Église. Il est vrai que notre histoire est riche de moments appartenant aux genres littéraires : ici par exemple, le comique de situation naît du heurt entre une phase politique appartenant en propre à la première république sous l’appellation de « chéhabisme » et le contexte haririen et haririste de la deuxième république issue de la fin du sommet de Taëf et restée, elle, sans chantre (malgré les velléités d’un Samir Frangié, vite repenti). 13 ans de cette dernière république (et ça continue) ont comme frappé de prescription ce qui fut l’histoire du Liban dit indépendant, couvert de ridicule les soubresauts réformistes des équipes Chéhab, Hélou, et autres Sarkis, ainsi que ce qui tentait d’être une culture de ces époques. La glorification, par Ghassan Tuéni et ses admirateurs, du « patrimoine » culturel n’est pas un acte d’histoire, mais une sourde réaction des chrétiens du Liban à l’odeur du pétrole wahabite et à la tutelle syrienne, réaction quasiment ethnologique d’une communauté politiquement humiliée pour avoir perdu le pouvoir et la préséance, et qui s’accroche à une culture du passé et à ses restes. La prise de pouvoir d’un Ghassan Salamé à la culture n’a pas, pour l’essentiel, d’autre sens. Revenons donc à Chéhab, Naccache et ce folklore très particulier qui marqua les années proprement chéhabiennes. Rien ne fut, par exemple, plus follement francophone que le régime de Chéhab qui recruta tout ce qui, dans le Beyrouth libanais de 1958 à 1964, parlait, écrivait et pensait, il faut bien le dire, en français ; à quoi s’agrégèrent des « experts » de nationalité carrément française dont un intendant qui s’occupa à merveille de ...« l’intendance » et du suivi des projets de l’Exécutif. Lui-même Saint-Cyrien, marié à une Française, maronite et, de surcroît, kesrouanais, Chéhab demandait à tout son monde de « phosphorer », selon son expression favorite, ce qui signifiait « avoir des idées ». Le ministère de l’Information se truffa ainsi de journalistes arrachés au secteur privé, l’État de « docteurs » plus ou moins bien formés, et le Parlement de quelques députés nouveaux, au passé politique vierge, suggérés et choisis par l’entourage de l’émir-président. De la « réforme », on parlait jusqu’à épuisement, tandis que la puissance du deuxième bureau de l’armée s’infiltrait dans le civil, sous prétexte que le pays ne connaissait pas d’autre corps au fonctionnement aussi intégré et intègre à la fois. Le nassérisme et le chamounisme entretenant une relation dialectique, les musulmans enfin (partiellement) réhabilités, les années Chéhab furent celles du mépris de la politicaillerie par un militaire, de la frustration des « très chrétiens », de cent et une promesses d’espoir pour naïfs et moins naïfs, et d’une moquerie coléreuse exercée par tout le personnel politique traditionnel qui prendra sa revanche aux législatives de 1968 sous le mandat du président Hélou. Mais, puisque l’informatique s’en est mêlée pour désordonner mes phrases, revenons à l’ordre haririen sous lequel nous vivons. Les Dix-sept ans d’une guerre que personne n’a voulu assumer parmi les Libanais de naissance ne pouvaient engendrer que du baroque. Et, tandis que le parapluie syrien se consolide, le baroque nous est venu en la personne d’un milliardaire saoudo-libanais originaire de Saïda qui commença à se faire un nom en tant que bienfaiteur municipal, pourrait-on dire, avant d’amorcer une carrière politique à la mesure de sa fortune et de sa mentalité. Ses qualités et ses amitiés nouées entre la péninsule arabique et la France de Chirac n’importent pas ici. Ce qui importe c’est, pour ainsi dire, l’atypie de Hariri. Sa puissance n’est comparable à celle d’aucun dirigeant du passé libanais, son profil sociologique non plus. Conscient de ses limites « sociales », il s’acculture et acculture volontiers sa famille à un Occident mâtiné de sunnisme coranique. Il ne considère pas qu’il existe un problème chrétien, pas plus que Husni Moubarak ne voit un « problème » dans la vaste communauté copte d’Égypte. Nous y reviendrons. Quant à Chéhab et Naccache, ces deux maronites qui auraient eu cent ans aujourd’hui, ils appartiennent à une autre réalité, à une autre histoire, à une autre vérité. Ni l’un ni l’autre ne fut tendre envers la Syrie, mais ni l’un ni l’autre, pas plus que quiconque, de 1943 à 2002, n’alla chercher fortune dans le désert ni ne revint « à l’américaine » dans son pays pour prendre le pouvoir. Nous parlerons dans un prochain texte du haririsme ; et voilà comment deux morts ont mené les touches de notre ordinateur, dans le désordre, à l’évocation du patron qui possède le Liban. La tutelle étrangère, elle, nous chercherons à expliquer comment la rendre acceptable, du moins pour l’intelligence. Celle de Marwan Hamadé par exemple, provisoirement ministre des Déplacés (que nous sommes tous, en fait...). Amal NACCACHE
Dans le doute de, il ne faut pas s’abstenir, il faut chercher l’inspiration au fil de l’actualité, comme les journalistes et les opérateurs en Bourse. La fin de l’année s’est en effet révélée fertile en commémorations : celle du centenaire de la naissance de Georges Naccache, célébrée par une fête de famille le 2O novembre, et celle du centenaire de la naissance de...