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Actualités - REPORTAGE

Journée mondiale de la femme - Campagne de MACMAG-GLIP axée cette année sur deux thèmes : pauvreté et citoyenneté On refuse toujours à la femme le droit d’octroi de la nationalité (photo)

Comme il serait bon que les Constitutions de nos pays arabes soient appliquées à la lettre ! Malheureusement, ces belles phrases demeurent lettre morte quand il s’agit de réalité. Prenez la question de l’octroi de la nationalité par exemple : il s’agit d’un droit fondamental du citoyen. Or, bien que nos belles Constitutions considèrent toutes que la femme est un citoyen à part entière, les lois des mêmes pays lui refusent presque à l’unanimité le droit de donner sa nationalité à son mari et ses enfants étrangers. Faut-il penser que nos législateurs souffrent d’un cas de dédoublement de personnalité ? C’est sur ce thème aussi délicat que tabou que l’association de recherches et de documentation MACMAG-GLIP a décidé de se pencher cette année. Cet organisme qui se caractérise par ses nombreux contacts dans les pays arabes a pris l’habitude de lancer ses campagnes annuelles en mars, prenant la journée internationale de la femme qui a été célébrée hier comme un tremplin. Après une première phase de préparatifs où de nombreuses sessions de formation ont été organisées avec des associations arabes, MACMAG-GLIP se lance aujourd’hui dans le travail par thème. Cette année, les deux thèmes choisis intéressent particulièrement les populations féminines : la pauvreté et la citoyenneté. Le second thème étant très vaste, c’est une de ses facettes, le droit d’octroi de la nationalité, qui sera sous étude cette année. Pourquoi avoir opté pour ce thème en particulier ? «La citoyenneté est une question essentielle de laquelle découlent toutes les autres discriminations», souligne Lina Abou Habib, présidente du MACMAG-GLIP. «Quant au sous-thème de la nationalité, il illustre on ne peut plus clairement la discrimination de l’État envers les femmes. De plus, il s’agit d’un sujet qu’on n’ouvre qu’à contrecœur. Enfin, cette injustice est cause de nombreux problèmes sociaux». En effet, selon Mme Abou Habib, quand une femme divorce d’un mari étranger ou qu’elle devient veuve avant que ses enfants n’atteignent la majorité, elle doit intenter un procès pour leur donner la nationalité libanaise. «Or, pour cela, il est indispensable qu’elle soit aisée et lettrée, ce qui n’est pas le cas de tout le monde», poursuit-elle. «Les mariages mixtes sont très fréquents dans les couches populaires. Il est souvent arrivé que des hommes se marient durant leur séjour au Liban et quittent ensuite le pays en coupant tout contact avec leur nouvelle famille. Les enfants qui naissent de telles unions se retrouvent sans nationalité puisqu’ils n’ont pas celle du père, et encore moins celle de leur mère qui n’a pas obtenu de séparation officielle. Ces cas sont beaucoup plus fréquents qu’on ne le pense : les enfants restent en situation illégale toute leur vie alors que leur mère est libanaise et qu’ils n’ont pas connu d’autre pays». Mme Abou Habib fait remarquer que c’est un droit dont le Libanais jouit ailleurs et qu’il refuse à d’autres. «Notre programme pour cette année comporte trois volets», poursuit-elle. «D’une part, nous allons mener une recherche-action (qui tire des conclusions applicables et cherche des solutions pratiques) à travers laquelle nous tenterons de cerner le problème d’un point de vue légal et de collecter le maximum d’informations quantitatives et qualitatives. Il s’agira pour nous de comprendre comment de telles situations sont vécues par les femmes, nous basant sur des témoignages qui détruiront les arguments absurdes qu’on oppose à tous ceux qui revendiquent ce droit». La campagne en tant que telle a deux objectifs : le premier est d’effectuer une sensibilisation sur la question et de mettre en évidence le lien entre privation de la nationalité et discrimination. Elle consistera en distribution de posters, de cartes postales et de pamphlets informatifs. Le second objectif est de mobiliser l’opinion : pour ce faire, une pétition devra circuler en vue d’être envoyée, ainsi que les résultats de la recherche-action, à toutes les instances publiques et internationales. «Ce qui est intéressant dans la question de la nationalité, c’est qu’elle commence à être débattue dans au moins deux pays, le Maroc et l’Égypte», dit Mme Abou Habib. «C’est une occasion en or de nous solidariser avec les militants de ces pays. Au cas où ils parviendraient à un résultat quelconque, nous pourrions considérer leur acquis comme un précédent heureux». La pauvreté : les femmes sont les premières atteintes L’autre thème sur lequel MACMAG-GLIP devra concentrer ses efforts cette année est la pauvreté, une triste réalité qui s’aggrave de plus en plus au sein des populations arabes. Or les femmes sont plus vulnérables que les hommes à l’appauvrissement. «Elles sont économiquement dépendantes dans des systèmes patriarcaux et elles constituent la majorité de celles qui travaillent dans les secteurs informels, donc plus exploitées et moins sujettes à profiter des prestations sociales», insiste Mme Abou Habib. L’association compte militer en faveur d’une alphabétisation économique de femmes issues d’un milieu populaire à travers un premier programme commencé dès l’année passée avec la Fondation Mouawad, financé par l’ambassade de Grande-Bretagne. L’idée est de former des formatrices au sein de la fondation (cette première phase est déjà terminée), qui se chargeront de diffuser des concepts économiques à leurs bénéficiaires au Liban-Nord et augmenter leur capacité dans le domaine. Ces notions seront inculquées aux bénéficiaires durant les cours d’alphabétisation que la Fondation Mouawad assure à ces femmes, leur donnant des outils de connaissance qui leur serviront autant sur le marché que dans leurs propres foyers. «L’objectif est de donner à ces femmes le moyen d’analyser leur situation financière précaire et de penser à des solutions possibles», explique la présidente de MACMAG-GLIP. Mais à quoi cela leur servira-t-il si le contexte dans lequel elles évoluent reste le même ? «Nous avons décidé de créer un petit fonds à l’intention de ces dames», précise-t-elle. «En prenant quelques cas pilotes, nous essaierons de comprendre ensemble à quel niveau résoudre les problèmes avec peu de moyens et beaucoup de lobbying. Nous tirerons tous des conclusions sur les conditions des femmes et pourrons les utiliser à un niveau plus vaste». Le fonds sera géré en tant que mutuelle par un comité formé de représentants de MACMAG-GLIP, de la Formation Mouawad et des bénéficiaires elles-mêmes. C’est ce comité qui décidera des critères d’acceptation. Si l’action du MACMAG-GLIP se limite au Liban, comment l’association pourra-t-elle satisfaire son ambition de mener une action panarabe ? «Nos collègues dans d’autres pays arabes pourront profiter de notre expérience sur le terrain, de la méthode employée, des témoignages de femmes que nous aurions récoltés», dit Mme Abou Habib. «Par ailleurs, une personne a déjà été chargée de rédiger en arabe un manuel de vulgarisation économique. Le seul en notre possession pour le moment avait été traduit de l’anglais. Le nouveau manuel sera plus adapté à la réalité libanaise et arabe en général». Suzanne BAAKLINI
Comme il serait bon que les Constitutions de nos pays arabes soient appliquées à la lettre ! Malheureusement, ces belles phrases demeurent lettre morte quand il s’agit de réalité. Prenez la question de l’octroi de la nationalité par exemple : il s’agit d’un droit fondamental du citoyen. Or, bien que nos belles Constitutions considèrent toutes que la femme est un citoyen...