Éva Joly quitte la magistrature pour la Norvège

La juge Éva Joly, qui a conduit l’enquête sur Elf, a demandé sa mise en disponibilité de la magistrature pour occuper un poste de conseillère spéciale du gouvernement norvégien chargée de la lutte contre la corruption, a-t-on appris hier au ministère de la Justice. D’origine norvégienne – son nom de jeune fille est Gro Raseth –, cette magistrate de 58 ans a précisé lors d’une conférence de presse à Oslo que sa décision de quitter la France n’était pas le résultat d’éventuelles frustrations face à la corruption. «Je ne démissionne pas par mécontentement ou en raison de pressions, je suis simplement arrivée au bout de la route avec l’enquête sur Elf», a-t-elle déclaré. Durant les sept années d’instruction sur l’affaire Elf, Éva Joly est devenue une figure médiatique symbolique de la lutte contre la corruption en France, mais s’est attirée des inimitiés chez les avocats ainsi que chez ses collègues. C’est le second magistrat spécialisé dans la lutte contre la corruption qui annonce son départ, après l’ex-juge d’instruction de Créteil Éric Halphen en janvier. Contrairement à ce dernier, Éva Joly n’a pas justifié son départ par les obstacles qui auraient été mis à son action mais plutôt par une envie de prendre de la distance, après la fin des investigations sur Elf le 4 février. Elle avait d’ailleurs laissé entendre qu’elle partirait. «Je m’autorise le changement, je m’autorise à arbitrer dans les propositions que je solliciterai dans mon propre intérêt», expliquait-elle le 8 février. Selon une source judiciaire, Éva Joly aurait sollicité en vain plusieurs postes dans la hiérarchie judiciaire avant d’opter pour une mise en disponibilité. Cette magistrate a plaidé plusieurs fois publiquement pour un renforcement des moyens de la justice et pour une plus grande détermination des pouvoirs publics dans la lutte contre la corruption. Elle a même publié en janvier 2001 un livre sur le sujet, Notre affaire à tous.