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Actualités - REPORTAGES

Violon d'Ingres... Le Dr Joseph Toutounji : contre la timidité, le théâtre(photo)

Le Dr Joseph Toutounji, qui n’est pas médecin malgré lui, est un timide qui se soigne. Sa thérapie, le théâtre. Difficile d’imaginer ce monsieur caché derrière sa blouse blanche en des lieux si différents. Des salles d’examens aux planches de théâtre, un seul raccourci, le talent. Joseph Toutounji est un homme à qui il est impossible de donner un âge précis. Grand adolescent, qui fut sans doute parmi les premiers de sa classe, ou jeune quadragénaire rentré prématurément dans le monde des grands, gardant en lui l’âme d’un adolescent. Le Dr Toutounji a plus de quarante ans et ne les fait pas ! Mais il «fait bien» son métier, qu’il porte sur son visage sérieux et sécurisant et jusque dans sa voix claire et rassurante. Et de cette même voix qui fait écho dans cette pièce aseptisée, il raconte, comme pour brouiller un peu mieux les pistes : «J’ai obtenu mon baccalauréat libanais avant de m’envoler en 1971 pour la Belgique, où j’ai entrepris des études de médecine à l’Université catholique de Louvain. Après avoir obtenu mon diplôme de médecine en 1978, j’y ai poursuivi ma spécialisation en radiologie diagnostique, jusqu’au diplôme en 1982». Parallèlement, il subit une formation complémentaire en scanner et échographie obstétricale et rentre au pays en 1983 pour porter au mieux sa blouse blanche et son savoir-faire. Son activité sera variée : il s’occupe du service radiologie et échographie dans différents hôpitaux, jusqu’aux années de guerre, dont celle, fatidique, de 1989. «Les événements qu’on connaît m’ont obligé à partir avec ma famille en Belgique pour trois ans. Là-bas, j’ai rejoint le service de radiologie à la clinique d’Arlon». Revenu en 1992, le Dr Toutounji intègre à plein temps l’hôpital Rizk, pour prendre en charge les départements d’échographie et de scanner. Depuis août 1999 , il s’occupe exclusivement du Cedim, centre privé de diagnostic dans lequel il est associé à deux autres confrères. Face au stress du travail – malades à examiner et prendre en charge, avec tout ce que cela implique de moments difficiles, nouvelles pénibles à affronter et annoncer –, le théâtre est venu, comme une réponse, une solution, presque une évidence, car «c’est difficile de vivre cela au quotidien». Faire quelque chose d’autre Le théâtre s’est donc imposé comme une sortie de secours lui permettant de s’échapper furtivement des couloirs hospitaliers, des lourdes responsabilités et des visages fermés. «C’est venu un petit peu comme ça… En 1993, lorsque je suis définitivement rentré au Liban, j’ai eu envie de prendre des cours de théâtre. Je cherchais un créneau. J’ai trouvé un atelier, celui de Nadine Mokdessi, qui enseignait le théâtre aux amateurs adultes que nous étions. Nous avons suivi quelques mois de cours, au rythme de deux fois par semaine, avec la complicité de mon cousin Jean-Pierre qui partageait les mêmes envies». L’atelier fut clôturé par une représentation Théâtres Multiples, des petits sketches qui ont plu. Tant et si bien qu’à la demande du Dr Mokhbat, le groupe donne une représentation publique au profit de la Société libanaise du sida. «Trouver, en plus, la bonne motivation et la juste cause nous a permis de récolter des fonds et d’exercer cette activité en nous faisant plaisir». Le lendemain de chaque représentation, le médecin endosse très facilement sa blouse immaculée et surtout sa crédibilité. «Connaissant la mentalité libanaise, je me suis posé quelques questions. Mais finalement, la plupart des gens ont été capables de faire la part des choses. D’autant plus que le bénévolat en faveur des malades rejoignait quelque part la médecine». Le groupe, qui devient presque une troupe, partageant les mêmes priorités, se retrouve avec Nadine Mokdessi pour de nouveaux projets. «L’envie de faire quelque chose d’autre à côté de nos différentes activités professionnelles allait de pair avec la nécessité pour nous tous de créer quelque chose dans le théâtre francophone libanais, combler un vide». Les pièces se suivent et ne se ressemblent pas, si ce n’est dans l’enthousiasme et l’humour qu’elles suscitent. Pour des raisons professionnelles et un calendrier chargé, le médecin ne participe pas aux deux pièces de Feydeau qui suivront, Tailleur pour dames et Un fil à la patte , mais l’envie de rejoindre les planches de théâtre le démange. Avec Le Dindon, du même Feydeau et la mise en scène de la même Nadine Mokdessi, il prend le rôle du mari trompeur trompé. En 1997, il renouvelle le plaisir avec Treize à table, où il interprète le rôle d’un médecin un peu porté sur la bouteille, un soir de réveillon de Noël. Il se porte absent l’année suivante, pour «Lorsque l’enfant paraît». Enfin, en 1999, le Dr Toutounji -M. Brochant nous invite à son Dîner de cons. «Étant de nature un peu timide, précise-t-il presque à regret, je pensais que le trac serait beaucoup plus sévère». Diagnostic quasi médical, l’acteur redevient médecin, ou le demeure : «Je pense que cette activité saine soigne un peu la timidité». Le traitement a réussi. Le malade – imaginaire – souffre moins de sa timidité, sans doute la cache-t-il mieux. Les spectateurs et les patients en sont également ravis.
Le Dr Joseph Toutounji, qui n’est pas médecin malgré lui, est un timide qui se soigne. Sa thérapie, le théâtre. Difficile d’imaginer ce monsieur caché derrière sa blouse blanche en des lieux si différents. Des salles d’examens aux planches de théâtre, un seul raccourci, le talent. Joseph Toutounji est un homme à qui il est impossible de donner un âge précis. Grand adolescent,...