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Actualités - ANALYSE

Affaires turques

Période difficile pour la Turquie, secouée ces derniers temps par l’affaire Öcalan et le renversement du gouvernement Yilmaz. Les deux crises, apparemment indépendantes, découlent en fait du même problème touchant une république qui fête cette année son 75e anniversaire: une crise politico-sociale assortie de ses maux qui caractérisent les pays dits émergents. La corruption de la classe politique, la montée du chômage, les violations des droits de l’homme et une dette extérieure exorbitante ne sont que la partie visible de l’iceberg. À cela vient s’ajouter la guerre non déclarée et néanmoins sanglante dans le Sud-Est anatolien contre un mouvement séparatiste kurde qui a fait en douze ans pas moins de 30 000 morts. L’affaire de Abdullah Öcalan, réfugié en Italie où il a demandé l’asile politique, a permis à Ankara de connaître la véritable approche européenne du problème kurde. L’Italie qui occupe le premier plan dans cette crise jouit en fait du soutien total de ses partenaires européens. Lors d’une réunion d’urgence des ministres européens des Affaires étrangères convoquée par Rome, l’Autrichien Thomas Klestil n’a pas hésité à déclarer que «l’affaire Öcalan est l’occasion propice pour une solution pacifique du problème kurde». Tout en reconnaissant la légitimité de la lutte contre le terrorisme, l’UE n’a pas oublié pour autant de rappeler au gouvernement turc les droits bafoués d’une «minorité» qui compte 12 millions de personnes sur une population totale de 62 millions. Ankara n’a eu que le soutien, certes inconditionnel mais réservé et froid, de la part des États-Unis, qui ont demandé incessamment l’extradition du chef rebelle. La position de l’UE est une véritable victoire politique pour Apo qui, privé d’une victoire militaire, a pompeusement déclaré qu’il renonçait à la lutte armée, avec à la clé la demande d’une autonomie et non plus d’une indépendance des provinces à majorité kurde. Signe des temps, le gouvernement Yilmaz est renversé en pleine affaire Öcalan. Le Parlement turc a voté une motion de censure contre le premier ministre «pour liens avec la mafia». Voilà un nouvel accroc parmi d’autres au système turc qui continue de dissuader Bruxelles d’ouvrir ses portes à la république laïque. Mesut Yilmaz, parachuté au poste de Premier ministre par les militaires pour contrer la poussée islamiste, a trop misé sur son animosité à l’égard de Tansu Ciller, une référence en matière de politiciens corrompus. Loin de ces incidents ponctuels, ce sont les relations turco-européennes qui ont été le plus lésées ces derniers temps. Une fois de plus, la Turquie a raté le coche et se voit à des années-lumières des exigences européennes. Son boycott officieux des produits italiens présage des relations tendues avec ses partenaires rêvés et constitue une atteinte aux règles en vigueur dans l’UE. Pour Ankara, la question cruciale reste l’intégration au sein de l’Union européenne. Pour Bruxelles, la réponse peut être à l’italienne : Chi lo sa ?
Période difficile pour la Turquie, secouée ces derniers temps par l’affaire Öcalan et le renversement du gouvernement Yilmaz. Les deux crises, apparemment indépendantes, découlent en fait du même problème touchant une république qui fête cette année son 75e anniversaire: une crise politico-sociale assortie de ses maux qui caractérisent les pays dits émergents. La corruption de la...