Actualités - CHRONOLOGIE
Primary colors Comme dans la vie
le 29 avril 1998 à 00h00
IL y a presque dix ans, un acteur, Ronald Reagan, était élu président des Etats-Unis. Aujourd’hui, un autre président, Bill Clinton, se retrouve, sous les traits de John Travolta, le héros ambigu d’un film officiellement de fiction, «Primary Colors». «Où sont les faits, où est la fiction?», interroge l’hebdomadaire «Time» face à ces allers-retours entre Hollywood et politique. Et pour boucler la boucle, John Travolta n’exclut pas une carrière politique «s’il pouvait être utile». La fiction rejoint la réalité. Dans «Wag the Dog», sorti à la fin de l’an dernier, des conseillers présidentiels inventaient un conflit pour détourner l’attention d’un scandale sexuel. Au même moment, Bill Clinton, accusé d’une relation sexuelle avec une jeune stagiaire de la Maison-Blanche, menaçait l’Irak d’un recours à la force. Maintenant, les Américains vont pouvoir voir un nouveau film qui leur rappellera leurs journaux télévisés présents et passés: la campagne victorieuse d’un candidat à la présidence apparemment incapable de résister à ses pulsions sexuelles. «Primary Colors», mis en scène par Mike Nichols, est adapté d’un roman à succès du même nom signé «Anonyme» dont l’auteur s’était révélé un commentateur de l’hebdomadaire «Newsweek», Joe Klein. Le film comme le roman évoque la campagne présidentielle d’un gouverneur du sud des Etats-Unis, Jack Stanton, qui ressemble comme deux gouttes d’eau à Bill Clinton. Comme Bill Clinton, Jack Stanton a échappé à la conscription au moment de la guerre du Vietnam. Comme Bill Clinton, il est accusé d’une relation sexuelle illégitime à la veille d’une cruciale élection primaire et comme Bill et Hillary Clinton, Jack et Susan Stanton (interprétée par Emma Thompson) apparaissent à la télévision la main dans la main pour rassurer les Américains sur la profondeur de leur relation. Coups bas John Travolta campe un Bill Clinton plus vrai que nature: ses cheveux gris, son accent du sud, ses mimiques, sa démarche évoquent presque un numéro d’imitateur. «C’est effrayant. C’est presque comme si (Bill Clinton) était la vedette du film», a dit l’acteur au magazine «Los Angeles». Un des autres interprètes de «Primary Colors», l’acteur britannique Adrian Lester, a déclaré à la même revue: «Chaque fois que je voyais Clinton à la télévision, je pensais: «Mon Dieu, il ressemble à John, il parle comme John»». Mike Nichols dément que son film soit le compte-rendu de la campagne présidentielle de Bill Clinton en 1992: «L’histoire ne fonctionne pas si elle est littéralement l’histoire des Clinton. Elle fonctionne si elle évoque un processus politique et les gens qui en font partie». Néanmoins, c’est sur la personnalité de leur président et sur sa relation avec son épouse Hillary (dans le film l’épouse gifle son mari accusé d’infidélité) que le spectateur est amené à s’interroger. «Primary Colors» ne se prononce pas sur la véracité des accusations portées contre Jack Stanton et que celui-ci, comme Bill Clinton, dément sans vraiment convaincre. Le candidat Stanton évolue dans un monde où la fin justifie les moyens. Les coups bas sont parfois justifiés et si Jack Stanton ment, c’est parce qu’il veut le bien de ses compatriotes. John Travolta a estimé qu’il faut «être aveugle pour ne pas voir que le film favorise Clinton». L’hebdomadaire «Time», qui avait consacré sa «une» au film, était plus nuancé dans son jugement sur Bill Clinton/Jack Stanton: «Idéaliste et cynique, moraliste et séducteur, disant mensonge et vérité, romantique à la larme facile, capable de vous poignarder dans le dos sans sourciller, c’est un tout inséparable. Peut-être le dirigeant qui nous convient aujourd’hui est celui que rien n’arrête, celui qui peut être absolument sincère tout en mentant avec aplomb». (AFP)
IL y a presque dix ans, un acteur, Ronald Reagan, était élu président des Etats-Unis. Aujourd’hui, un autre président, Bill Clinton, se retrouve, sous les traits de John Travolta, le héros ambigu d’un film officiellement de fiction, «Primary Colors». «Où sont les faits, où est la fiction?», interroge l’hebdomadaire «Time» face à ces allers-retours entre Hollywood et politique. Et pour boucler la boucle, John Travolta n’exclut pas une carrière politique «s’il pouvait être utile». La fiction rejoint la réalité. Dans «Wag the Dog», sorti à la fin de l’an dernier, des conseillers présidentiels inventaient un conflit pour détourner l’attention d’un scandale sexuel. Au même moment, Bill Clinton, accusé d’une relation sexuelle avec une jeune stagiaire de la Maison-Blanche, menaçait l’Irak d’un...