Actualités - REPORTAGE
Laisser mourir les arbres fruitiers
Par KHODR Patricia, le 17 novembre 1998 à 00h00
M. Hani Mahfouz, pisciculteur, a ouvert son restaurant tout près de l’une des quatre cascades de l’Oronte. Enseignant en mathématiques et chimie dans une école de la région, il a hérité de «beaucoup» de terrains qu’il n’arrive plus à exploiter. Le restaurant représente actuellement son unique projet. Il l’a placé sur Internet «pour la publicité». Dans le but d’encourager le tourisme et dans le cadre de l’année gastronomique organisée par le ministère du Tourisme, vingt restaurants (dont le sien) ont participé cet été à un festival. «Nous avons invité la presse, le ministre du Tourisme qui a prononcé un très beau discours sans avancer des suggestions. Les télévisions sont venues mais elles n’ont pas couvert l’événement», rapporte-t-il. «Il y a une semaine, des touristes européens sont arrivés dans mon restaurant munis d’une carte du Liban où le Hermel et Baalbeck sont marqués en rouge», s’indigne-t-il. «Durant toute la guerre, nous n’avons pas tué des étrangers et nous n’avons pas perpétré de massacres de personnes étrangères à notre communauté», poursuit-il. M. Mahfouz est actuellement propriétaire de plusieurs vergers, dont l’un riche de 50 000 abricotiers. «J’ai laissé les arbres mourir ; en prendre soin aurait nécessité des frais énormes : il faut payer le tracteur, la main-d’œuvre, l’engrais et l’irrigation», dit-il. «Exploiter les terrains est plus cher que vendre la marchandise». Et de souligner «Je ne suis pas le seul dans cette situation, je fais partie des 90% de propriétaires terriens du Hermel qui ont cessé, eux aussi, de s’occuper de leurs terres». Il souligne : «De plus nous sommes incapables d’écouler notre marchandise car la loi ne nous protège pas». Pour lui, «ce sera toujours la même histoire, avec les pastèques ou les tomates ; aucune loi ne protègera les agriculteurs du Hermel». «Le gouvernement préfère importer plutôt que d’acheter notre production et protéger notre marchandise», affirme-t-il. M. Mahfouz a quatre frères, l’un établi au Canada un autre en France. Deux autres frères se sont installés à Beyrouth. Lui qui n’est pas marié est resté au Hermel pour s’occuper de sa mère. à maintes reprises, il a pensé émigrer mais il ne pouvait pas quitter sa «terre natale». Il a acheté pour ses 90 élèves des manuels à 3 000 livres l’un. Il sait qu’ils ne pourront jamais les rembourser. Il souligne : «Bien que je ne sois pas riche, ma situation est de loin meilleure que celle de nombre d’habitants du Hermel». «Dans mon village, il y a des personnes qui manquent de tout», relève-t-il, avant de noter que «le gouvernement se doit d’exécuter des projets de développement, dans la région, notamment le barrage de l’Oronte». «Ce ne sont pas les seuls habitants du Hermel qui en profiteront mais aussi ceux de Ras- Baalbeck et du Kaa qui sont obligés, comme les habitants de Hermel, d’aller travailler à Zahlé ou à Beyrouth pour survivre», dit-il.
M. Hani Mahfouz, pisciculteur, a ouvert son restaurant tout près de l’une des quatre cascades de l’Oronte. Enseignant en mathématiques et chimie dans une école de la région, il a hérité de «beaucoup» de terrains qu’il n’arrive plus à exploiter. Le restaurant représente actuellement son unique projet. Il l’a placé sur Internet «pour la publicité». Dans le but d’encourager le tourisme et dans le cadre de l’année gastronomique organisée par le ministère du Tourisme, vingt restaurants (dont le sien) ont participé cet été à un festival. «Nous avons invité la presse, le ministre du Tourisme qui a prononcé un très beau discours sans avancer des suggestions. Les télévisions sont venues mais elles n’ont pas couvert l’événement», rapporte-t-il. «Il y a une semaine, des touristes européens sont...