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Actualités - CHRONOLOGIE

La rupture entre Hraoui et Berry paraît consommée

Rien ne va plus entre les pôles de la «troïka», et plus particulièrement entre le chef de l’Etat, le président Elias Hraoui, et le chef du Législatif Nabih Berry. La gravité des divergences qui ont éclaté au grand jour entre le président de la République et M. Berry ne réside pas dans le fait en tant que tel — car, en définitive, un tel différend pourrait s’inscrire dans le cadre du jeu politique traditionnel sur la scène locale. Elle réside plutôt dans cette obstination manifeste à étaler ces divergences sur les colonnes des journaux et en tête des bulletins d’information des médias audiovisuels.
La polémique entre le chef de l’Etat et le président de la Chambre s’est envenimée au cours des dernières vingt-quatre heures à la suite des «indiscrétions» qui ont été filtrées à la presse au sujet des propos que le président Hraoui a tenus hier devant certains députés qu’il a reçus dans la matinée au palais de Baabda, dans le cadre des audiences hebdomadaires accordées aux députés.
L’Agence nationale d’information (officielle) a notamment rapporté que le chef de l’Etat a exprimé devant les parlementaires son irritation à la suite de la déclaration faite mercredi par M. Berry, déclaration dans laquelle celui-ci avait affirmé que «le divorce est consommé à la manière druze entre les pôles de la troïka». «Un mariage temporaire à la chiite («Zawaj el-Mouta’a») est cependant toujours possible», avait souligné M. Berry.
Ces allusions au «divorce à la druze» et au «mariage temporaire à la chiite» ont été jugées outrancières par le président Hraoui. «Il est inadmissible de s’abaisser à un tel niveau, d’autant que cela porte préjudice au pays, a déclaré le chef de l’Etat. Il est inconcevable, dans les circonstances délicates présentes, que de tels propos extrémistes soient tenus et rapportés dans les colonnes des journaux». Répondant à M. Berry qui avait déclaré que la troïka est morte et enterrée, le président Hraoui a rappelé qu’il n’avait jamais reconnu l’existence de la troïka au niveau du pouvoir. «Ce terme, a-t-il précisé, a été lancé lors du voyage que j’avais effectué en 1991 à New York avec le chef du Législatif et le premier ministre».
Le président Hraoui s’est d’autre part montré irrité par le fait que des critiques acerbes sont formulés à son égard chaque fois qu’il donne son point de vue sur un sujet déterminé. «Cela est mon droit, en tant que garant de la Constitution», a affirmé le chef de l’Etat qui a ajouté, par ailleurs: «Je me suis adressé au Conseil des ministres hier (mercredi) en préservant le droit de tous et en sauvegardant le rôle des institutions constitutionnelles. Chacun de nous doit respecter ses droits et connaître ses limites à l’égard de la Constitution, sans pour autant être blessant».
Tout en réaffirmant son souci de collaborer avec toutes les parties, le chef de l’Etat a placé son différend avec M. Berry dans le seul contexte des amendements constitutionnels. Le président Hraoui a souligné sur ce plan qu’il est déterminé à aller jusqu’au bout dans son projet d’amendement de certains articles de la Constitution. En conclusion, le chef de l’Etat a exprimé la crainte qu’Israël «accentue ses pressions contre la Syrie et le Liban à la suite de la conclusion de l’accord sur Hébron». Il a mis en garde à ce sujet contre «des opérations sécuritaires» que l’Etat hébreu pourrait mener «dans toutes les régions libanaises», mais il a exclu une attaque militaire d’envergure ou une invasion en bonne et due forme.

La réponse de Berry

En soirée, les «milieux du chef du Législatif» ont communiqué à la presse et aux médias audiovisuels une réponse particulièrement virulente aux propos tenus le matin par le président Hraoui devant les députés. «Le président Berry a accepté le principe de la troïka comme formule pour faciliter la coopération entre les institutions, soulignent les milieux du chef du Législatif. Mais lorsqu’il a réalisé que cette formule servait de couverture pour imposer une hégémonie sur les institutions, pour camoufler les détournements de fonds, pour violer les lois et pour marginaliser les institutions, il a annoncé que la troïka n’existait plus. Il a enterré la troïka lorsqu’il a découvert que ceux qui prétendaient préserver la dignité des institutions ne faisaient que bafouer, par leur attitude, la dignité des institutions. C’est pour retourner à l’esprit des lois qu’il a enterré la troïka, laquelle avait d’ailleurs été sabotée et défigurée par les autres».
Répondant, en outre, aux propos du président Hraoui qui avait placé son différend avec M. Berry dans le cadre du dossier des amendements constitutionnels, les milieux de M. Berry ont mis le président Hraoui au défi d’aller de l’avant dans le projet d’amendements constitutionnels. «Désormais, ont souligné également les sources de M. Berry, il faudra réclamer des comptes à chaque entorse ou débordement. S’il n’existe pas de garde-fou, cela ne signifie pas qu’il ne faut pas mettre un terme aux abus et aux débordements qui se produisent dans le pays».
A l’évidence, la polémique et les surenchères ont dépassé le seuil acceptable et traditionnel. De sorte qu’en fin de soirée, certains milieux loyalistes n’excluaient pas qu’un médiateur syrien intervienne sous peu afin de mettre un terme à la dégradation dans les rapports entre les membres de la troïka.
Rien ne va plus entre les pôles de la «troïka», et plus particulièrement entre le chef de l’Etat, le président Elias Hraoui, et le chef du Législatif Nabih Berry. La gravité des divergences qui ont éclaté au grand jour entre le président de la République et M. Berry ne réside pas dans le fait en tant que tel — car, en définitive, un tel différend pourrait...