Cette opération témoigne des tâtonnements d’une politique africaine qui se cherche, hésitant entre un «non interventionnisme» proclamé et la tentation récurrente de marquer sa prééminence dans ce qui fut sa zone d’influence privilégiée.
La mort de deux militaires français tués par des mutins centrafricains a obligé Paris à se départir d’une neutralité affichée qui lui permettait jusqu’ici de maintenir une zone-tampon entre mutins et loyalistes et de favoriser la médiation africaine.
Le président Jacques Chirac, qui avait proclamé le 13 novembre que «la période des interventions unilatérales en Afrique était close», avait affirmé au dernier sommet franco-africain à Ouagadougou que l’armée française à Bangui ne pouvait «en aucun cas être partie prenante» au conflit.
La mutinerie militaire déclenchée le 15 novembre est la troisième en huit mois contre le président Ange-Félix Patassé, dont les mutins réclament la démission.
Bien que qualifiée d’opération de «légitime défense», l’action des militaires français à Bangui a suscité de vives réactions de l’opposition centrafricaine. Elle a également été exploitée par le chef de la rébellion zaïroise, Laurent Désiré Kabila, qui accuse la France d’aider militairement le régime du président Mobutu Sese Seko.
Il a saisi cette occasion pour déclarer: «Nous sommes contre les interventions étrangères. C’est aux Centrafricains de régler leurs problèmes, sans intervention de forces étrangères».
A Paris, le chef de l’opposition socialiste Lionel Jospin a mis en garde le gouvernement contre le risque d’un «engrenage militaire» en Centrafrique. Il a dit craindre «la montée d’un puissant sentiment antifrançais en Centrafrique».
Rappelant qu’à deux reprises, l’an dernier, la France était intervenue militairement dans ce pays, il a souligné que l’accord de défense de la France avec le Centrafrique «n’est pas un accord de police».
Les accords de défense conclus avec le Centrafrique, qui abrite la deuxième plus grande base militaire française en Afrique après Djibouti, ont, à l’instar d’autres conclus avec les pays africains après leur accession à l’indépendance, une formulation très vague permettant diverses interprétations.
Théoriquement conçus pour défendre des pays alliés contre des dangers extérieurs, ils ont souvent servi par le passé à défendre les régimes en place, favorables à la France.
Cependant, depuis la démocratisation d’un grand nombre de pays africains, la justification des interventions est devenue de plus en plus laborieuse.
Selon le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, la politique française actuelle en Centrafrique vise à «la sauvegarde du processus démocratique et à la stabilité politique» du pays, ainsi qu’à «la protection des ressortissants français et étrangers».
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