Un homme circule à moto à l’entrée du camp de Yarmouk pour réfugiés palestiniens, dans le sud de Damas, le 22 mai 2025. Louai BESHARA/AFP
Les autorités syriennes ont imposé des « restrictions » aux groupes palestiniens proches du pouvoir déchu et de l'Iran, dont des chefs ont quitté Damas, une exigence de Washington avant la levée des sanctions contre la Syrie, ont indiqué des responsables palestiniens à l'AFP vendredi. Le changement de la donne régionale s'est également traduit au Liban où le désarmement des camps palestiniens, qui échappent depuis des décennies à l'autorité de l'Etat, va commencer à la mi-juin, selon un responsable gouvernemental.
Les factions palestiniennes alliées à Damas et Téhéran jouissaient d'une liberté de mouvement en Syrie sous Bachar el-Assad, qui faisait partie de « l'axe de la résistance » des alliés de l'Iran face à Israël. « La plupart des chefs des factions palestiniennes soutenues par l'Iran ont quitté Damas », a déclaré à l'AFP un haut responsable d'une faction pro-iranienne qui a quitté la Syrie après le renversement de l'ancien pouvoir par des islamistes en décembre. Ces factions « ont entièrement remis leurs armes » aux autorités, a précisé un autre responsable qui a requis l'anonymat.
Interrogées par l'AFP, les autorités syriennes n'ont pas commenté. Le président américain, Donald Trump, qui a levé les sanctions imposées au régime syrien déchu, a demandé au président intérimaire syrien, Ahmad el-Chareh, qu'il a rencontré la semaine dernière en Arabie saoudite d'expulser « les terroristes palestiniens ». Avant la guerre civile qui a éclaté quand Assad a réprimé dans le sang un soulèvement populaire en 2011, les Palestiniens en Syrie, descendants de réfugiés de la première guerre israélo-arabe de 1948, étaient estimés à plus d'un demi-million.
Le pouvoir syrien était accusé de vouloir instrumentaliser les organisations palestiniennes présentes à Damas.
Permanences fermées
Les chefs qui ont quitté la Syrie sont notamment Khaled Jibril, fils du fondateur du Front populaire de libération de la Palestine - Commandement général (FPLP-CG), Khaled Abdel Majid, secrétaire général du Front de lutte populaire palestinien (FLPP), ainsi que Ziyad al-Saghir, chef du Fatah-Intifada. Le FPLP-CG avait participé, aux côtés des forces de Bachar al-Assad, aux combats pendant la guerre civile en Syrie dans le camp palestinien de Yarmouk, au sud de Damas.
Dans ce camp presque entièrement détruit, les drapeaux des factions palestiniennes ont disparu à l'entrée, et les locaux de ces groupes semblaient fermés sans présence de combattants à proximité, selon des photographes de l'AFP. Les permanences de ces groupes à Damas étaient également fermées, ont-ils constaté. Le 3 mai, Talal Naji, secrétaire général du FPLP-CG, avait été brièvement arrêté. L'un des responsable palestiniens a précisé que les dirigeants de ces factions n'avaient reçu aucune demande officielle de quitter la Syrie, mais que « leurs biens et ressources avaient été confisqués, certains de leurs cadres arrêtés ». « Ces factions sont désormais interdites de facto de travailler » en Syrie, a-t-il ajouté.
Un autre responsable palestinien a indiqué que les autorités syriennes avaient confisqué les biens de la plupart des factions, « comme les maisons, les permanences, les voitures et les camps d'entrainement ». Le FPLP-CG est désormais « incapable de verser les allocations aux familles de combattants tués », selon lui. Une troisième source palestinienne à Damas a déclaré à l'AFP qu'après la chute d'Assad, « nous avons nous-mêmes collecté les armes de nos éléments et les avons rendues (...) », mais nous avons gardé des armes légères individuelles pour la protection et non pour le combat, avec l'approbation » des autorités.
« Aucune coopération »
« Il n’existe plus aucune coopération entre la plupart des factions palestiniennes et la nouvelle administration syrienne », a déclaré un autre responsable palestinien, appartenant à un groupe disposant encore d’une présence limitée à Damas. Outre ces groupes, les autorités syriennes avaient arrêté en avril deux responsables de la branche armée d'une autre organisation palestinienne pro-iranienne, le Jihad islamique.
Au Liban, où le président palestinien Mahmoud Abbas effectue sa première visite officielle depuis 2017, selon des informations obtenues vendredi par L'Orient-Le Jour auprès d'une source proche du Sérail, un mécanisme a été mis en place pour le retrait des armes dans les camps palestiniens, qui se fera de manière progressive. La première phase débutera à la mi-juin dans les camps de Beyrouth : Bourj el-Barajneh, Chatila et Mar Elias. Ce sera au tour des camps de la Békaa et du Nord (Jalil et Beddaoui), au début du mois de juillet. Puis viendra la troisième phase, dans les autres camps du Sud. Le tout se fera sur la base d’un accord entre les autorités libanaises et les factions palestiniennes. Concernant le Hamas, des discussions auront lieu avec le mouvement islamiste à ce sujet, et une fois le processus lancé, ni lui ni les autres factions ne seront en mesure de le bloquer. En cas d'obstruction, des pressions seront exercées et certaines parties arabes et régionales aident le Liban à convaincre le Hamas de remettre ses armes.
Dans ce contexte, le Comité de dialogue libano-palestinien présidé par Ramez Dimachkiyé et chargé du suivi de la situation dans les camps palestiniens au Liban, a tenu sa première réunion vendredi à Beyrouth, avec la participation du Premier ministre Nawaf Salam. M. Salam a donné « ses instructions pour accélérer les démarches pratiques à travers l’établissement d’un mécanisme d’exécution clair et selon un calendrier défini » pour le désarmement des camps palestiniens au Liban, indique un communiqué parvenu à notre publication.