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Politique - Diplomatie

Le Liban doit « apprendre de Chareh » : cette phrase pleine de sous-entendus d’Ortagus

L’émissaire américaine attendue de nouveau à Beyrouth vers la fin du mois.

Le Liban doit « apprendre de Chareh » : cette phrase pleine de sous-entendus d’Ortagus

L’émissaire américaine, Morgan Ortagus, à Baabda, le 7 février 2025. Photo tirée du compte X de la présidence de la République

Morgan Ortagus, émissaire américaine au Liban, a accordé jeudi soir une interview à la chaîne locale LBCI, dans laquelle elle a été interrogée sur l’impact sur le Liban de la visite du président Donald Trump au Moyen-Orient et de certaines de ses déclarations significatives, comme celle sur la levée des sanctions contre la Syrie. « Le président Trump a décidé que sa première visite à l’étranger au cours de son mandat sera au Moyen-Orient, ce qui montre l’importance qu’il accorde à cette région, aux pays du Golfe et à l’Arabie saoudite en particulier », a-t-elle déclaré. « Quels que soient les défis au Moyen-Orient, nous travaillerons étroitement avec l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Qatar pour les résoudre », a-t-elle martelé. Interrogée sur le Liban, Mme Ortagus a souligné qu’ « autant les États-Unis que les pays du Golfe ont été clairs avec ce pays : la voie vers une prospérité comme il n’en a jamais connu passe par le désarmement du Hezbollah, pas au sud du Litani mais sur tout le territoire ».

Sur l’impact sur le Liban de la levée des sanctions contre la Syrie, la diplomate américaine a été catégorique : « Le Liban pourrait apprendre du (président syrien Ahmad) el-Chareh et de la manière dont il a collaboré avec l’Arabie saoudite pour entrer en contact avec le président Trump et notre équipe en vue de démontrer les bénéfices de la levée des sanctions contre son pays. » Et d’ajouter : « Je crois que Chareh comprend que la voie que doit emprunter la Syrie ne passe pas par la guerre avec ses voisins, qu’il s’agisse du Liban ou d’Israël ou de quelque autre pays. Il a compris qu’il doit rechercher la paix. »

Ces propos interviennent alors que les événements dans la région évoluent à un rythme très rapide. La Syrie semble être la plus concernée par ces développements, par les mesures qu’elle prend, ce qui s’est traduit par la visite du président Ahmad el-Chareh en Arabie saoudite et sa rencontre avec Donald Trump. Cette rencontre devait initialement inclure le Liban, mais cela n’a pas eu lieu. Depuis les préparatifs de ce sommet tripartite, il était prévu qu’il soit quadripartite avec la participation du président libanais Joseph Aoun. Aucune réponse claire n’a été donnée quant à l’absence de ce dernier et l’on se demande si cela ne traduit pas une volonté de faire porter au Liban la responsabilité de son retard à rejoindre cette nouvelle dynamique régionale. En effet, il semble que le Liban attend toujours les répercussions de ces développements régionaux sur lui et surtout l’issue du dialogue irano-américain. Les points de vue sont divisés à ce sujet. Certains estiment que Téhéran pourrait en cas d’accord demander au Hezbollah de remettre ses armes. Le parti, lui, parie plutôt sur le fait que ce scénario contribuerait à le soulager et lui permettrait de conserver ses armes, tant que cet accord politique garantit la sécurité et la stabilité dans le sud du Liban.

Décision prise à l’international

En attendant, ce qui est connu est désormais d’une clarté extrême et déclaré publiquement par les États-Unis. Donald Trump l’a exprimé clairement : il est nécessaire de se libérer de l’emprise du Hezbollah. Morgan Ortagus a également affirmé qu’il fallait désarmer le Hezbollah sur l’ensemble du territoire libanais. Le Liban est conscient qu’une décision internationale majeure a été prise à ce sujet. Au sein du Hezbollah, certains reconnaissent cette réalité, tandis que d’autres refusent même d’envisager une telle possibilité.

La responsabilité est donc rejetée sur l’État libanais et sur ce qu’il peut entreprendre pour atteindre cet objectif. Dans ce contexte, l’armée poursuit sa mission au sud du fleuve Litani, notamment les opérations de perquisition et de récupération d’armes. Il est à noter qu’environ 90 % de toute l’infrastructure militaire du Hezbollah dans cette zone a déjà été démantelée. Des signaux ont été adressés au Liban, l’incitant à annoncer les résultats obtenus jusqu’à présent et à proclamer prochainement la fin complète des opérations de démantèlement et de retrait des armes au sud du fleuve.

Il est attendu que la pression internationale pour étendre les opérations de perquisitions et de démantèlement au nord du fleuve Litani augmente dans une deuxième étape. Toutefois, c’est une démarche que le Hezbollah rejette catégoriquement pour le moment. Le Liban, de son côté, redoute un affrontement direct entre le Hezbollah et l’armée. Cette étape est donc liée à la poursuite d’un dialogue ou d’un débat calme avec le parti chiite, conformément à la vision du président de la République. D’après nos informations, ce dialogue devrait s’intensifier après les municipales, avec l’implication du président du Parlement, Nabih Berry, qui jouerait un rôle de médiateur pour définir un cadre général en vue de confiner les armes aux seules mains de l’État.

À ce stade, le Hezbollah fixe ses propres priorités pour ce dialogue. Il exige d’abord le retrait complet d’Israël des territoires libanais. Ensuite, il souhaite obtenir des garanties contre toute frappe militaire ou opération d’assassinat. Puis, il faudra, selon lui, s’attaquer au démantèlement de l’arsenal palestinien au Liban. Enfin, le processus pourrait aboutir à l’élaboration d’une stratégie de défense nationale dans laquelle les armes du Hezbollah seraient placées sous l’autorité de l’État. Toutefois, ces priorités du Hezbollah sont en total décalage avec celles des États-Unis. Selon nos informations, la pression US va s’intensifier pour désarmer le Hezbollah avant tout retrait israélien. Washington justifie cela en affirmant que les Israéliens craignent pour la sécurité de leurs habitants, ce qui explique leur refus de quitter les cinq collines toujours occupées au Liban-Sud tant que le Hezbollah ne sera pas entièrement désarmé.

Morgan Ortagus a d’ailleurs donné le ton dans son interview. En réponse à une question, elle a estimé que ce n’est pas l’occupation israélienne de ces cinq points, malgré le cessez-le-feu de novembre 2024, qui sert de justification au Hezbollah pour garder ses armes. « Ce parti n’a pas eu besoin de justification pour s’armer pendant les dernières quarante ans, et durant les dernières vingt années, il a entraîné le peuple libanais, et le peuple du Sud en particulier, contre leur gré, dans deux guerres destructrices avec Israël », a-t-elle lancé.

Ortagus de retour

Dans ce contexte, le Liban attend la nouvelle visite d’Ortagus, prévue vers la fin de ce mois. Des sources indiquent que ce déplacement sera consacré à l’évaluation des progrès réalisés par l’armée jusqu’à présent, à l’annonce de la fin du travail dans le sud du Litani et au passage au nord de celui-ci. De plus, des conditions seront fixées concernant le déploiement de l’armée dans le nord du Litani, notamment sur les routes principales, avec la mise en place de postes fixes ou mobiles sur toutes les voies que le Hezbollah pourrait utiliser pour reconstruire ses capacités militaires ou faire passer des armes. Ortagus mettra également l’accent sur le programme de réformes et la nécessité de son adoption, apprend-on de même source.

En somme, ce qui est requis internationalement pour le Liban est clair : adopter les réformes nécessaires, réaliser le monopole de l’État sur les armes, puis engager des négociations visant à « établir la paix », selon l’objectif de Trump, tandis que le Liban persiste à souligner sa disposition à respecter l’Accord d’armistice de 1949. Pour Morgan Ortagus, les accords d’Abraham sont « une grande réussite du premier mandat de Trump ». « Sa politique est celle de la paix, voilà pourquoi il nous a demandé de négocier avec l’Iran », a-t-elle dit à la LBC. « Nous souhaitons la paix pour tout le monde, pas seulement pour le Liban. Mais la paix ne peut venir qu’avec la force, et en ce sens je pense qu’il sera un président historique, et le président Aoun peut l’être aussi »....

Morgan Ortagus, émissaire américaine au Liban, a accordé jeudi soir une interview à la chaîne locale LBCI, dans laquelle elle a été interrogée sur l’impact sur le Liban de la visite du président Donald Trump au Moyen-Orient et de certaines de ses déclarations significatives, comme celle sur la levée des sanctions contre la Syrie. « Le président Trump a décidé que sa première visite à l’étranger au cours de son mandat sera au Moyen-Orient, ce qui montre l’importance qu’il accorde à cette région, aux pays du Golfe et à l’Arabie saoudite en particulier », a-t-elle déclaré. « Quels que soient les défis au Moyen-Orient, nous travaillerons étroitement avec l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Qatar pour les résoudre », a-t-elle martelé. Interrogée sur le Liban, Mme Ortagus a souligné...
commentaires (10)

Est-ce que Madame Ortagus ne rêverait pas d'une nouvelle et belle guerre civile au Liban ?

Fredo

21 h 32, le 18 mai 2025

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Commentaires (10)

  • Est-ce que Madame Ortagus ne rêverait pas d'une nouvelle et belle guerre civile au Liban ?

    Fredo

    21 h 32, le 18 mai 2025

  • Les armes restituées,Hezbollah force politique entre en scène ,les coupables du port arrêtés,les videurs de coffres et d’épargne des Libanais ciblés et arrêtés ,la banque Kard El Hassan passe par la banque centrale,et tout rentrera dans l’ordre pour ne plus donner d’excuse à nos politiciens et administrateurs sur le fait de rembourser leurs victimes épargnantes !

    PROFIL BAS

    15 h 48, le 18 mai 2025

  • le sort des armes du Hezbollah est acté. Les US exigent du Liban un engagement sur la normalisation avec Israel

    Kaldany Antoine

    06 h 32, le 18 mai 2025

  • S'il est vrai que les armes du Hezbollah sont un gros probleme au Liban, il est loin d'être le seul. Il ne faut pas négliger l'arrogance et l'incompétence de ceux qui composent aujourd'hui ses élites politiques et bancaires, qui se pensent toujours intouchables et qui profitent de l'agitation pour essayer de se soustraire à leurs responsabilités. Si pour le Hezbollah, la force n'est pas la meilleure des solutions, pour ces gens-là la question se pose.

    Pierrick Poisson

    18 h 23, le 17 mai 2025

  • Vive la démocratie et la liberté d’expression. LOLJ censure tout commentaire qui rappelle le passé de Joulanie.

    Amer tabbara

    12 h 16, le 17 mai 2025

  • "La voie vers une prospérité comme il n’en a jamais connu passe par le désarmement du Hezbollah, pas au sud du Litani mais sur tout le territoire » A bon entendeur, salut!

    Georges MELKI

    11 h 38, le 17 mai 2025

  • La pax americana, décrite dans toute sa clarté. Que ceux qui rêvent encore de jours de gloire et de victoires divines se le disent. Le vaincu ne peut pas poser des conditions . La milice a signé sa réddition, seul moyen pour elle de sauver ses rares sirvivants. Reste à l’Etat à l’appliquer. Mais pas dans dix ans. Il faut battre le fer à chaud. Si l’on veut encore ménager les susceptibilités de certains, alors il faudrait aussi et surtout penser à celles des Libanais qui vivaient sous la botte de la milice. Une chance historique est offerte à notre pays. Saisissons la et vite.

    Goraieb Nada

    06 h 32, le 17 mai 2025

  • "La paix par la force" dit-elle. Elle a tout compris. Les peuples du Moyen-Orient ne comprennent que la force. Que ce soit éthique d'utiliser la force est discutable mais il faut être pragmatique et se dire une bonne fois pour toutes que le Liban n'entrera dans la modernité que par la force s'il le faut (et le désarmement du parti-milice).

    Bob

    05 h 32, le 17 mai 2025

  • Il est évident que l’émissaire américaine Morgan Ortagus ne connaît absolument pas la réalité libanaise et même la syrienne quand elle déclare que « le Liban pourrait apprendre du président syrien Ahmad el-Chareh…. …. »

    Z KD

    04 h 39, le 17 mai 2025

  • Waw mme. Ortagus

    Eleni Caridopoulou

    01 h 02, le 17 mai 2025

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