Un jeune Tiktokeur d'origine israélienne se prenant en photo dans le centre-ville de Beyrouth. Photo tirée du compte miquel_otin.gom
Un TikTokeur espagnol, identifié par des internautes comme étant Israélien, et dont le profil, avec son nom écrit en arabe et en hébreu comprend régulièrement le drapeau israélien, a publié cette semaine sur Instagram et TikTok des vidéos d'un voyage présumé qu'il a effectué au Liban, notamment à Beyrouth et à Jbeil, puis en Israël, qui ont provoqué des réactions partagées parmi les internautes libanais. Si l'homme ne se présente jamais comme Israélien, et que des informations qui sont parvenues à L'Orient-Le Jour précisent qu'il n'a pas la nationalité israélienne, l'homme interagit avec les personnes commentant sur ses publications sans démentir leurs allégations concernant sa nationalité.
Selon la loi libanaise, les citoyens israéliens sont strictement interdits d’entrée au Liban, même s’ils détiennent une double nationalité, les deux pays étant encore en état de guerre, aucune armistice n'ayant jamais été signé après des épisodes d'affrontements successifs. Les autorités libanaises considèrent tout contact — voyage, affaires ou autre — avec Israël comme un délit grave. Toute personne dont le passeport comporte un tampon ou un visa israélien peut donc se voir refuser l’entrée dans le pays ou être détenue. Certains Israéliens possédant un second passeport sont toutefois parvenus à entrer au Liban en dissimulant leur nationalité israélienne, mais cela reste illégal et expose à des risques d’arrestation, de détention ou d’expulsion.
Sur sa biographie sur TikTok, Miquel Otin Gomez, un résident de Barcelone qui a un petit millier d'abonnés, a écrit son nom en anglais, arabe et hébreu. Il affirme, en réponse à un commentaire sous une de ses publications, avoir pu se rendre au Liban grâce à ses deux passeports « américain et espagnol ».
Dans ses vidéos, publiées à partir du 15 avril, il se met en scène circulant en voiture dans Achrafieh ou mangeant dans des restaurants de Hamra et Mar Mikhayel, selon ses commentaires. Trois autres publications, deux vidéos et une série de photos, le montrent ensuite sur la place des Martyrs, dans le centre-ville de Beyrouth. « Devinez où je suis ! ! » lance-t-il à ses abonnés avec, en arrière-plan la mosquée Mohammad el-Amine et un drapeau libanais, affirmant dans un commentaire en anglais, que le Liban accueillait toutes les confessions, y compris « les musulmans, les chrétiens et les Arméniens ». D'autres clips le montrent se promener près de la grotte aux pigeons, à Raouché, ainsi qu'à Jbeil. Lundi dernier, il a finalement publié une vidéo dans ce qu'il dit être un aéroport chypriote, après une escale sur l'île méditerranéenne, avant de nouvelles publications faites depuis Israël.
À l'heure de publication de cet article, la Sûreté générale libanaise, qui est en charge des contrôles aux entrées et sorties du Liban, n’avait pas répondu aux sollicitations de L'Orient-Le Jour pour commenter cette visite.
Réactions mitigées parmi les Libanais
Des Libanais, principalement des jeunes adultes, ont commenté ce « voyage » de M. Gomez au Liban, sur les réseaux sociaux, avec des réactions partagées, certains appelant à ce que « Libanais et Israéliens passent outre du conflit », d’autres exprimant leur indignation, voire des menaces.
Un utilisateur, Lyn, a commenté sous la vidéo de Gomez à Beyrouth : « Viens dans le Sud, crois-moi on t'accueillera bien », a écrit cette personne, accompagnant son message de pictogrammes montrant une bombe et des flammes. Un certain Ali Jaber a de son côté écrit : « Que l'on se rencontre, et on te rappellera comment nous avons traité tes ancêtres ».
En revanche, un internaute s'exprimant sous le pseudonyme Yano a écrit : « Viens visiter Bikfaya (dans le Metn, ndlr) et dis-moi quand tu arrives pour que je te fasse visiter », avec un émoji cœur. Un autre, Hamza, a écrit : « Le Liban unit tout le monde : musulmans, chrétiens, juifs et druzes. Tout le monde est le bienvenu », suivi du drapeau libanais.
Cet incident est survenu alors que Tel-Aviv et Washington font pression sur le Liban pour une normalisation de ses relations avec Israël, ce que Beyrouth continue de refuser catégoriquement. Le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar, avait déclaré en avril qu'Israël souhaitait « normaliser ses relations avec le Liban », bien qu'il ait reconnu que cela paraisse « prématuré du point de vue libanais ».
L'émissaire américaine pour le Liban, Morgan Ortagus, avait déjà appelé à un dialogue ouvert entre le Liban et Israël, déclarant que le président libanais soutenait des négociations diplomatiques. Début février, Joseph Aoun avait rejeté l'idée d'une normalisation, mais s’était dit ouvert à inclure des « experts civils » dans des groupes de travail avec Israël.
Pas une première
En octobre 2024, alors que la guerre faisait rage entre Israël et le Hezbollah, un ressortissant israélien avait été arrêté dans la banlieue sud de Beyrouth. Selon le média israélien Ynet News, il s'agissait de Joshua Tartakovsky, un ancien ultra-orthodoxe de Jérusalem, qui était entré au Liban en tant que « journaliste d'investigation », muni d'un passeport britannique. En 2021, Alyne Tamir, une blogueuse vidéo américano-israélienne suivie par des millions d’abonnés, avait participé au marathon de Beyrouth. Après son départ du Liban, elle avait posté sur son compte Instagram « Dear Alyne » une photo accompagnée d'une légende selon laquelle elle avait effectué à Beyrouth un « voyage secret ».
En mars dernier, un groupe d’ultra-orthodoxes israéliens était entré dans le sud du Liban près de Houla (Marjayoun) pour une « visite religieuse » organisée par l’armée israélienne, le long de la frontière, en territoire libanais.
Cet article a été modifié le 30 avril à 19h avec des informations concernant la nationalité de M. Gomez suite à des informations parvenues à L'Orient-Le Jour
Sans le HB les israéliens ne seraient jamais intéressés à notre pays. HN a utilisé tous les subterfuges pour les attirer afin de justifier ses armes et voilà le résultat. Il est parti, on ne sait où, mais il ne risque pas de nous manquer. Nous avons toujours eu, avant l’arrivée des mercenaires appuyés par les vendus, une armée qui nous a toujours défendus sans effusion de sang ni destruction. Nous sommes des gens civilisés et pacifiques et nous savons manier le verbe et les armes lorsque cela devient nécessaire.
15 h 27, le 29 avril 2025