Rechercher
Rechercher

Culture - Programme

L’arabe à l’honneur au festival d’Avignon : Oum Koulthoum, Shéhérazade ... et le Libanais Ali Chahrour

En arabe, en français et en anglais. C’est dans ces trois langues que vient d’être dévoilée la programmation du prochain festival d’Avignon, plus international que jamais, qui se tiendra de 5 au 26 juillet 2025 dans l’ancienne cité des Papes.

L’arabe à l’honneur au festival d’Avignon : Oum Koulthoum, Shéhérazade ... et le Libanais Ali Chahrour

Le danseur et chorégraphe libanais Ali Chahrour. Photo Instagram

Pour sa troisième édition aux commandes, Tiago Rodrigues, le directeur du festival, qui marque cette année son 79e anniversaire, convie après l’anglais et l’espagnol une langue non européenne pour la première fois : l’arabe. « Inviter l’arabe au festival d’Avignon, dit-il, c’est reconnaître la richesse du monde arabe et son importance dans le domaine des arts vivants, raconter d’autres récits, se tourner vers une langue de lumière, de dialogue, de connaissance et de transmission. »

« Je suis toi dans les mots. » Ce vers du grand poète palestinien Mahmoud Darwiche accompagne le festival d’Avignon cette année. Pour Tiago Rodrigues : « Devenir l’autre c’est pratiquer une curiosité, un respect et plus que cela, un amour de la différence. Et je pense que cet amour de la différence qui est au cœur des arts, au cœur du vers de Darwiche, sera aussi au cœur du festival cette année. » C’est aussi un geste politique et d’ouverture fort à l’heure des replis identitaires. C’est donc un festival ouvert à la diversité qui est aussi celle du monde arabe. On entendra les langues venues de Tunisie, Maroc, Syrie, Palestine et Liban. Une programmation loin d’être exhaustive sur la créativité arabe mais qui tente de faire entendre des voix multiples.

Lire aussi

Dans « Taire », Tamara el-Saadi met Antigone face à l’enfance sacrifiée dans le monde


Ali Chahrour donne une voix aux invisibilisées

Le chorégraphe et danseur libanais s’inscrit dans cette ouverture à l’autre. Dans sa dernière création Quand j’ai vu la mer, il met en scène trois femmes doublement invisibles par leur genre et parce qu’elles sont étrangères. Elles sont éthiopiennes et libanaises. Dans un Liban en proie aux bombes, elles tentent d’échapper au système Kafala qui, en confisquant leur passeport, soumet les travailleuses migrantes à une forme d’esclavagisme moderne et les rend plus vulnérables encore à la guerre. Entre danse, musique et théâtre, Ali Chahrour leur donne une voix et à travers elles fait entendre les récits de centaines d’autres.

Et c’est une grande voix féminine qui résonnera dans la mythique Cour d’honneur du Palais des Papes. Le traditionnel spectacle musical du 14 juillet sera un hommage à Oum Koulthoum pour commémorer les cinquante ans de sa disparition. Zeid Hamdan, le musicien et producteur libanais qui s’est fait connaître à la fin des années 90 à Beyrouth avec le tonitruant groupe électro-arabe Soap Kills réunit cette fois un casting réjouissant. Natacha Atlas, Camelia Jordana, Souad Massi, entre autres vont tenter d’être à la hauteur de l’icône égyptienne : un véritable défi.

Natacha Atlas, Souad Massi et Camelia Jordana dans un hommage à Oum Koulthoum. Photos DR

Dans cette même cour et en ouverture du festival, c’est une autre voix féminine et non des moindres qui ouvrira le bal: celle de Schéherazade. Marlene Monteiro Freitas, la chorégraphe cap-verdienne et artiste associée du festival cette année adapte les Mille et Une Nuits, ce chef-d’œuvre de la littérature arabe, dans lequel elle entrevoit un exercice de survie par les mots.

Les mots, qui seront à l’honneur lors d’une soirée poétique arabe organisée par l’Institut du monde arabe. Le temps d’une nuit, leil si cher aux poètes arabes, on entendra des vers et de la prose, de la poésie antéislamique au raï, des maqâm originels au rap, de la musique soufie à l’arabo-andalou, entre concerts, récitals et performances.

Lire aussi

Ali Chahrour et les oliviers qui pleurent, au théâtre de la Bastille


Les mondes arabes dans leur diversité

Et dans toute cette diversité, c’est celle des mondes arabes qui se déploie. À travers le Liban mais aussi la Tunisie, la Syrie, la Palestine, le Maroc, l’Irak... Ainsi Tamara el-Saadi l’artiste franco-irakienne fera entendre la voix des enfants sacrifiés dans Taire où elle confronte le mythe d’Antigone à l’histoire d’une adolescente ballottée entre plusieurs familles d’accueil.

La Palestine est représentée notamment par Bashar Murkus et Khulood Basel dans YES DADDY où, à travers la perte de mémoire d’un homme âgé, les artistes interrogent la véracité du récit et la manière de raconter l’histoire. Autre artiste palestinien le talentueux plasticien Gazaoui Taysir Batnigi fera partie d’une exposition collective dans l’un des plus beaux lieux du festival l’Église des Célestins.

Le dramaturge syrien exilé en France, Wael Kaddour, revient sur l’histoire du metteur en scène soudanais Yasser Abdel-Latif, exilé à Damas en 2008 pour interroger les conditions de création des artistes dans des contextes de crise politique.

Le Maghreb est très représenté par un florilège d’artistes. La chorégraphe marocaine Bouchra Ouizguen invite des amateurs devant le Palais des Papes dans une performance participative et rassembleuse. Radouan Mriziga, également du Maroc, nous emmènera dans une danse qui s’annonce méditative nourrie du désert, de son savoir et d’un autre rapport au temps et à l’espace.

Le chorégraphe marocain Radouan Mriziga. Photo DR



Alors que Selma et Sofiane Ouissi nous plongent dans un savoir ancestral, celui des potières dans le nord de la Tunisie. Le geste artisanal devient partition chorégraphique mais aussi porteur d’histoire et de mémoire.

La scène théâtrale européenne majeure aux côtés des créations arabes

Et autour de cette constellation d’artistes arabes de grands rendez-vous théâtraux sont au programme. Eric Ruf met en scène la troupe de la Comédie-Française dans le Soulier de Satin de Paul Claudel. Une pièce fleuve et qui a fait date au festival d’Avignon en 1987 dans la mise en scène d’Antoine Vitez. Tiago Rodrigues crée avec La Distance une pièce d’anticipation sur fond de réchauffement climatique avec notamment son acteur fétiche Adama Traoré. Anne-Teresa de Keersmaeker la grande chorégraphe belge de danse contemporaine, prend Jacques Brel à bras le corps et partage la scène avec le jeune danseur venu du breakdance, Solal Mariotte. Milo Rau, le metteur en scène suisse qui ne jure que par le théâtre documentaire, explore cette fois dans un va-et-vient entre le théâtre et la vie, l’impact des événements personnels sur la création des artistes. Christoph Marthaler, le grand metteur en scène suisse allemand, fait son retour à Avignon avec le Sommet où il détourne à sa façon et avec humour une conférence au sommet des grands de ce monde. Un 79e festival d’Avignon qui s’annonce riche en pensée et en création. 

Pour sa troisième édition aux commandes, Tiago Rodrigues, le directeur du festival, qui marque cette année son 79e anniversaire, convie après l’anglais et l’espagnol une langue non européenne pour la première fois : l’arabe. « Inviter l’arabe au festival d’Avignon, dit-il, c’est reconnaître la richesse du monde arabe et son importance dans le domaine des arts vivants, raconter d’autres récits, se tourner vers une langue de lumière, de dialogue, de connaissance et de transmission. »« Je suis toi dans les mots. » Ce vers du grand poète palestinien Mahmoud Darwiche accompagne le festival d’Avignon cette année. Pour Tiago Rodrigues : « Devenir l’autre c’est pratiquer une curiosité, un respect et plus que cela, un amour de la différence. Et je pense que cet amour de la différence qui est au cœur des...
commentaires (0) Commenter

Commentaires (0)

Retour en haut