Laissée à l’abandon depuis près de cinq ans, la Cité sportive de Beyrouth a soudainement fait peau neuve. Difficile de ne pas le remarquer pour quiconque a emprunté ces derniers jours la route de l’aéroport surplombée d’imposants portraits de Hassan Nasrallah et de Hachem Safieddine, qui trônent le long du mur d’enceinte du stade Camille Chamoun. Pas de doute, c’est ici que se dérouleront, dimanche 23 février, les funérailles de l’ancien secrétaire général du Hezbollah, en plus de celles de son éphémère successeur, près de cinq mois après leurs assassinats respectifs au plus fort de la guerre, ciblés par des raids aériens massifs de l’aviation israélienne sur la banlieue sud de Beyrouth.

« Tour spécial réservé à la presse »

À l’entrée du stade, un petit groupe de chabeb équipé de talkies-walkies soulève selon son bon vouloir l’imposante barrière qui bloque l’accès aux tribunes. « Vous avez une autorisation ? » demande l’un d’entre eux, derrière son œil de verre. « Revenez samedi, il y aura un tour spécial réservé à la presse », assure-t-il. Certains chanceux ont toutefois pu pénétrer dans l’enceinte et obtenir en exclusivité les premières images des préparatifs de ces obsèques qui s’annoncent grandioses : « Il y aura une structure principale au milieu du stade sur laquelle seront dressés deux écrans géants et où seront posés les cercueils après avoir fait le tour du stade. La pelouse sera remplie de 23 000 chaises et les tribunes pourront accueillir jusqu’à 55 000 personnes », détaille l’un des organisateurs à al-Manar, la chaîne d’informations du Hezbollah. Soit près de 80 000 personnes qui pourront pénétrer dans l’enceinte après avoir reçu l’un des clinquants faire-part ayant convié des personnalités issues de « plus de 70 pays », indique le parti dans un communiqué. « Nous vous invitons à participer aux funérailles des deux sayyeds martyrs. La cérémonie débutera à 13h. Nous accueillerons les personnalités officielles à 12h30 », peut-on lire sur les cartons d’invitation. Parmi les invités de marque, figurent entre autres de nombreuses personnalités politiques libanaises, dont le président Joseph Aoun « qui ne se rendra pas en personne à l’événement, mais y sera représenté », explique-t-on au palais de Baabda.

Un nombre « inquantifiable » de participants

Comment sécuriser la venue d’une telle affluence ? La tâche s’annonce ardue pour les différentes composantes du large dispositif sécuritaire qui sera mis en place pour l’occasion, auquel se joindront les forces armées de l’État. « L’armée et les Forces de sécurité intérieure seront bien entendu déployées à Beyrouth et dans différentes régions pour sécuriser tous les points de rassemblement », confie à L’Orient-Le Jour une source militaire qui indique que les mesures de sécurité ont été « renforcées » à l’aune des récents incidents survenus sur la route de l’aéroport. « Nous nous attendons à ce que plusieurs centaines de milliers de personnes au total participent à l’événement. Mais ce chiffre est “inquantifiable”, car on ne sait combien de personnes viendront de la banlieue sud de Beyrouth ou des autres régions chiites du pays », ajoute-t-elle.

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Pour ce faire, tout un ensemble d’axes routiers seront fermés à la circulation au moment des célébrations, en particulier ceux inclus dans l’itinéraire de la marche funèbre qui sera organisée dans la capitale. « Nous publierons l’identité des routes qui seront fermées d’ici à la fin de la semaine », précise une seconde source sécuritaire. « Il y aura de toute évidence la route de l’aéroport, celle qui passe par la Cité sportive, mais aussi de nombreuses rues adjacentes, car il est probable que de nombreuses foules convergent vers le lieu d’inhumation », indique-t-elle.

Un mausolée à « 44 millions de dollars » ?

Une autre vidéo récemment publiée par al-Manar montre qu’un autre chantier avance nuit et jour en parallèle de celui en cours entre les murs du stade Camille Chamoun. Sur un terrain de Bourj el-Brajné, située à un peu plus d’un kilomètre au nord de l’entrée de l’Aéroport international de Beyrouth (qui a annoncé sa fermeture de midi à 16h dimanche), sera érigé un mausolée en l’honneur du sayyed. Ce dernier y sera inhumé, seul, au terme de la cérémonie, tandis que Hachem Safieddine sera enterré le lendemain dans son village natal de Deir Qanoun el-Nahr, au Liban-Sud. La rumeur dit que le terrain où sera enterré Hassan Nasrallah aurait été négocié pour la modique somme de « 44 millions de dollars » entre l’ancien propriétaire et le parti chiite, comme l’a récemment affirmé l’analyste politique Joseph Abou Fadel sur le plateau de la chaîne MTV. Un chiffre que L’OLJ n’a pu confirmer. D’autres informations circulant sur les réseaux sociaux font état d’une vente de « souvenirs », en marge de l’événement, pour aider au financement de la cérémonie.

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La marche funèbre, lors de laquelle le cercueil de Hassan Nasrallah sera transporté sur 2,6 kilomètres, représente « l’étape la plus risquée », selon la source sécuritaire précitée « en raison des mouvements de foule ou des potentielles provocations de l’ennemi israélien ». C’est pourquoi un important dispositif médical et de secouristes sera également mobilisé pour gérer les éventuels incidents. « Nous serons disposés aux abords du stade, tout au long du tracé de la marche et dans les différents points de rassemblement, à Beyrouth, à Saïda, à Tyr et Nabatiyé, assure à L’OLJ Mahmoud Karaki, le responsable presse de la Défense civile d’Autorité islamique de santé, affiliée au Hezbollah. « Il y aura au total plus de 1 500 secouristes et infirmiers, avec parmi eux plus de 70 médecins spécialisés répartis dans les 50 centres d’urgence que nous allons mettre en place à Beyrouth », développe-t-il, en précisant que « 50 ambulances et une vingtaine de véhicules de pompiers » seront par ailleurs répartis entre les différentes équipes d’intervention prêtes en cas de besoin.