Des partisans du Hezbollah se rassemblent pour bloquer la route de l'aéroport international de Beyrouth suite à la décision d'interdire à deux vols iraniens d'y atterrir, à Beyrouth le 15 février 2025. Photo AFP/IBRAHIM AMRO
Vingt-trois soldats libanais ont été blessés samedi dans des échauffourées pendant une manifestation sous tensions organisée par le Hezbollah pour protester contre l'interdiction d'atterrir d'un avion iranien prise jeudi par les autorités libanaises. La troupe a annoncé ce bilan et justifié sa décision d'intervenir par le fait que les protestataires avaient bloqué la route menant à l'aéroport international de Beyrouth, alors que le Hezbollah avait dénoncé l'usage par les militaires de gaz lacrymogène sur la foule dans un « acte répréhensible » et une « agression injustifiée contre des citoyens pacifiques ».
Dans son communiqué, l'armée libanaise a souligné qu'une « coordination préalable a été effectuée avec les organisateurs du sit-in concernant l'engagement à l'expression pacifique de l'opinion et la promesse de ne pas bloquer la route menant à l'aéroport. Cependant, un certain nombre de manifestants ont ensuite barré la route et attaqué les unités militaires chargées du maintien de la sécurité et leurs véhicules, ce qui a provoqué des blessures diverses à 23 soldats, dont trois officiers, obligeant ces unités à intervenir pour empêcher l'attaque contre leur personnel et ouvrir la route », a écrit l'armée sur son compte X.
Préserver la sécurité des voyageurs et la stabilité
Et le texte d'ajouter : « L'intervention de l'armée s'est faite en application de la décision de l'autorité politique d'empêcher le blocage des routes et les empiètements sur les biens publics et privés, d'assurer le fonctionnement des services publics, de préserver la sécurité des voyageurs, et de maintenir la sécurité et la stabilité. »
Plus tôt dans la journée, le Hezbollah avait affirmé que les manifestants ont été surpris la veille lorsque des « soldats de l'armée ont tiré sur eux des gaz lacrymogènes, dans un acte répréhensible qui constitue une agression injustifiée contre des citoyens pacifiques ». Le parti pro-iranien avait organisé samedi une manifestation pour dénoncer « l'ingérence flagrante d'Israël dans les affaires libanaises et la violation de la souveraineté nationale », en bloquant l'ancienne route de l'aéroport.
Le Hezbollah réclame une enquête de l'armée
Les partisans du Hezbollah protestent depuis jeudi contre l'interdiction d'atterrir au Liban de deux vols iraniens, soupçonnés de transférer des fonds au parti. La manifestation de samedi était la première officiellement organisée par le parti chiite. Pour ce dernier, « il s'agit d'une manœuvre suspecte visant à impliquer l'armée dans une confrontation avec son propre peuple ». Il a appelé le commandement militaire à ouvrir une « enquête urgente sur cette attaque condamnable et à prendre les mesures appropriées pour préserver le rôle de la troupe dans la protection de la stabilité et de la paix civile ».
Le Hezbollah a également appelé le gouvernement libanais à assumer ses « pleines responsabilités dans la protection des manifestants pacifiques et leur droit à exprimer leurs positions et leurs revendications ». Il lui a demandé de « revenir sur sa décision d'empêcher les avions iraniens d'atterrir à l'aéroport de Beyrouth et de prendre des mesures sérieuses pour empêcher l'ennemi israélien d'imposer ses diktats et d'empiéter sur la souveraineté nationale ». Enfin, le parti a condamné l'incident survenu vendredi contre la force onusienne à proximité de l'aéroport et souligné qu'il rejetait tout « ciblage de la Finul, ainsi que toute atteinte aux biens publics et privés ».
Les réactions
Premier à réagir aux déclarations du Hezbollah, le parti Kataëb a considéré « que ce que fait le Hezbollah est un message très négatif » et condamné les événements survenus dans le sillage de l'affaire de l'avion iranien. Le parti a aussi déploré de voir le « le Hezbollah s'obstiner à affronter les Libanais, d'abord en les terrorisant, en bloquant les routes, en attaquant les forces de sécurité légitimes et même en attaquant la Force intérimaire des Nations unies au Liban, avant de défier les institutions et de chercher à les faire tomber, dans une dangereuse tentative de rétablir des équations qui ont été irrévocablement effacées » du spectre politique et sécuritaire libanais.
« Après tous les malheurs, la destruction, la mort et l'occupation qu'il a apportés au Liban, on supposait que le Hezbollah comprendrait qu'il ne peut pas renier les engagements qu'il a acceptés dans l'accord de cessez-le-feu, et nous ne lui permettrons pas non plus d'entraver la marche de la nouvelle ère et le début du travail du gouvernement, car les Libanais ne compromettront pas leur sécurité et leur stabilité sous quelque prétexte que ce soit », ont écrit les Kataëb, réitérant leur soutien à l'armée libanaise, à la présidence libanaise et au nouveau gouvernement formé par Nawaf Salam il y a plus d'une semaine.
Parmi les autre commentaires sur la situation et les actions du Hezbollah, le leader druze Walid Joumblatt, a affirmé que « l'équation précédente au Liban a changé en raison des circonstances politiques et militaires et de l'agression israélienne », dans une interview radiophonique dimanche sans toutefois directement répondre au parti chiite. « La présence de milices militaires au Liban appartient désormais au passé », a estimé le chef druze, qui a souligné qu'il ne voulait pas voir un groupe de Libanais devenir « un outil entre les mains de l'Iran ».
Arrestations à Bourj Brajné
Pour la deuxième journée consécutive, des tensions avaient éclaté dans les rues de la banlieue-sud de Beyrouth, sous l'effet de la colère des partisans du Hezbollah, suite à l'interdiction des avions iraniens. Un convoi de la Finul se rendant à l'aéroport a été attaqué et deux Casques bleus népalais ont été blessés. La Finul s'est déclarée « choquée par une attaque scandaleuse contre des soldats de la paix qui ont œuvré au rétablissement de la sécurité et de la stabilité au Liban-Sud ».
Le chef de l'unité de liaison du Hezbollah, Wafic Safa, avait auparavant qualifié d'« inacceptable » l'attaque contre les forces de la Finul vendredi sur la route de l'aéroport. « Le Hezbollah entretient de bonnes relations avec la Finul, la coordination entre nous est totale et le parti respecte la résolution 1701 », avait-il déclaré à la chaîne al-Mayadeen. Le parti Kataëb s'est, lui, interrogé dans son communiqué sur la position contradictoire prise par Wafic Safa, jugeant que ses propos « ne trompaient personne. »
Samedi soir, l'armée libanaise avait procédé à des arrestations à Bourj Brajné, dans la banlieue-sud de Beyrouth, en lien avec les incidents survenus la veille sur la route de l'aéroport.
On a toujours répété que les armes du HB sont là pour combattre les libanais et personne d’autre. Ils viennent enfin de le prouver et les masques sont dorénavant tombés. Avis à notre President qui a le devoir de défendre notre pays contre tous ses ennemis, à commencer par ceux de l’intérieur qui ne loupent pas une occasion pour montrer leur zèle à détruire tout ce qu’on a l’intention de réparer. Ils faut leur tenir tête et les traiter comme tels. S’ils étaient patriotes, ils auraient épargné à leurs partisans une humiliation et une mort certaine. Alors ces derniers vont ils enfin se réveiller?
11 h 36, le 17 février 2025