Le chef du Courant patriotique libre (CPL, aouniste), le député Gebran Bassil, n'a pas fini de se réjouir de l'arrestation, mardi dernier, de l'ex-gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé, poursuivi depuis mercredi pour « détournement et vol de fonds publics, faux et enrichissement illicite ». Dans sa troisième réaction à la mise sous les verrous de M. Salamé, bête noire du CPL et de son chef, M. Bassil a salué les efforts du procureur général par intérim près la cour de cassation, Jamal Hajjar, qui avait ordonné l'arrestation.
Ce développement inédit dans la série d'affaires concernant M. Salamé au Liban, qui s'ajoutent à celles lancées dans de nombreux pays européens, a « une signification symbolique », a estimé Gebran Bassil dans un discours prononcé vendredi soir lors d'un événement partisan dans son fief de Batroun. « Riad Salamé est soutenu par le système et fait face à tout le peuple libanais. Son arrestation, même pour deux jours seulement, est une victoire pour les Libanais et cela est dû à un juge qui a osé et a fait primer la justice sur les intérêts du système », a-t-il lancé.
« La malédiction des Libanais et de Dieu »
« Aucun juge, quelle que soit sa confession ou son appartenance politique, ne peut libérer Riad Salamé car la malédiction du peuple libanais et celle de Dieu le poursuivront », a ajouté le député. Il a dans ce cadre affirmé que son parti « ne restera pas silencieux » sur cette affaire, que ce soit devant la justice ou dans la rue. « Et personne ne pourra nous empêcher de nous tourner vers la justice internationale si la justice libanaise nous trahit », a-t-il déclaré, rappelant que le CPL faisait partie des détracteurs les plus virulents de l'ex-gouverneur « parce qu'il ne s'agit pas d'un parti corrompu ».
Une audience de Riad Salamé est prévue lundi devant le premier juge d'instruction par intérim de Beyrouth, Bilal Halaoui, après que le dossier a été déféré devant lui par le parquet financier. C'est le juge d'instruction qui a le pouvoir d'émettre ou non un mandat d'arrêt à l'encontre de l'ancien responsable financier.
Consensus, dialogue et consultations
Sur le plan de la guerre de Gaza et de l'implication du Hezbollah, normalement allié du CPL mais avec qui les relations sont au plus bas depuis des mois, Gebran Bassil a réitéré sa position habituelle. « Nous sommes pour la défense du Liban contre Israël, mais contre son implication dans des guerres qui ne lui sont pas profitables ».
L'entrée en guerre, décidée unilatéralement par le parti chiite le 8 octobre 2023, au lendemain de l'attaque du Hamas en Israël et du début de l'offensive sanglante de l'armée israélienne à Gaza, est une des raisons pour lesquelles les liens entre les aounistes et le parti de Hassan Nasrallah se sont distendus. Ces tensions sont venues s'ajouter au reproche que fait le CPL au Hezbollah de soutenir la candidature à la présidentielle libanaise de Sleiman Frangié, leader du courant des Marada et adversaire politique de M. Bassil. À ce sujet, le député de Batroun a indiqué que, si «le CPL a déclaré dès le premier jour qu'il ne veut pas d'un président de la République qui lui soit affilié, il refuse qu'un choix ou un président lui soit imposé», appelant à « un consensus, au dialogue et à des consultations » des différentes parties.
La réponse à Geagea
En ce qui concerne le parti lui-même, Gebran Bassil a estimé que ce qui est « attendu du CPL sur le plan politique, c'est qu'il retrouve sa popularité de pré-2018 », soulignant qu'il faut « reconnaître les erreurs, sans toutefois assumer des fautes qui ne sont pas de son chef ». Le parti a été secoué, ces derniers mois, par une vague de départs ou de mises à la porte de plusieurs piliers aounistes, notamment les députés Elias Bou Saab, vice-président de la Chambre, Alain Aoun, Ibrahim Kanaan et Simon Abi Ramia. « Des campagnes médiatiques et des sanctions lancées contre nous ont échoué, et voilà que l'on nous cible de l'intérieur » même du pays, a affirmé le chef du CPL, qui fait l'objet de sanctions américaines pour corruption et pour ses liens avec le Hezbollah.
« Un leader chrétien a dit dernièrement que la désintégration du CPL est dans l'intérêt du Liban. Cette déclaration est uniquement adressée à ceux qui tentent de manipuler le Tayyar de l'intérieur », a-t-il ajouté, en allusion à une déclaration faite jeudi soir par le chef des Forces libanaises (FL), Samir Geagea, autre grand opposant politique de M. Bassil. « Bien que l'intérieur et l'extérieur se soient unis pour nous démanteler, nous leur répondrons que nous sommes engagés, unis et plus forts que jamais », a-t-il déclaré.
chacun son tour...
11 h 06, le 09 septembre 2024